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Revue militaire canadienne [Vol. 23, No.4, automne 2023] Commentaire

Caporale Jaclyn Buell, Forces armées canadiennes

Des membres de la police militaire du Togo s’entraînent à bord du NCSM MONCTON au large des côtes du Ghana, au cours de l’exercice OBANGAME EXPRESS, dans le cadre de l’opération PROJECTION, le 12 mars 2022.

Le lieutenant-colonel James Boddy est commandant de la Force opérationnelle interarmées – Ukraine dans le cadre de l’opération UNIFIER et commandant du 2e Régiment du génie de combat. Il occupait auparavant des postes au Commandement des opérations interarmées du Canada, notamment J3 adjoint pour la Force expéditionnaire, J3 pour le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Indo-Pacifique et coordonnateur du renforcement des capacités. Dans la foulée, il joue un rôle important dans le soutien des missions internationales de renforcement des capacités, dans la rationalisation des processus de financement du renforcement des capacités du Commandement des opérations interarmées du Canada et dans le soutien des efforts du Ministère visant à accroître les outils disponibles pour permettre aux Forces armées canadiennes de mener à bien leurs activités de renforcement des capacités.

Introduction

Le gouvernement du Canada, lorsqu’il a défini sa vision stratégique de la défense du pays dans Protection, Sécurité, Engagement : La politique de défense du Canada, a établi des liens étroits entre les activités de défense du Canada et la sécurité et la prospérité du paysNote de bas de page 1. Ces liens ont été resserrés par l’attribution de missions principales au ministère de la Défense nationale (MDN) et aux Forces armées canadiennes (FAC). Parmi ces missions figurent la défense de l’Amérique du Nord, le commandement et la contribution de forces à l’Organisation des Nations Unies et à l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) ainsi que la participation à la sécurité nationale au moyen du renforcement des capacités et des institutions de défense (ci-après désigné par l’acronyme RCIDNote de bas de page 2). Ces missions, bien que les exigences associées à chacune d’entre elles diffèrent, mobilisent toutes du temps et des ressources qui sont limitées, ce qui restreint la capacité du MDN et des FAC de mener d’autres activités. Il est donc nécessaire d’examiner, de hiérarchiser et d’équilibrer les activités de RCID réalisées par le MDN et les FAC pour faire en sorte qu’elles répondent au mieux aux intérêts stratégiques du Canada en matière de sécurité.

Dans le présent article, je recommande de mettre en place un comité directeur au sein du Cadre de gouvernance de la Défense (CGD) pour diriger les activités de RCID menées par le MDN et les FAC, étant donné ce qui suit :

  1. le grand nombre de parties prenantes, de ressources et de risques inhérents à ces activités;
  2. la coordination limitée entre les parties prenantes;
  3. l’absence de priorités bien définies qui peut empêcher le MDN et les FAC de tirer parti d’opportunités susceptibles de faire avancer les intérêts stratégiques du Canada en matière de sécuritéNote de bas de page 3.

Dans le but de soutenir ma recommandation, je définirai d’abord le RCID et j’expliquerai la valeur stratégique qu’il peut procurer au Canada, puis je présenterai quelques-uns des enjeux qui s’y rattachent. Ensuite, je centrerai mon analyse sur la gouvernance et son rôle dans l’exercice d’un leadership partagé par les cadres supérieurs lorsqu’ils travaillent ensemble à l’atteinte des objectifs organisationnels. La gouvernance permet ainsi de soutenir les efforts déployés par le MDN et les FAC pour hiérarchiser et coordonner les activités de RCID et les harmoniser avec leurs autres efforts d’envergure. J’examinerai aussi les diverses manières dont le MDN et les FAC pourraient structurer leur gouvernance du RCID. Enfin, je passerai en revue certaines des répercussions négatives qui pourraient résulter de l’absence de gouvernance des activités ou de la mise en place d’une gouvernance désordonnée, en mettant à profit les initiatives existantes du CGD.

