HISTOIRE MILITAIRE

MCG 19710261-0056, Collection d’art militaire Beaverbrook, Musée canadien de la guerre

À l’assaut, Neuville-Vitasse, par Alfred Bastien.

Contrairement à ce que l’on a trop longtemps soutenu, les Canadiens français ont bel et bien fait leur juste part pendant la Première Guerre mondiale

par Jean Martin

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M. Jean Martin, Ph. D., est historien à la Direction – Histoire et patrimoine au quartier général de la Défense nationale. Il est responsable de l’histoire officielle de la participation du Canada à la première Force d’urgence des Nations Unies (de 1956 à 1967) en Égypte. M. Martin s’intéresse aussi particulièrement à la géographie militaire et à la défense du territoire du Canada pendant la Deuxième Guerre mondiale.

Introduction et contexte

En 2014, je publiais un ouvrage dans lequel j’osais suggérer, à l’encontre de la croyance populaire, que le nombre de Canadiens français enrôlés dans le Corps expéditionnaire canadien (CEC) dépassait largement 35 000; ce nombre maximal, avancé en 1937 par Mme Elizabeth H. Armstrong, auteure et historienne américaine, a été repris sans questionnement par la plupart des historiens canadiens au cours des décennies suivantes1. J’avais fondé mes estimations sur les trois éléments suivants : 1) une évaluation de l’enrôlement maximal possible des anglophones dans la province de Québec, 2) des données sur les pertes, extraites des dossiers de la Commission des sépultures de guerre du Commonwealth, et 3) une lettre rédigée en 1927 par le directeur des archives au ministère de la Défense nationale2. Ensuite, j’ai pu avoir accès à une base de données constituée par une équipe de chercheurs de l’Université de Guelph et contenant tous les dossiers d’enrôlement des soldats dont le nom de famille commençait par la lettre « B », ce qui représentait environ 10 pour 100 des membres du CEC3. Après avoir réalisé une analyse approfondie de cet échantillon important, j’ai estimé qu’au total, le CEC comptait probablement de 70 000 à 75 000, voire jusqu’à 79 000 membres francophones, une fois tous les dossiers examinés. Mon estimation a été contestée par certains historiens, qui refusaient de remettre en question l’idée générale selon laquelle la participation des Canadiens francophones était beaucoup plus restreinte.

J’ai donc maintenant passé en revue les 627 586 dossiers d’enrôlement contenus dans la base de données de Bibliothèque et Archives Canada (BAC), et je peux maintenant confirmer qu’au moins 74 795 Canadiens français ont fait partie du CEC à un moment donné au cours de la Première Guerre mondiale. Je dis bien « au moins » parce qu’un nombre appréciable de soldats francophones a sans aucun doute échappé à mon examen minutieux. Il n’existe aucun moyen sûr de distinguer les francophones à partir des dossiers d’enrôlement du CEC. Ces dossiers ne contiennent aucune mention de la langue parlée des recrues, et l’origine du nom est la seule donnée fiable permettant de discerner les francophones. Il était donc nécessaire de dépouiller les 627 586 noms et d’extraire tous ceux qui étaient clairement d’origine française4. Il s’agit de la méthodologie que j’ai adoptée dans mon analyse.

Méthodologie

La seule base de données qui regroupe tous les dossiers d’enrôlement du CEC est conservée par BAC et ne peut être téléchargée qu’en format XML, un format qui ne se prête pas au traitement de données, quel qu’il soit5. Par conséquent, à partir du site Web de BAC, il nous a fallu récupérer un à un tous les dossiers classés sous chacune des lettres de l’alphabet et les copier dans un tableur6. Étant donné qu’au maximum 2 000 dossiers pouvaient être téléchargés à la fois, nous avons dû lancer nos recherches en utilisant les deux, parfois les trois et même les quatre premières lettres du nom7. Nous avons ensuite passé en revue tous les noms inscrits dans chaque tableur pour déterminer ceux qui étaient clairement d’origine française. Comme il nous a été impossible de consulter chaque fiche d’enrôlement pour vérifier si les recrues qui portaient un nom français provenaient vraiment d’une famille francophone, nous avons supposé que toutes les recrues qui avaient un nom français étaient francophones8. Une telle approche peut être contestée puisqu’on peut faire valoir que toutes les personnes qui portent un nom français ne parlent pas nécessairement français, mais nous estimons, pour deux raisons, qu’il s’agit d’une méthode tout à fait fiable pour déterminer le nombre total de francophones.

D’abord, les « faux francophones » qui auraient été inclus dans notre estimation sont amplement contrebalancés par les nombreux francophones qui ont été exclus parce qu’ils portaient un nom de consonance anglaise. Des noms de famille comme Martin, Gilbert, Lambert, Page (Pagé) et plusieurs autres sont relativement populaires dans les deux langues, et à moins d’avoir un prénom clairement français, comme Onésime ou Anatole, la personne qui portait un de ces noms de famille ambigus n’était pas considérée comme étant francophone. Nous savons aussi que beaucoup de francophones ont vu leur nom transformé ou déformé au point d’être méconnaissable, la plupart du temps pour être mieux accepté par les collègues ou supérieurs anglophones, et ces véritables francophones nous ont donc aussi échappés. En contrepartie, nous n’avons recensé aucun soldat anglophone dont le nom aurait été modifié pour que l’orthographe ou la consonance paraisse davantage française9.

