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Critiques de livres

Hell’s Corner: An Illustrated History Of Canada’s Great War,
1914-1918

par Jack Granatstein
Douglas & McIntyre, Toronto, 198 pages, 50 $

Compte rendu de John Marteinson

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Couverture de livreL’historien militaire canadien le plus prolifique a une fois de plus rédigé un superbe ouvrage que tous ceux qui s’intéressent aux exploits guerriers des troupes canadiennes voudront se procurer. Le nouveau livre de Jack Granatstein raconte l’histoire palpitante des Canadiens lors de la Première Guerre mondiale. Il porte surtout sur le célèbre Corps d’armée canadien et sur la manière dont ce qui n’était qu’un groupe disparate d’amateurs en 1914 est devenu une « troupe de choc » du Corps expéditionnaire britannique avant la fin de la guerre, en 1918. Ce livre retrace également les exploits audacieux des pilotes canadiens du Royal Flying Corps britannique et la contribution à l’effort de guerre qu’ont apportée les Canadiens demeurés au pays. Conformément à ce qu’on attend d’un auteur de ce calibre, le récit est adroit et captivant. Il est agrémenté d’une sélection judicieuse de photos évocatrices, dont beaucoup proviennent des archives du Musée canadien de la guerre et étaient inédites. De surcroît, plus de 25 tableaux de l’importante collection du Musée canadien de la guerre sont reproduits en couleur ainsi que des affiches et d’autres documents de l’époque.

Certains pourraient se dire : pourquoi publier un autre livre sur la Première Guerre mondiale? L’une des meilleures raisons est sans doute le fait que tous les livres illustrés de haute tenue portant sur « l’histoire populaire » des efforts de guerre du Canada lors de la Grande Guerre sont depuis longtemps épuisés et pratiquement introuvables, même sur le marché du livre d’occasion. Ainsi, le livre de Granatstein et Morton, Marching to Armageddon, traitait sensiblement du même sujet, mais il a été publié en 1989. De plus, dans les dernières années, il y a eu un regain d’intérêt pour cette guerre, peut-être grâce aux excellents ouvrages des historiens britanniques, John Keegan et Hew Strachan, tous deux intitulés The First World War, ainsi qu’au livre primé de Margaret MacMillan, Paris 1919. Le livre de Jack Granatstein, Canada’s Army, couvre aussi en partie cette période mais de façon moins approfondie et sans les nombreuses illustrations. C’est pourquoi Hell’s Corner arrive à point nommé pour raconter de nouveau cette fière histoire d’audace, d’abnégation et de sacrifice à une autre génération de Canadiens, une génération qui est tellement habituée aux images que celles-ci font partie intégrante de sa vie.

La présentation de l’ouvrage est traditionnelle, et les chapitres portent tour à tour sur la mobilisation et l’entraînement suivi par le Corps expéditionnaire canadien; sur le baptême du feu et l’exposition de la Première Division aux atrocités de la guerre de tranchées lors de la deuxième bataille d’Ypres ainsi qu’à Festubert et à Givenchy en 1915; sur les conditions extrêmement difficiles de la vie quotidienne dans les tranchées humides et froides et sur les Canadiens ayant servi dans l’unité embryonnaire du Royal Flying Corps (l’auteur s’attarde assez longuement sur cette unité); sur l’augmentation de l’effectif du Corps d’armée canadien lorsque les Deuxième, Troisième et Quatrième divisions sont venues grossir ses rangs et faire leurs premières armes aux batailles de Saint-Éloi et du mont Sorrel ainsi que sur les signes précurseurs de l’amélioration des aptitudes au combat des Canadiens lors des coûteuses batailles d’usure de la Somme en 1916.

Le chapitre cinq revient sur le front intérieur et décrit la croissance des industries de guerre, l’embauche d’un très grand nombre de femmes et les répercussions sur le pays du nombre énorme de victimes, qui ont notamment entraîné le recours à la conscription. Le chapitre suivant traite des combats, en 1917, de la crête de Vimy, de la côte 70 et de Passchendaele. C’est au cours de ces combats que le Corps d’armée canadien a montré à quel point les innovations tactiques et technologiques introduites au cours des cinq mois qui ont suivi la bataille de la Somme lui avaient permis de devenir professionnel. Les descriptions des batailles sont ici beaucoup plus détaillées que dans les premiers chapitres et mettent en vedette le leadership exemplaire des généraux Byng et Currie durant cette période. Un autre chapitre traite des « Cent jours », au cours desquels le Corps d’armée canadien, devenu la «troupe de choc » du Corps expéditionnaire britannique, a joué le rôle principal lors des offensives de 1918 qui ont mené à la capitulation des Allemands, le 11 novembre. Le chapitre final décrit surtout le rapatriement du Corps d’armée canadien, le meilleur que le Canada ait jamais connu, et sa dissolution rapide en 1919. La seule annexe du livre montre les insignes distinctifs que les unités du Corps expéditionnaire canadien portaient sur l’épaule. Ces illustrations sont tirées de l’histoire officielle de ce corps, rédigée par le colonel Nicholson.

Hell’s Corner décrit avec une rigueur non dénuée de passion les premiers échecs et les nobles triomphes de cette grande armée que le Canada a levée au service de la « Grande Guerre pour la civilisation », comme la dénomme la Médaille de la Victoire remise à la fin de la guerre. Le seul grand défaut de ce livre, c’est le manque de cartes. L’histoire militaire, surtout lorsqu’elle décrit des batailles, a besoin de cartes de bonne qualité pour que le lecteur puisse suivre le déroulement du combat. Cet ouvrage n’en comporte que quatre : la deuxième bataille d’Ypres, la crête de Vimy, Amiens et le canal du Nord, qui sont d’ailleurs d’excellentes reproductions des grandes cartes dépliables figurant dans l’histoire officielle de Nicholson. Cependant, aucune carte ne montre les batailles canadiennes importantes comme celles de Saint-Éloi, du mont Sorrel et de la Somme en 1916, la côte 70, le massacre à Passchendaele en 1917 ou même l’offensive musclée qui a brisé la charnière de la ligne Hindenburg à l’est d’Arras en 1918. Un autre défaut presque aussi grave est que ce livre ne fournit pas de carte générale du front occidental pour montrer les endroits où se sont déroulées toutes les batailles importantes qu’a livrées le Corps d’armée canadien.

Malgré ces réserves, je recommande vivement la lecture de Hell’s Corner.

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John Marteinson, ancien rédacteur en chef de la Revue militaire canadienne, enseigne l’histoire militaire et la politique de la défense du Canada au Collège militaire royal du Canada.