Renforcement des capacités et des institutions de défense

Le renforcement des capacités de défense concerne « les activités entreprises par les FAC pour contribuer au développement des capacités opérationnelles des forces de défense et de sécurité des partenaires approuvés de façon à accroître l’efficacité et la légitimité de ces forcesNote de bas de page 4 » [TCO]. Il va de pair avec le renforcement des institutions de défense, lequel est « entrepris par le MDN pour aider au développement des institutions ministérielles de défense et de sécurité des pays partenaires approuvés afin de renforcer la légitimité et l’efficacité de ces institutionsNote de bas de page 5 » [TCO]. Le RCID soutient les intérêts stratégiques du Canada en matière de sécurité en augmentant la capacité des pays partenaires de contribuer à la stabilité et à l’ordre international fondé sur des règles à l’intérieur de leur territoire, dans leurs régions et potentiellement à l’échelle mondiale. Il permet également au Canada de resserrer ses liens avec ces pays, ce qui lui donne l’occasion de promouvoir des intérêts autres que la sécurité, tels que la signature de pactes commerciaux et la promotion de l’initiative pour les femmes, la paix et la sécurité du gouvernement du Canada.

Le RCID englobe des activités tactiques et opérationnelles qui engendrent des effets au niveau opérationnel et stratégique. Ces effets contribuent aux efforts généraux déployés par le MDN et les FAC pour protéger les intérêts stratégiques du Canada en matière de sécurité. À l’heure actuelle, le MDN et les FAC s’emploient notamment à fournir une formation complémentaire de niveau tactique et un mentorat aux membres des forces armées ukrainiennes, jordaniennes et libanaises. Leurs efforts consistent également à participer à des projets dirigés par l’OTAN et les États-Unis en vue d’accroître la viabilité des forces de sécurité de l’Autorité palestinienne et des forces armées irakiennes en fournissant des conseils au niveau ministériel et institutionnel.

Nombreuses organisations du MDN et des FAC participent au RCID, y compris le Commandement des opérations interarmées du Canada (COIC), le Sous-ministre adjoint (Politiques) [SMA(Pol)] et l’Académie canadienne de la DéfenseNote de bas de page 6,Note de bas de page 7,Note de bas de page 8,Note de bas de page 9. Elles mènent souvent des activités de RCID dans les mêmes pays et régions, sans savoir vraiment ce que font les autres. De ce fait, le MDN et les FAC sont moins aptes à créer des synergies qui permettraient d’accroître les effets stratégiques et opérationnels des efforts déployés. De plus, la situation affaiblit la capacité du MDN et des FAC de faire valoir leurs contributions auprès des Canadiens et Canadiennes et des partenaires internationaux du Canada.

Bien que le gouvernement du Canada puisse demander au MDN et aux FAC de mener des activités de RCID pour une multitude de raisons, ces activités devraient servir les intérêts du Canada tout en répondant aux besoins définis par les pays partenairesNote de bas de page 10. Il peut s’agir de combler des lacunes en matière de formation et de capacités ou d’aider les organisations de défense et de sécurité des pays partenaires à développer les connaissances, les structures, les politiques, les systèmes de formation militaire et les cadres juridiques dont elles ont besoin pour s’acquitter de leur mandat de manière efficace et durable.

Les besoins des pays partenaires devraient évoluer au fur et à mesure que ces pays combleront les lacunes qu’ils ont recensées. Le gouvernement du Canada doit donc être prêt à adapter ses efforts en matière de RCID afin que ceux-ci demeurent pertinents, s’il estime qu’il est dans l’intérêt du Canada de continuer à fournir ce soutien. Si le gouvernement du Canada décide de continuer à soutenir le développement des pays partenaires, il devra faire évoluer les efforts du MDN et des FAC en fonction de l’importance relative des pays en question pour le Canada et en fonction de la soutenabilité de ces efforts. Le gouvernement du Canada ainsi que le MDN et les FAC seront ainsi mieux à même de valider les « finalités, modalités et moyens » nécessaires au maintien des liens qui unissent le Canada et ses partenaires en matière de RCID. En outre, cela permettra de déterminer s’il faut mettre à contribution d’autres organisations, par exemple d’autres ministères, des organisations non gouvernementales ou des entités du secteur privé.