MCG 19900348-021, Musée canadien de la guerre

Affiche de recrutement en temps de guerre – Canadiens français.

BAC, no d’acquisition 1983-28-779

Affiche de recrutement en temps de guerre – 178e Bataillon.

La deuxième raison est qu’à l’époque, l’« anglicisation » n’avait pas encore fait de grands progrès au Canada. Les lois qui interdisaient les écoles francophones dans l’Ouest ont été adoptées à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, et en 1915, les jeunes hommes francophones originaires de ces provinces n’avaient aucune raison d’avoir oublié leur langue maternelle. Dans les provinces de l’Est, établies depuis plus longtemps, les collectivités francophones dynamiques prospéraient, et dans l’Est du Québec, c’étaient les descendants des colons irlandais et écossais, comme les Harveys, les Murrays et les Blackburns, qui avaient déjà commencé à abandonner leur langue maternelle, l’anglais ou le gaélique, pour s’exprimer en français. Le recensement de 1941 nous donne un aperçu des langues parlées par les Canadiens de différentes origines. Des 3,5 millions de personnes d’origine française qui vivaient toujours au Canada à cette date, plus de deux millions parlaient exclusivement français et plus d’un million parlaient français et anglais. Dans l’ensemble, plus d’une vingtaine d’années après la Première Guerre mondiale, près de 95 pour 100 des Canadiens d’origine française pouvaient toujours parler français. Cette proportion, vraisemblablement, était même supérieure deux décennies auparavant. En fait, la proportion devait même friser les 100 pour 100. Assurément, un grand nombre de Canadiens français avaient appris l’anglais en 1914, et ce nombre devait être encore plus grand en 1919, mais dans la mesure où ils pouvaient encore s’exprimer en français, je ne vois pas comment ils ne pourraient pas être qualifiés de francophones.

Par conséquent, il est raisonnable de supposer que tous les membres du CEC qui portaient un nom de toute évidence français, comme Fréchette, Simard ou Turgeon, étaient francophones, et j’en ai moi-même dénombré 75 755 parmi les 627 586 dossiers conservés par BAC. Cependant, il y a un certain nombre de dossiers en double, en plus d’un nombre inconnu de dossiers de contrevenants ou de déserteurs aux termes de la Loi du Service Militaire. Nous ne connaissons pas le nombre exact de ces dossiers, mais nous savons par d’autres sources que le CEC comptait 619 636 membres10. Les dossiers en double représenteraient légèrement plus d’un pour cent de tous les dossiers. Le nombre de francophones a donc été calculé au prorata et établi à 74 795.

Caractéristiques

Il est assez intéressant d’étudier la distribution alphabétique des francophones. Même si les francophones représentent de façon générale 12 pour 100 de tous les soldats, leur proportion peut atteindre 35 pour 100 sous certaines initiales, comme la lettre « L ». En effet, près de 13 000 soldats francophones ont été recensés uniquement sous cette lettre. Parmi les autres lettres initiales les plus courantes, mentionnons « B » (11 145), « D » (7 840) et « G » (7 199). Plus de la moitié des francophones portaient un nom de famille qui commençait par une de ces quatre lettres. D’autres lettres, comme « W » (aucun francophone) ou « K » (seulement 20 francophones), étaient beaucoup moins courantes. Cependant, la lettre « M » était un cas particulier. Outre les quelque 30 000 noms écossais qui commencent par « Mc », près de 9 pour 100 des autres noms étaient francophones et un nombre considérable de noms, entre autres les noms qui commençaient par « Mac » et le nom Martin (1 970), ont dû être rejetés.

Auteur

Figure 1 – Proportion de soldats francophones selon la première lettre de leur nom.

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J’ai déjà suggéré que l’une des raisons qui expliquent en partie la sous-estimation des francophones dans le CEC est le nombre important de ceux qui provenaient de l’extérieur du Québec, c’est-à-dire environ 35 pour 100 du nombre total11. À partir de la liste de base que nous avons consultée, nous n’avons pas été en mesure de déterminer le lieu d’origine ou de recrutement des soldats, mais nous avons tout de même décelé plusieurs indices. Par exemple, nous avons recensé 400 soldats qui portaient le nom Arsenault et 800 soldats qui portaient le nom Leblanc; ces deux noms sont très courants parmi les Acadiens, mais beaucoup moins au Québec. En revanche, nous n’avons recensé que 650 Tremblay, de loin le nom le plus courant au Québec, soit au moins trois fois plus courant que le nom Leblanc dans la province. Cela semble indiquer une grande représentation d’Acadiens et il est raisonnable de supposer que les francophones du Québec se sont enrôlés dans une proportion généralement moindre que les francophones de l’extérieur de la province.

