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Le Canada et le monde

Le lac Moraine

Parc national de Banff/© Parcs Canada/W. Lynch/1991

Le lac Moraine et le chaînon Bow des Rocheuses.

Sutherland au 21e siÈcle : Les invariants dans le programme d’Élaboration des politiques du Canada depuis les ÉvÉnements du 11 septembre

par Dwayne Lovegrove

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Nous devrions réfléchir au fait que c’est largement grâce à notre géographie et à nos relations très étroites avec les États-Unis que notre pays de dix-huit millions d’habitants a pu acquérir autant de richesse, de pouvoir et d’influence constructive1.

~ Dr Robert J. Sutherland, « Canada’s Long Term Strategic Situation ».

Introduction

La citation précédente est tirée d’un article publié en 1962 par le Dr Bob Sutherland du Conseil de recherches pour la défense du Canada (CRD), article intitulé « Canada’s Long Term Strategic Situation » et considéré comme « …un classique, en quelque sorte, pour les connaisseurs des études canadiennes sur la défense2». Sutherland considérait la géographie, l’économie et les grands intérêts nationaux comme les trois invariants de la politique étrangère canadienne qui établissaient que le Canada resterait un allié des États-Unis au cours du 21e siècle. Pour Sutherland, une seule question demeurait sans réponse : quelle sorte d’allié allions-nous devenir?

Le présent texte porte sur le degré d’exactitude des prévisions de Sutherland et montre pourquoi l’importance de ces hypothèses ne se dément pas dans le contexte de la politique contemporaine du Canada. Plus particulièrement, j’entends montrer comment la réaction des Américains aux attaques terroristes du 11 septembre 2001 a permis de resserrer nos liens politiques, économiques et militaires avec les États-Unis.

Contexte

Comme membre (et, plus tard, comme directeur) du Groupe de recherche opérationnelle du Conseil de recherches pour la défense du Canada, Sutherland a soigneusement étudié les politiques de défense et de sécurité du Canada. Même si Sutherland n’a publié qu’un nombre très limité d’articles, il est largement considéré comme « le stratège de l’ère nucléaire le plus influent du Canada3». Écrivant au cours de la période dramatique ayant immédiatement précédé la crise des missiles de Cuba, en 1962, Sutherland délaissait ses préoccupations en matière de sécurité contemporaine pour réfléchir à ce que pourrait être la politique étrangère du Canada au cours du siècle prochain. 

Supposant au départ que le monde éviterait un conflit nucléaire, mais resterait le théâtre d’une « politique de la force », Sutherland avançait qu’il existait trois « invariants de la stratégie canadienne » qui, ensemble, façonnaient et déterminaient le programme d’élaboration des politiques du Canada. Ces invariants étaient « …la géographie, le potentiel économique et les grands intérêts nationaux qui mènent tout naturellement à certains alignements et alliances4». En examinant ces invariants, on peut en déduire « …[les] grandes questions pour lesquelles il existe des choix véritables à faire », ainsi que « …les domaines importants où aucun choix n’est possible, même si nous, Canadiens, aimons croire le contraire ».

En se basant sur les effets combinés de ces invariants, Sutherland prédisait qu’au 21e siècle, le Canada n’aurait d’autre choix que de demeurer un allié des États-Unis. Il estimait que les Canadiens ne devraient pas « …s’en faire outre mesure avec cela... [car] aucun pays, même les États-Unis, ne peut avoir de politique réellement indépendante5». Il fallait plutôt se demander si le Canada serait « un allié puissant et efficace ou un allié faible et réticent » et, parallèlement, si le Canada serait un membre efficace de la communauté internationale ou s’il dépendrait des États-Unis en matière d’affaires internationales6. En étudiant chaque invariant à tour de rôle, nous pouvons évaluer leur pertinence actuelle et déterminer le degré d’exactitude des prédictions de Sutherland.

Premier invariant : la géographie

Il est aisé de prédire qu’à la fin de ce siècle, le Canada occupera la moitié nord du continent nord-américain et les États-Unis, la moitié sud7». À partir de cette froide observation, Sutherland affirmait que des trois invariants, la géographie était le plus important. Il ajoutait ce qui suit :

Ce fait géographique a une conséquence stratégique vitalement importante. Cela signifie que les États-Unis n’ont d’autre choix que de défendre le Canada contre toute agression de l’extérieur, que les Canadiens le veulent ou non. Nous pouvons considérer cela comme une garantie involontaire des États-Unis. Aussi loin qu’il est possible de prévoir, il s’agit d’un aspect clé de la stratégie canadienne ainsi que la base de la sécurité extérieure du Canada8.