Une telle situation s’est produite lors de la mission du Canada visant à soutenir la réforme du secteur de la sécurité palestinien et la coopération israélo-palestinienne en matière de défense (opération PROTEUS) en 2022. Concrètement, la force opérationnelle du MDN et des FAC à Jérusalem a été renforcée par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC). La participation de l’ASFC à l’opération PROTEUS s’est révélée précieuse, mais l’obtention d’un tel soutien avait été laborieuse pour le MDN et les FAC. Bien que l’évolution de l’opération PROTEUS montre que d’autres ministères peuvent prendre part au RCID, et qu’ils le font, une orientation gouvernementale claire faciliterait une participation interministérielle, dans la mesure où les autres ministères doivent détourner des ressources de leur mandat principal pour soutenir le RCID.

Quel que soit le niveau d’intérêt et de participation des ministères au RCID, il est essentiel que les pouvoirs et les orientations gouvernementales soient bien précisés. Ceux-ci sont transmis par différents moyens, notamment les mémoires au Cabinet, les présentations au Conseil du Trésor et les directives ministérielles. Dans ces documents figurent les objectifs stratégiques à atteindre, à partir desquels les ministères déterminent les priorités gouvernementales. Dans certains cas, ces documents permettent également de limiter les modalités d’exécution des mandats des ministères grâce à des conditions telles des restrictions de personnel ou de financement. Les ministères et les organismes jouissent d’une grande latitude à cet égard, car ils participent souvent à l’élaboration de ces documents et sont généralement chargés de déterminer les moyens pour atteindre les objectifs stratégiques assignés. Selon le cadre stratégique des « finalités, modalités et moyens » établi par Arthur Lykke, le gouvernement détermine les « finalités », tandis que les cadres supérieurs des ministères et organismes définissent les « modalités et moyens » – sous réserve des contraintes imposées par le gouvernement.

Le choix des « modalités et moyens » est souvent compliqué par la décentralisation de l’élaboration des politiques et de la planification des missions au sein du MDN et des FAC, de même que par le nombre élevé d’organisations participantes. Chaque organisation participante est susceptible d’avoir des opinions et des préférences quant aux forces et aux démarches utilisées pour atteindre les objectifs définis par le gouvernement. Les divergences entre les parties prenantes deviennent évidentes quand des décisions doivent être prises pour engager des capacités de faible densité et de grande valeur dans des activités de RCID, par exemple des officiers supérieurs et des spécialistes.

Même s’il est utile, le RCID nécessite souvent un nombre disproportionné de dirigeants et de spécialistes par rapport à d’autres efforts de défense opérationnelle. Cela tient aux connaissances et à l’expérience requises pour mener à bien le RCID. Or, les besoins en personnel – dirigeants et spécialistes – sont encore plus importants dans le cadre du renforcement des institutions de défense puisque les niveaux requis d’expérience et de connaissances sont encore plus élevés. Les initiatives visant à recruter un grand nombre de personnes compétentes pour le RCID se heurtent souvent à une résistance considérable de la part d’autres composantes du MDN et des FAC, qui doivent employer ces personnes pour accomplir d’autres tâches importantes. Une orientation et des priorités bien définies aideraient à résoudre le problème de la dotation en personnel dans la mesure où elles confirmeraient la capacité du MDN et des FAC d’entreprendre le RCID.

Cplc J.W.S Houck, Affaires publiques – FOI-I

L’Équipe canadienne d’aide à l’instruction – Liban aide les membres des forces armées libanaises à faire l’inventaire du matériel reçu du Canada, le 9 septembre 2020.

Les organisations du MDN et des FAC doivent s’assurer que les activités de RCID sont conçues et exécutées en temps opportun et qu’elles soutiennent au mieux la réalisation des intérêts stratégiques du Canada en matière de sécurité. Des ressources et des efforts peuvent être inutilement gaspillés si ces activités ne sont pas concertées et harmonisées avec d’autres initiatives de défense. Le MDN et les FAC ne peuvent pas consacrer au RCID, ou à d’autres activités essentielles comme la reconstitution, les ressources et efforts qu’ils ont perdus en raison d’une mauvaise gestion qui aurait pu être évitée. Bien que le chef d’état-major de la défense (CEMD) et le sous-ministre (SM) fixent les priorités générales du MDN et des FAC et qu’ils aient collectivement autorité sur les organisations qui leur sont subordonnées (organisations de niveau un), l’établissement des priorités, l’affectation des ressources et le déroulement du RCID ne devraient généralement pas se situer à leur niveau. En effet, si tel était le cas, le CEMD et le SM ne pourraient pas s’acquitter de leurs responsabilités globales en matière de leadership au sein du Ministère. La réflexion sur ces sujets peut et doit plutôt avoir lieu aux échelons inférieurs du MDN et des FAC, car de nombreux dirigeants du Ministère sont autorisés à prendre les décisions éventuelles qui s’imposeraient au nom de leur organisation. Un comité directeur au sein du CGD permettrait de renforcer la capacité de ces dirigeants à définir collectivement la hiérarchisation, la mobilisation, l’harmonisation et la coordination des efforts du MDN et des FAC en ce qui concerne le RCID. Il permettrait également aux dirigeants concernés de bien comprendre les responsabilités de leur organisation dans le cadre des activités de RCID.