Il est difficile de pousser plus loin l’analyse de ces données, car il s’agit tout simplement d’une liste de nombres dépourvue de renseignements supplémentaires. Toutefois, comme le nombre de personnes enrôlées que nous avons déterminé permet de confirmer la validité de la déduction que nous avons tirée à partir de la base de données de la lettre « B » dans mon article précédent, nous pouvons supposer que les autres analyses effectuées sur cette base peuvent s’appliquer en toute fiabilité à l’ensemble des francophones qui ont été recensés. Contrairement à la liste sommaire, la base de données de la lettre « B » contient tous les renseignements disponibles sur les fiches d’enrôlement de tous les soldats dont le nom de famille commence par la lettre « B », ce qui représentait approximativement 10 pour 100 des membres du CEC. Des calculs de toutes sortes peuvent être faits à partir des dossiers de cette base de données.

MDN/Bibliothèque et Archives Canada, PA-000298

Tranchées de drainage : 22e Bataillon d’infanterie, en juillet 1916.

D’abord, il ne faut pas perdre de vue que ces 75 000 Canadiens français n’étaient pas tous des volontaires enthousiastes, bien au contraire. Environ 52 pour 100 des francophones classés sous la lettre « B » étaient des conscrits. Si nous appliquons la même proportion à l’ensemble des francophones du CEC, cela signifie qu’à peu près 39 000 d’entre eux étaient des conscrits et qu’en conséquence, 36 000 étaient des volontaires. Par rapport à l’ensemble des membres du CEC, il est évident que les Canadiens français s’enrôlaient beaucoup moins facilement que les autres, pour plusieurs raisons. D’abord, il est vrai que les Canadiens français ne se sentaient pas autant concernés par une guerre qui se déroulait sur un continent avec lequel ils avaient peu de liens, contrairement aux Canadiens anglais, qui étaient nés en Grande-Bretagne ou, très souvent, y avaient toujours de la famille. La famille de la plupart des Canadiens français s’était établie en Amérique du Nord depuis plus de 150 ou de 200 ans, et il y a de fortes chances que ces Canadiens français n’avaient jamais rencontré de véritable Français de leur vie. Henri Bourassa avait tout à fait raison quand il a déclaré ceci en 1916 : « En somme, si les Canadiens de langue anglaise s’enrôlent en beaucoup plus petit nombre que les nouveaux venus d’Angleterre, c’est parce qu’ils sont beaucoup plus Canadiens; si les Canadiens français s’enrôlent en moins grand nombre que les Canadiens anglais, c’est parce qu’ils sont totalement et exclusivement Canadiens.12 »

Ensuite, le CEC était une organisation exclusivement anglophone et les personnes qui ne pouvaient pas s’exprimer en anglais ne s’y sentaient pas toujours les bienvenues. Certains commandants d’unité étaient prêts à accepter de nouvelles recrues de toutes les origines, alors que d’autres rejetaient tout simplement les volontaires qui ne cadraient pas avec le milieu très britannique, en particulier pendant les premiers mois de la guerre, alors que tout le monde s’attendait à ce que le conflit soit réglé avant la fin de 1914. Pour le premier contingent qui a quitté Valcartier en octobre 1914 avec 30 000 soldats, 3 280 volontaires avaient été rejetés. Un francophone volontaire sur quatre était rejeté; le rapport était d’un sur douze pour les autres volontaires13. Les francophones étaient donc rejetés trois fois plus que les autres volontaires. Était-ce une question de racisme? Dans la plupart des cas, probablement pas, mais il est compréhensible que les chances d’être acceptés aient été supérieures pour un candidat qui s’exprimait bien en anglais et était parfois originaire du même comté en Angleterre que le commandant que pour celui qui ne pouvait pas s’exprimer en anglais ou même comprendre les ordres qu’on lui donnait.

 

Nombre de volontaires (approximatif)

Nombre de volontaires rejetés

Proportion

Francophones

1 245

302

24,3 %

Autres

35 022

2978

8,5 %

Auteur

Tableau 1 – Nombre de volontaires rejetés du premier contingent, 1914.

Peu importe la raison, les premiers Canadiens français volontaires se sont souvent sentis indésirables dans les forces armées du Canada et humiliés par celles-ci, et ils n’en ont certainement pas vanté les mérites quand ils sont retournés dans leur collectivité. Certains ont essayé, parfois avec succès, de s’enrôler quelque temps plus tard au sein d’une autre unité, mais d’autres ont juré que s’ils n’étaient pas assez bien pour les forces armées en 1914, les forces armées ne seraient plus jamais assez bien pour eux. Il s’agissait d’un bien mauvais départ pour le recrutement des Canadiens français dans le CEC. En consultant la base de données de la lettre « B », nous remarquons que l’enrôlement des francophones a suivi une tendance semblable à l’enrôlement général. Dans l’ensemble, l’enrôlement s’est fortement accru de 1914 à 1915. Il a continué à croître en 1916, bien que beaucoup plus lentement, avant de connaître un déclin spectaculaire en 1917. Cela dit, grâce à la conscription, le nombre de recrues a plus que doublé en 1918, se rapprochant du nombre atteint en 1915.