Plus de 40 années après cette observation de Sutherland, l’historien Jack Granatstein affirmait « …[que] les avantages découlant d’une alliance avec les États‑Unis [ont] largement excédé les avantages découlant de la poursuite d’une coûteuse neutralité ou d’une pauvre indépendance », ce qui a financièrement justifié notre étroite collaboration avec les Américains9. Le Canada a constamment utilisé sa position géographique comme un avantage, ici comme à l’étranger :

Le Canada a pu affirmer et préserver sa souveraineté territoriale, à un coût raisonnable, grâce à ses ressources et à celles mises à sa disposition en vertu d’ententes (NORAD, par exemple) avec les États‑Unis. Cette situation... a aussi permis au Canada d’être, sur la scène internationale, un acteur plus important que ce qui aurait autrement été possible et de consacrer ses ressources financières à des domaines et à des priorités non liés à la défense [sic] – ce qui a parfois irrité les É.-U10.

Cet avantage n’est pas sans sacrifices. Faisant écho à la réponse, en 1938, du Premier ministre William Lyon Mackenzie King à la promesse du président Franklin D. Roosevelt de protéger le Canada, Sutherland soulignait que le Canada s’était réciproquement engagé à tout faire pour que les États-Unis ne craignent pas une attaque passant par le territoire canadien :

Si les États-Unis sont tenus de défendre le Canada, il est aussi vrai que le Canada ne peut jamais, conformément à ses propres intérêts, ignorer les besoins des Américains sur le plan de la sécurité car, en fin de compte, la sécurité des États‑Unis est garante de celle du Canada11.

Par conséquent, tout en soutenant que « …le caractère commun fondamental des intérêts des deux pays » signifiait que le Canada n’avait aucune raison de craindre les États-Unis, Sutherland soulignait toutefois « …qu’une grande puissance prendra toutes les mesures qu’elle jugera nécessaires pour préserver sa sécurité12». Le fait que le Canada serait forcé d’abandonner sa souveraineté aux États-Unis si ce dernier pays se sentait menacé a constitué un argument de poids pour ceux qui laissaient entendre que le Canada ne devrait même pas avoir des forces armées.

Le NCSM Goose Bay fait le plein près du Navire de la Garde côtière Henry Larson

Photo du MDN AS2006–0730a par le Sergent Dennis Power

Le NCSM Goose Bay fait le plein près du Navire de la Garde côtière Henry Larson dans l’est de l’Arctique dans le cadre de l’opération Lancaster, le 17 août 2006, alors que le NCSM Montreal passe devant lui.

Les ressources canadiennes de défense de l’Amérique du Nord ont donc joué un double rôle : dissuader d’éventuels envahisseurs et « se protéger de l’aide » des États‑Unis13. Les Canadiens ont profité des avantages découlant du partage avec sa voisine, la seule grande puissance mondiale, de la plus longue frontière non défendue de la planète. Toutefois, après les attentats de septembre 2001, certains Américains se sont demandés si le Canada avait adéquatement surveillé ce qui se passait sur son territoire.

Quand les États-Unis ont fermé leur frontière avec le Canada dans la foulée des événements du 11 septembre, il est apparu que le Canada avait échoué à une épreuve décisive. Même si la frontière a été rapidement rouverte, certains fonctionnaires américains ont vite montré du doigt les politiques laxistes du Canada en matière d’immigration. Des accusations non fondées voulant que les terroristes aient transité par le Canada ont exacerbé la situation. Allant plus loin, le président George W. Bush a averti le monde entier qu’il était « temps d’agir » et que les pays seraient « tenus responsables de leur inaction ». Son message était très clair : « Soit vous êtes avec nous, soit vous êtes contre nous dans notre combat contre le terrorisme14».

Le gouvernement du Canada a immédiatement réagi pour calmer les inquiétudes des Américains quant à leur sécurité : resserrement des politiques sur l’immigration et sur les réfugiés et adoption de la loi anti-terrorisme (2001). Plusieurs accords politiques bilatéraux ont aussi été élaborés, incluant la Déclaration sur la frontière intelligente (2001), l’Entente sur les tiers pays sûrs (2002) et le Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité (2005). Comme ces lois touchent le droit à la liberté de mouvement et le droit d’association, leur impact total sur les Canadiens doit encore être étudié en détail. Le Canada a aussi mis en place le ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile (maintenant appelé Sécurité publique Canada) comme équivalent du US Department of Homeland Security, ainsi que des équipes intégrées de la police des frontières, l’Agence des services frontaliers du Canada et l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien. De plus :

Le Canada a pris d’autres mesures allant au-delà de la sécurité à la frontière, dont le gel de biens appartenant à des terroristes, l’élargissement de la définition des activités terroristes punissables par la loi, l’augmentation des pouvoirs d’enquête des corps policiers, la présentation d’une loi visant à restreindre les activités de financement d’organisations extrémistes, une coopération plus étroite entre le FBI et la Gendarmerie royale du Canada ainsi que l’accroissement des dépenses pour contrer des attaques nucléaires, biologiques et chimiques15.