Gouvernance

Le gouvernement du Canada définit la gouvernance comme étant l’« ensemble des structures et des processus de gestion qui favorisent l’élaboration, la mise en œuvre et l’application de politiques, de programmes et d’activitésNote de bas de page 11 ». Les titulaires de doctorat Monique Cikaliuk, Ljiljana Eraković, Chris Noonan et Susan Watson de l’Université d’Auckland et le titulaire de doctorat Brad Jackson de l’Université de Waikato soulignent ceci : « Concrètement, la gouvernance organisationnelle fournit une structure pour les interactions entre les parties prenantes de l’organisation, tandis que le leadership fournit l’énergie et la détermination nécessaires pour assurer une gouvernance organisationnelle efficace en vue d’atteindre les objectifs de l’organisationNote de bas de page 12. » [TCO] Cikaliuk, Eraković, Noonan et Watson, lorsqu’ils ont élargi le cadre qui lie la gouvernance organisationnelle et le leadership, ont observé que les tribunes de gouvernance permettent également d’exercer un leadership partagé au sein des organisations, et que les membres de ces comités « misent sur leurs compétences, leurs connaissances et leur expertise pour exercer un leadership individuel entre eux afin d’atteindre des buts et des objectifs partagésNote de bas de page 13 » [TCO].

Le MDN et les FAC exercent leurs fonctions de gouvernance par l’intermédiaire du CGD, qui se compose de nombreux comités. Ces comités soutiennent la prise de décision des cadres supérieurs, documentent l’intention stratégique et harmonisent les efforts fonctionnels, tels que l’élaboration des politiquesNote de bas de page 14. Un comité directeur chargé du RCID au sein du CGD renforcerait la capacité du MDN et des FAC de diriger et d’orienter leurs efforts en matière de RCID en offrant aux cadres supérieurs du Ministère une tribune pour examiner la valeur stratégique relative des mesures déployées et pour établir des priorités afin d’orienter les travaux futurs du Ministère à l’égard des activités de RCID. Le fait de tenir compte du RCID à ce niveau aiderait le MDN et les FAC à aligner les ressources affectées à leurs efforts en matière de RCID sur la valeur relative qu’ils présentent pour le gouvernement du Canada, en plus de favoriser l’élaboration et le renouvellement des mandats liés au RCID dans une perspective mondiale plutôt que régionale. La démarche en question permettrait de mieux garantir que les ressources du MDN, des FAC et du gouvernement du Canada sont utilisées au mieux pour promouvoir les intérêts stratégiques du Canada en matière de sécurité. Il s’agit notamment de réorienter éventuellement les ressources vers de nouvelles possibilités une fois qu’elles sont autorisées par le gouvernement du Canada.

Dans sa publication Capacity Building: Delivering Non-Commissioned Officer Mentoring and Training, le COIC recommande de fonder la structure et le mandat du comité directeur du RCID sur le modèle du comité directeur pour l’UkraineNote de bas de page 15. Avant l’invasion illégale de l’Ukraine par la Russie, ce comité se réunissait mensuellement pour prendre en compte et fournir des orientations sur des enjeux clés tels que l’organisation de la mission de RCID menée par le Canada en Ukraine (opération UNIFIER), les pouvoirs nécessaires à la réalisation de son mandat et le renouvellement de son mémoire au Cabinet. Il était coprésidé par le directeur d’état-major de l’État-major interarmées stratégique, le commandant adjoint du COIC et le SMA(Pol) [ou le directeur général – politique de sécurité internationale au nom du SMA(Pol)], et comprenait des représentants de haut niveau de l’ensemble du MDN et des FACNote de bas de page 16. La mise en place de ce comité a permis d’harmoniser le soutien apporté par le MDN et les FAC à l’Ukraine lorsque le COIC et le SMA(Pol) se sont vus confier la responsabilité de différentes composantes de la mission.