L’enrôlement des francophones a suivi une tangente plutôt semblable, sauf en 1918, année au cours de laquelle le nombre de recrues francophones représentait plus de la moitié de la contribution totale de francophones. En fait, de 1914 à 1916, l’enrôlement des francophones, qui était sur une base volontaire, a augmenté plus rapidement que l’enrôlement général. L’enrôlement des francophones a aussi décliné brusquement en 1917, mais n’a pas atteint un niveau aussi bas que pour le reste du Canada. Ainsi, il semble que l’enrôlement volontaire des francophones ait été, entre 1915 et 1917, plus stable que l’enrôlement volontaire dans les autres groupes. Les deux années qui ont posé problème concernant les francophones sont 1914, alors que les recrues d’origine canadienne-française n’étaient pas toujours les bienvenues, et 1918, alors que bon nombre de Canadiens français ont été conscrits conformément à la Loi du Service Militaire. Près de 21 pour 100 des volontaires francophones se sont enrôlés en 1917, par rapport à seulement 14 pour 100 des volontaires en général. Cependant, il y a lieu de mentionner qu’en 1917, la majorité des volontaires francophones se sont enrôlés pendant les derniers mois de l’année, après l’adoption de la Loi du Service Militaire par le Parlement, ce qui ne correspond pas à la tendance de l’enrôlement général.

Auteur

Figure 2 – Tendances de l’enrôlement des volontaires, 1914-1917.

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De toute évidence, la majorité des Canadiens français se sont enrôlés dans le CEC par suite de l’adoption de Loi du Service Militaire. Les Canadiens français étaient donc des conscrits, mais ils n’étaient pas les seuls. Selon une estimation effectuée en 1920, environ 25 pour 100 des recrues anglophones nées au Canada étaient aussi des conscrits14. Selon cette même estimation, 52 pour 100 des conscrits étaient des anglophones nés au Canada, 22 pour 100 étaient des Canadiens français et 26 pour 100 étaient nés à l’extérieur du pays. Nous savons maintenant que, puisque le nombre total de francophones au sein du CEC a été sous-estimé, le nombre de conscrits francophones l’a nécessairement été. Dans les statistiques établies par le ministère de la Défense nationale (MDN), il est indiqué qu’il y eu 27 757 conscrits francophones, mais selon notre calcul, ils étaient probablement environ 39 000. Si nous acceptons le total de 92 302 conscrits canadiens établi par le MDN, cela signifie qu’il y aurait eu quelque 53 300 conscrits anglophones nés au Canada. Il y a eu 318 728 soldats nés au Canada dans le CEC. En admettant que 75 000 d’entre eux étaient des Canadiens français, il resterait donc environ 240 000 non-francophones et nés au Canada, dont au moins 53 000 étaient des conscrits. Nous avons donc une possibilité de 187 000 volontaires non-francophones nés au Canada contre 36 000 francophones, ce qui représente un volontaire canadien-français pour cinq autres volontaires nés au Canada.

 

Soldats volontaires

 

Francophones

Proportion

Autres

Proportion

Total

Estimation de 1920

30 276

13,4 %

195 127

86,60 %

225 403

Notre calcul

36 000

16,1 %

187 000

83,1 %

223 000

 

Soldats de conscription

 

Francophones

Proportion

Autres

Proportion

Total

Estimation de 1920

27 757

30 %

64 745

70 %

92 502

Notre calcul

39 000

42,4 %

53 000

57,6 %

92 000

Auteur

Tableau 2 – Enrôlement des soldats nés au Canada.

En 1915, les Canadiens français représentaient environ 24 pour 100 de la population totale du pays, mais il est probable qu’au moins 30 pour 100 de cette population était née dans un autre pays. Ainsi, près de 35 pour 100 des personnes nées au Canada parlaient français, ce qui est largement supérieur aux 16 pour 100 de volontaires francophones nés au Canada, même s’il s’agit d’une proportion qui est loin d’être négligeable. Étant donné que notre estimation de 75 000 Canadiens français est minimale, cela signifie qu’un volontaire sur six nés au Canada était francophone, et qu’un membre du CEC sur quatre, qu’il soit soldat volontaire ou conscrit, parlait français, alors qu’une personne née au Canada sur trois était francophone. Il s’agit d’une participation remarquable, compte tenu du fait que les Canadiens français avaient de plus grandes difficultés à servir et entretenaient des liens beaucoup plus faibles avec la Grande-Bretagne ou même le continent européen.