Si le comité directeur pour l’Ukraine a contribué à harmoniser et à coordonner les actions du MDN et des FAC en Ukraine, les activités de RCID sont peut-être trop nombreuses et trop vastes pour un seul comité. Le Conseil de l’infrastructure et de l’environnement (CIE) est un autre modèle qui pourrait mieux répondre aux besoins de gouvernance en la matière. Il s’agit d’un conseil de niveau stratégique qui examine et hiérarchise les besoins du MDN et des FAC en matière d’infrastructure et d’environnementNote de bas de page 17. Il bénéficie de l’appui de plusieurs sous-comités qui se concentrent sur différents aspects du soutien à l’infrastructure et à l’environnement et qui formulent des recommandations à soumettre à l’examen et à la ratification du CIENote de bas de page 18. L’adoption d’un modèle similaire pour la gouvernance en matière de RCID permettrait aux cadres supérieurs du MDN et des FAC de se concentrer sur l’orientation et la gestion des questions les plus importantes, en tirant parti des analyses et des recommandations des sous-comités.

L’un des principaux avantages que présente l’adoption d’une telle structure est que le MDN et les FAC pourraient mieux comprendre les répercussions des options qu’ils élaborent et qu’ils recommandent au gouvernement du Canada pour les futurs mandats de RCID. Ainsi, il serait possible de corriger le manque de cohérence entre les mandats, qui résulte du fait que la décentralisation peut entraîner des options isolées qui ne tiennent pas compte des ressources provisoires ou de la valeur stratégique relative d’autres activités du MDN et des FAC, y compris celles qui sont en cours d’élaboration. La mise en place d’un comité directeur chargé du RCID ne permettrait pas de résoudre entièrement ce problème, mais le comité offrirait une tribune centralisée pour hiérarchiser, aligner et coordonner les efforts déployés en matière de RCID. En outre, les cadres supérieurs du MDN et des FAC seraient mieux à même de reconnaître les possibilités de RCID à forte valeur ajoutée. Le fait que les cadres supérieurs du MDN et des FAC reconnaissent rapidement ces possibilités devrait permettre de réduire le temps nécessaire pour présenter celles-ci au gouvernement du Canada afin qu’il les étudie et les approuve.

Un tel comité n’améliorerait pas nécessairement la participation interministérielle au RCID, mais elle aiderait le MDN et les FAC à comprendre dans quels domaines le soutien apporté pourrait accroître la valeur de leurs activités. Le MDN et les FAC seraient ainsi mieux à même de démontrer comment la participation des autres ministères au RCID pourrait contribuer aux efforts visant à protéger les intérêts stratégiques du Canada en matière de sécurité. En retour, le MDN et les FAC pourraient ainsi s’assurer une plus grande participation et un plus grand soutien de la part des autres ministères lorsque des options liées au RCID sont formulées et recommandées au gouvernement du Canada en vue de futurs mandats.

Bien que la mise en place d’un comité directeur interministériel chargé du RCID dépasse le cadre du présent article, il conviendrait d’envisager cette possibilité. Un tel comité permettrait aux ministères qui participent au RCID de hiérarchiser, de coordonner et d’harmoniser leurs activités. Le gouvernement du Canada serait ainsi en meilleure posture pour déterminer les synergies qui permettent de protéger les intérêts stratégiques du Canada, qu’ils soient ou non liés à la sécurité. Les autres ministères comprendraient également plus facilement comment ils pourraient augmenter leurs efforts et détermineraient les domaines dans lesquels le RCID devrait contribuer à la réalisation de leurs mandats ou dans lesquels leurs efforts pourraient être déployés plus efficacement par d’autres moyens, tels que la passation de marchés.

Avr Melissa Gloude, technicienne en imagerie des Forces armées canadiennes

L’équipe de formation du génie de la rotation 10 de l’opération UNIFIER donne des conseils à la Garde nationale de l’Ukraine (NGU) dans les champs de tir de démolition, dans le cadre de l’entraînement de niveau 1 pour les sapeurs, le 3 novembre 2020, à Zolochiv, en Ukraine.