 

Soldats volontaires

Proportion

Soldats de conscription

Proportion

Total

Proportion

Francophones

36 000

7,3 %

39 000

31,3 %

75 000

12,1 %

Autres nés au Canada

187 000

37,8 %

53 000

42,5 %

243 728

39,3 %

Tous les autres

272 048

55 %

32 588

26,2 %

300 908

48,6 %

Total

495 048

 

124 588

 

619 636

 

Auteur

Tableau 3 – Nombre total de membres du CEC.

Discussion

Très peu d’historiens ont soutenu que le nombre de francophones enrôlés pouvait dépasser les 35 000 suggérés par Elizabeth Armstrong à la fin des années 1930. Les historiens canadiens Jean Pariseau et Serge Bernier, en 1986, et David Bercuson, en 2008, ont tout simplement repris le nombre lancé au hasard par MmeArmstrong. En 2002, l’éminent historien Jack Granatstein, pour sa part, est allé jusqu’à suggérer ce qui suit : « Après l’entrée en vigueur de la conscription, on estime qu’environ 50 000 francophones, un nombre presque certainement trop généreux qui incluait les volontaires et les conscrits, ont pu servir pendant la guerre15 [TCO]. » Patrice A. Dutil, Ph. D., de l’Université Ryerson, est le seul à avoir avancé ceci dans un article rédigé en 2005 : « Bien que la langue parlée des soldats n’ait pas été consignée par les forces armées, on reconnaît généralement qu’environ 62 000 Canadiens français ont participé à un moment donné à l’effort de guerre. On estime qu’à la fin de la guerre, 35 000 francophones de toutes les régions du Canada portaient l’uniforme16 [TCO]. » Je ne saurais dire comment un tel « consensus » a pu être obtenu, mais il indique qu’au moins certaines personnes étaient prêtes à admettre l’idée que le nombre de francophones recrutés était beaucoup plus important que ce que l’on avait cru.

De façon générale, on ne voulait toutefois pas remettre en question l’idée rassurante selon laquelle les Canadiens français avaient refusé massivement de s’enrôler, et même si l’on acceptait parfois la possibilité d’un recrutement d’un grand nombre de francophones, on précisait que c’était principalement par suite de la conscription en vertu de la Loi du Service Militaire de 1917. L’idée s’est répandue à partir d’une seule estimation vague publiée dans un ouvrage de 1937 et semble avoir été acceptée incontestablement : entre 32 000 et 35 000 soldats francophones ont fait partie du CEC, du RFC et de la marine marchande. Mais d’où provient exactement une telle estimation? Personne ne semble s’être posé la question puisqu’il était si tentant d’accepter aveuglément cette conclusion.

Elizabeth Armstrong ne fournit aucune référence à l’appui de ses données. Elle cite uniquement une lettre du général (à la retraite) Léo Richer Laflèche, alors sous-ministre de la Défense nationale, en réponse à l’une de ses questions : « Il n’existe pas, et il n’y aura jamais, de compte précis, exact et authentique du nombre de Canadiens français qui ont servi dans les Forces canadiennes pendant la Grande Guerre de 1914-1919. » C’est essentiellement ce que le colonel F. Logie Armstrong, directeur des archives, avait répondu au général Louis-Alexandre Panet, adjudant-général de la Milice du Canada, en décembre 1927. Le colonel Armstrong lui avait fait parvenir, le 6 décembre 1927, la répartition des 619 636 membres du CEC selon leur origine nationale et géographique17. Dans une note complémentaire, il précisait que des données officielles ne pouvaient pas être fournies sur l’origine linguistique des recrues, mais qu’il pouvait lui présenter les données officieuses et approximatives suivantes : 260 895 Canadiens anglais et 57 833 Canadiens français.

Trois jours plus tard, le général Laflèche a soumis au chef d’état-major général la répartition qu’il avait reçue du colonel Armstrong, mais la remarque sur l’origine linguistique avait été supprimée18. Le 13 décembre 1927, une lettre a été envoyée en réponse à une demande de renseignements présentée par un certain colonel W. Wood relativement à l’enrôlement des Canadiens français dans le CEC19. Dans cette lettre, les raisons pour lesquelles il est impossible de fournir des données officielles sur l’enrôlement des Canadiens français sont expliquées en profondeur, mais la lettre se termine par cette phrase intéressante: « Assurément, le nombre que vous avez fourni, soit 20 000 Canadiens français enrôlés avant l’entrée en vigueur de la Loi du Service Militaire, est au moins deux fois trop bas, mais comme il est susmentionné, il est impossible de calculer le nombre exact. [TCO]» En mars 1929, le major Clyde R. Scott, directeur adjoint des archives, a répondu à une autre demande de renseignements, soumise cette fois par le bureau du premier ministre, et a fourni une liste de données statistiques sur l’enrôlement dans le CEC. À la dernière page figure la répartition des données sur l’enrôlement des Canadiens anglais et des Canadiens français avant et après l’entrée en vigueur de la Loi du Service Militaire. Il s’agit des mêmes données que le colonel Armstrong avait fournies en décembre 1927. Le major Scott a expliqué que ces données avaient été compilées en 1920 et n’avaient jamais été diffusées, et il a insisté sur l’importance de les garder secrètes. On se demande bien pourquoi il était si important de ne pas divulguer ces données secrètes...