Autres pistes de solution

Compte tenu des nombreux comités qui existent déjà au sein du CGD, il est possible de conclure que le MDN et les FAC pourraient s’orienter en confiant des responsabilités additionnelles à leurs comités existants. Certes, cela permettrait de mieux cibler certaines actions du MDN et des FAC et de ne pas avoir à organiser d’autres activités de gouvernance au sein du CGD. Par contre, la supervision et la direction du RCID selon une approche aussi décentralisée continueraient de limiter la cohérence globale de la gouvernance du RCID au MDN et dans les FAC. En effet, les travaux, les idées et les connaissances de chaque comité ne contribueraient pas nécessairement à la réflexion et aux décisions des autres comités. Le risque que les comités créent des dissonances inutiles et diluent l’effet stratégique que le MDN et les FAC cherchent à créer au moyen du RCID s’en trouve accru. Le risque que le Ministère cherche à obtenir des autorisations qui ne correspondent pas aux effets stratégiques souhaités est également accru, ce qui peut inciter le MDN et les FAC à affecter du personnel et des ressources inutiles à des activités qui ont une priorité moindre, tout en ne consacrant pas suffisamment de ressources à des initiatives qui ont davantage de portée.

Étant donné que les efforts du MDN et des FAC en matière de RCID répondent actuellement aux besoins du gouvernement, il est possible d’avancer un argument distinct selon lequel ils ne nécessitent pas de gouvernance supplémentaire. La principale différence entre cet argument et le précédent est que les responsabilités de gouvernance du Ministère en matière de RCID resteraient très fragmentées, les parties prenantes exécutant leurs activités avec des priorités floues et un minimum d’alignement et de connaissance des autres efforts. Alors que le Ministère réalise actuellement le RCID de cette manière, le fait de ne pas mettre en place une gouvernance en matière de RCID continuera d’entraver la capacité du MDN et des FAC de mener leurs activités plus efficacement. Il s’agit d’un gaspillage qui réduit la capacité du Ministère de maximiser l’effet stratégique du RCID, compte tenu des ressources limitées du MDN et des FAC. En procédant de la sorte, le Ministère réduit également sa capacité de soutenir d’autres efforts grâce aux synergies qu’il pourrait créer et aux ressources qu’il pourrait libérer en menant plus efficacement les activités de RCID.

Conclusion

Bien que le MDN et les FAC continuent de mener des activités de RCID dans de nombreux pays, et ce, en dépit des problèmes de hiérarchisation, de coordination et de ressources mentionnés précédemment, il est recommandé que le Ministère mette en place un comité directeur chargé de diriger et d’orienter les efforts. En effet, la mise en place d’un comité permettrait au MDN et aux FAC de mieux comprendre la valeur stratégique et opérationnelle relative de ces activités. Le MDN et les FAC seraient ainsi mieux à même d’expliquer la valeur stratégique et opérationnelle relative que les efforts apporteraient au gouvernement du Canada et à d’autres ministères, en particulier lorsque de nouvelles possibilités sont repérées. Le comité permettrait également d’examiner les défis actuels en matière de ressources, ce qui aiderait les cadres supérieurs du gouvernement à concentrer les ressources limitées du MDN et des FAC sur les activités qui offrent le meilleur retour sur investissement au gouvernement du Canada et à la population canadienne.

Même si le gouvernement du Canada choisit de ne pas adopter un point de vue réaliste lorsqu’il prendra des décisions en matière de RCID, un comité directeur sur le sujet permettrait au MDN et aux FAC de déployer plus efficacement leurs efforts en la matière grâce à la coordination et à l’établissement de priorités accrues offertes par ce comité. Les ressources et les efforts ainsi libérés pourraient être consacrés à l’amélioration ou au développement les activités de RCID du MDN et des FAC ou à d’autres activités essentielles. Il existe de nombreuses possibilités de diriger et d’orienter les activités de RCID du MDN et des FAC, mais en améliorant l’efficacité des efforts déployés, le Canada sera mieux à même de répondre aux besoins constants de ses pays partenaires. La capacité des partenaires de contribuer de manière plus significative à la stabilité mondiale et à l’ordre international fondé sur des règles est directement liée à la sécurité et à la prospérité du Canada, car elle favorise un monde à la fois plus sûr et plus prévisible.

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