Cependant, dans les faits, le ministère de la Défense nationale, en réponse à toute demande de renseignements subséquente, indiquait qu’il n’existe aucune donnée officielle, ce qui est essentiellement vrai, mais des estimations raisonnables auraient pu être offertes si la note du colonel Armstrong et les données compilées antérieurement avaient été conservées. À ce jour, on ignore comment, en l’absence de données, Elizabeth Armstrong a pu effectuer son estimation de 1937.

Une vague approximation a donc été reprise presque unanimement pendant 80 ans sans jamais être remise sérieusement en question. Comment est-ce possible? Comment se fait-il que de si nombreux historiens, du Canada anglais et du Canada français, aient accepté aussi facilement une estimation non justifiée de la participation des Canadiens français dans la Première Guerre mondiale? Je suppose que ces chiffres ont été rarement contestés parce que la faible participation des Canadiens français à la guerre satisfaisait tous les Canadiens. Au Canada anglais, les promoteurs de la conscription de 1917 étaient trop heureux de pouvoir démontrer que les Canadiens français n’avaient pas fait leur part, laissant ainsi aux seuls Canadiens anglais le rôle de héros dans cette guerre d’affirmation nationale. Pour leur part, les Canadiens français, surtout au Québec, pouvaient ainsi affirmer une fois de plus leur différence avec les Canadiens anglais. En fait, ils soutenaient qu’ils avaient refusé de prendre part au combat parce qu’ils étaient pacifiques et détachés des questions militaires. Cette idée est encore très répandue au Québec, même si les historiens qui s’intéressent à l’époque de la Nouvelle-France pourraient facilement la contester.

William Rider-Rider/MDN/Bibliothèque et Archives Canada, PA-002045

En route vers le front, des membres du 22e Bataillon se reposent au fond d’un cratère creusé par l’explosion d’un obus, en septembre 1917.

Il aurait pourtant été très facile d’éplucher les dossiers d’enrôlement comme je l’ai fait. Un professeur d’université qui s’intéresse à la question aurait pu confier la tâche à une équipe d’étudiants et l’exercice que j’ai accompli seul n’aurait pris que quelques semaines. Toutefois, personne n’a jamais tenté l’expérience. Pendant près d’un siècle, personne n’a pensé à compter les noms français inscrits dans les dossiers d’enrôlement afin d’avoir une meilleure idée de l’ampleur de la participation des Canadiens français dans la Première Guerre mondiale. L’idée selon laquelle les Canadiens français n’avaient pas « fait leur part » plaisait à tous; personne ne semblait vouloir chercher à établir la vérité.

À bien y penser, néanmoins, une participation aussi faible des Canadiens français n’a tout simplement aucun sens. Comme je l’ai démontré dans un article précédent, il est impossible que le bassin d’anglophones dans la province de Québec ait pu fournir plus de 30 000 soldats (parmi les 88 052 personnes enrôlées de la province)20; et le million de francophones de l’extérieur de la province ne pouvaient pas avoir fourni moins de 30 000 soldats au CEC 21. Pour cette raison, le nombre total de recrues francophones devait atteindre au moins 60 00022. L’idée d’une participation aussi faible que 35 000 francophones, pouvant aller jusqu’à 50 000 peut-être, s’est malgré tout très largement répandue. Seul un acte de foi aveugle pouvait rendre une telle chose possible.

Nous savons maintenant qu’au sein du CEC, au lieu de la faible proportion de 5 pour 100 de francophones, nous nous retrouvons plutôt 12 pour 100. Qui plus est, les Canadiens français représentaient près de 24 pour 100 des soldats nés au Canada. Il est injuste de comparer la contribution des Canadiens français à celle de tous les autres soldats puisque plus de 50 pour 100 de ces derniers avaient étaient venus de Grande-Bretagne ou d’ailleurs au cours des 15 années précédentes, souvent depuis quelques années seulement. Le Canada français n’avait pas profité d’une immigration semblable de francophones et la grande majorité des francophones enrôlés étaient nés au Canada et y avaient de très profondes racines23. Les Canadiens français ont par conséquent fourni une part très respectable de l’ensemble des soldats nés au Canada.

Selon le recensement de 1911, les habitants d’origine française représentaient près de 29 pour 100 des 7,2 millions d’habitants du Canada. Le Canada avait toutefois accueilli quelque 1,6 million d’immigrants en 1915, la plupart en provenance de la Grande-Bretagne. La population du pays frôlait maintenant les 9,4 millions d’habitants. La population d’origine française n’avait cependant pas augmenté au même rythme; elle représentait à peine plus de 24 pour 100 de la population totale. Cette proportion se rapproche en fait beaucoup de la proportion des francophones parmi les soldats nés au Canada au sein du CEC. Il s’agit certainement d’une juste part. Si on demandait aux Canadiens français de fournir 24 pour 100 des 619 636 membres du CEC, sans égard au lieu de naissance, il faudrait retrouver quelque 149 000 soldats francophones, soit presque un soldat sur deux nés au Canada, alors que les francophones ne représentaient qu’un tiers de cette population24. Voilà qui dépasserait largement la juste part réclamée des francophones.

 

Population
1911

Immigration
1911-15

Croissance naturelle
1911-15

Total
1915

Canada

7 206 643

1 597 420

540 696

9 344 759

Origine française

2 054 890

10 779

209 486

2 275 155

Proportion de francophones

28,51 %

   

24,35 %

Auteur

Tableau 4 – Évolution de la population du Canada, 1911-1915.

Les historiens français soulignent à juste titre l’importance de la participation des soldats des colonies, même s’ils représentaient à peine 7 pour 100 de tous les soldats mobilisés par l’armée française25. Le CEC était composé de 12 pour 100 de soldats francophones et de 24 pour 100 de soldats nés et ayant grandi au Canada. Il s’agit d’une contribution remarquable de la part de gens qui entretenaient des liens beaucoup plus faibles avec le peuple et la culture de la Grande-Bretagne et qui, pour la plupart, ont dû rapidement apprendre à parler une langue étrangère en même temps que le métier de soldat. Parce qu’il n’y avait qu’une seule unité de combat francophone au front pendant la guerre et ainsi, on oublie trop souvent que les francophones ont servi dans diverses unités provenant de partout au Canada. Moins de 6 000 soldats ont servi au sein du 22e Bataillon (canadiens-français) pendant la guerre, mais si tous les Canadiens français avaient été réunis dans des unités distinctes, comme la majorité des soldats des colonies françaises, ils auraient probablement pu former deux brigades d’infanterie complètes de 1916 à 1918. Un célèbre historien canadien a écrit ceci : « De quelque manière que les apologistes manipulent les données, aujourd’hui ou dans l’avenir, les francophones n’ont pas fait leur «part» pendant la guerre26[TCO] ». Je n’ai pas eu besoin de « manipuler les données » pour déterminer que le nombre de Canadiens français enrôlés dans le CEC était considérablement supérieur au nombre qui a toujours été accepté. Tout historien qui s’intéresse à la question aurait pu faire le même exercice que moi, c’est-à-dire tout simplement compter les noms un à un.

Les historiens font maintenant bien des efforts pour étudier et reconnaître la participation des Autochtones, des immigrants, des Canadiens noirs et des membres d’autres groupes minoritaires dans la Première Guerre mondiale. C’est une très bonne chose, mais ne serait-il pas temps de mettre fin à un siècle d’illusions et de commencer aussi à reconnaître que les Canadiens français ont fait leur part pendant cette guerre? Les Canadiens français ont participé en grand nombre à cette guerre, même si ce n’était pas nécessairement de la même manière que les Canadiens anglais. Il serait bon de ne plus avoir à répondre à cette question sans fondement, mais si souvent soulevée : pourquoi les Canadiens français n’ont-ils pas fait leur part pendant la Première Guerre mondiale?

MDN/Bibliothèque et Archives Canada, PA-003778

Le 22e Bataillon d’infanterie franchit le Rhin, à Bonn, en décembre 1918.

Notes

  1. Jean Martin, Un siècle d’oubli : les Canadiens et la Première Guerre mondiale (1914–2014), Outremont, Athéna Éditions, 2014; Elizabeth H. Armstrong, Le Québec et la crise de la conscription, 1917-1918, Montréal, VLB, 1998.
  2. Jean Martin, « La participation des francophones dans le Corps expéditionnaire canadien (1914-1919) : il faut réviser à la hausse », The Canadian Historical Review, vol. 96, no 3, septembre 2015, p. 405-423.
  3. Jean Martin, « Francophone enlistment in the CEF, 1914-1918: the evidence », Canadian Military History, vol. 25, no 1 (printemps 2016), Waterloo, Canada.
  4. À l’exception des noms de consonance française des soldats en provenance des îles Anglo-Normandes.
  5. Une base de données complète des soldats du CEC est accessible également sur le site Web Ancestry.com, qui détient les droits exclusifs d’utilisation.
  6. Les dossiers se trouvent à l’adresse suivante : http://www.bac-lac.gc.ca/fra/decouvrez/patrimoine-militaire/premiere-guerre-mondiale/dossiers-personnel/Pages/Recherche.aspx.
  7. Par exemple, pour ce qui est de la lettre « P », on compte plus de 9 000 soldats qui portent un nom qui commence par « Pa », et plus de 3 000 soldats qui portent un nom qui commence par « Par ». Il a donc fallu effectuer des recherches en utilisant jusqu’à quatre lettres initiales, en essayant toutes les lettres de l’alphabet.
  8. Par exemple, il serait possible de confirmer qu’une personne est réellement francophone à l’aide de son lieu de naissance ou du prénom de son plus proche parent (il n’y a aucun doute que des personnes nommées Télesphore, Adéodat ou Étiennette, par exemple, sont francophones).
  9. Voici quelques exemples de Canadiens français qui ont servi sous un autre nom : Ernest Joseph et Louis Leblanc ont tous les deux servi sous le nom White; Georges Legault était connu sous le nom George Hall; George Mainville a vu son nom devenir Mayville; Edmond Maillet est devenu Edmund Myers; Sylvestre Mercier était connu sous le nom Samuel Stanley Mercer. Il ne s’agit que de quelques exemples. Combien d’autres n’ont jamais été révélés?
  10. Ce nombre a été fourni dans les années 1920 par le directeur des archives au MDN et reproduit dans l’histoire officielle publiée dans l’ouvrage de G.W.L. Nicholson (Histoire officielle de la participation de l’Armée canadienne à la Première Guerre mondiale. Le Corps expéditionnaire canadien, 1914-1919, Ottawa, Ministère de la Défense nationale, 1963).
  11. Voir J. Martin, 2016.
  12. Henri Bourassa, Canadian Nationalism and the War, Montréal, Le Devoir, 1916; cité dans Pariseau et Bernier, p. 86-87.
  13. Ces dossiers sont aussi disponibles sur le site Web de BAC à l’adresse suivante : http://www.bac-lac.gc.ca/fra/decouvrez/patrimoine-militaire/premiere-guerre-mondiale/dossiers-personnel/Pages/Recherche.aspx.
  14. BAC, « CEF Statistics - Enlistment and Medical Unfitness 1919-1938 », RG24-C-1-a. volume 1163, dossier HQ-64-1-24, Lettre de 1929 au bureau du premier ministre.
  15. Jean Pariseau et Serge Bernier, Les Canadiens français et le bilinguisme dans les Forces canadiennes. Tome I, 1763-1969 : le spectre d’une armée bicéphale, Ottawa, Ministère des Approvisionnements et Services Canada, 1987, p. 88. David J. Bercuson, The Fighting Canadians, Toronto, Harper Collins Publishers Ltd, 2008, p. 161. Jack L. Granatstein, Canada’s Army. Waging War and Keeping the Peace, Toronto, University of Toronto Press, 2002, p. 75.
  16. Patrice A. Dutil, « Against Isolationism: Napoléon Belcourt, French Canada, and “La Grande Guerre” », extrait de David Mackenzie (éd.), Canada and the First World War. Essays in Honour of Robert Craig Brown, Toronto, University of Toronto Press, 2005, p. 115.
  17. BAC, « CEF Statistics - Enlistment and Medical Unfitness 1919-1938 », RG24-C-1-a. volume 1163, dossier HQ-64-1-24. Lettre de F. Logie Armstrong, directeur des archives.
  18. BAC, « CEF Statistics - Enlistment and Medical Unfitness 1919-1938 », RG24-C-1-a. volume 1163, dossier HQ-64-1-24. Lettre de Léo Richer Laflèche, adjudant général de la Milice.
  19. Il pourrait s’agir du même colonel William Wood, qui a fait partie d’une mission spéciale envoyée en Europe par l’archiviste national du Canada en 1918-1919 afin de rassembler des informations sur l’effort de guerre. William Wood a longtemps vécu à Québec. En 1927, il était l’archiviste adjoint de la province de Québec et a été pendant de nombreuses années un membre bien connu de la Société littéraire et historique de Québec. Voir Robert McIntosh, « The Great War, Archives, and Modern Memory », dans Archivaria, Journal of the Association of Canadian Archivists, no 46 (automne 1998).
  20. Voir J. Martin, CHR, 2015.
  21. Environ un demi-million de Canadiens français vivaient dans d’autres provinces et plus d’un demi-million de Canadiens français vivaient aussi aux États-Unis.
  22. Au total, 88 052 hommes se sont enrôlés dans la province de Québec. Si seulement 30 000 d’entre eux étaient anglophones, cela signifie que plus de 58 000 ne l’étaient pas. Même en supposant que de 15 000 à 20 000 personnes de l’extérieur de la province se sont enrôlées au Québec, il reste entre 30 000 et 35 000 soldats francophones du Québec.
  23. En 1914, l’immigration de francophones représentait moins d’un pour cent de l’immigration totale. Selon les données statistiques du MDN, seulement 1 319 membres du CEC, soit moins de deux pour cent des francophones, étaient nés en France.
  24. Au total, 318 728 membres du CEC étaient nés au Canada; 24 % des 619 636 soldats se traduit par 148 713 Canadiens français et 170 015 autres.
  25. Des huit millions de soldats mobilisés pour servir pendant la guerre, environ 565 000 provenaient des colonies.
  26. J. L. Granatstein, p. 75.