Toujours en vigueur, la politique canadienne de sécurité nationale donne la priorité absolue à la lutte contre le terrorisme et à la prévention de la prolifération des armes de destruction massive (ADM)16. Il est impressionnant de constater que

…même si la plupart des Canadiens ne reconnaissent pas que le terrorisme et la prolifération des ADM comptent parmi les plus graves menaces actuelles pour la sécurité du Canada, les priorités annoncées par Ottawa sont identiques à celles du gouvernement américain17.

La preuve dépasse largement la simple rhétorique car le Canada a dépensé plus de 9 milliards de dollars canadiens entre 2001 et 2005 pour améliorer la sécurité physique le long de sa frontière dans le but de montrer sa détermination à respecter son engagement envers les États-Unis en matière de sécurité et pour témoigner de l’importance que le Canada accorde à ses liens économiques avec les États-Unis18.

Deuxième invariant : le potentiel économique

Plaçant le Canada « …quelque part entre la septième et la neuvième puissance mondiale » en termes de produit intérieur brut (PIB) et de compétence technologique, Sutherland prédisait que « …vers l’an 2000, il est probable que le Canada aura glissé de quelques places, » mais qu’il « se maintiendra tout de même parmi les premiers... en compagnie de pays comme la Grande-Bretagne, la France, l’Allemagne, l’Italie et le Japon19». Les prévisions de Sutherland se sont révélées un peu pessimistes car le Canada reste la neuvième puissance mondiale selon les chiffres les plus récents de la Banque mondiale à l’égard du PIB20. Il indiquait que l’étroite intégration économique entre le Canada et les États-Unis a « …forgé un lien encore plus solide » que la géographie, au point où « …les deux pays ne constituent plus qu’un seul objectif21».

On peut se demander si même Sutherland aurait pu imaginer que l’économie canadienne serait aussi intégrée à l’économie américaine qu’elle l’est aujourd’hui. Dans le passé, les tentatives visant à diversifier nos échanges et notre interdépendance ont largement échoué. Même les efforts concertés du premier ministre Pierre Trudeau en vue de réorienter le gros de nos échanges commerciaux avec l’Europe et le Japon (Troisième option) n’ont rien donné22. Au lieu de cela, le Canada a cherché à resserrer ses liens économiques avec les États-Unis, ce qui a mené à l’Accord de libre‑échange entre le Canada et les États-Unis (1988), puis à l’Accord de libre-échange nord-américain (1993), ainsi qu’au Partenariat pour la sécurité et à la prospérité (2005) déjà mentionné. Des mesures allant encore plus loin sont envisagées, dont une possible union douanière et une intégration monétaire23.

Un navire du service de police de Vancouver patrouille le port de Vancouver

Photo du MDN ET2010–0017–27 par le Caporal–chef Chris Ward

Un navire du service de police de Vancouver patrouille le port de Vancouver le 6 février 2010. Â noter les anneaux olympiques â l’arrière–plan.

Les résultats ont été remarquables, si bien qu’un récent rapport du Congressional Research Service se concluait en ces termes :

Aujourd’hui, les États-Unis et le Canada ont les plus grandes relations commerciales du monde, ce qui représentait, chaque jour en 2007, plus de 1,5 milliard de dollars américains d’échanges de biens et de services. Le Canada achète 21,3 % des exportations américaines, soit davantage que le Japon et l’ensemble de l’Union européenne, et fournit 16 % de toutes les importations américaines. En 2007, les États-Unis ont été la source de 64,9 % des biens importés par le Canada et ont acheté 76,3 % des marchandises exportées par le Canada; les échanges avec les États-Unis représentent près de 40 % du PIB du Canada24.

Selon Denis Stairs, notre dépendance commerciale envers les États-Unis a « clairement mis en évidence » que « …l’exigence la plus élémentaire de la politique étrangère du Canada... est le maintien de relations économiques bilatérales efficaces avec les États-Unis25», ce qui appuie la thèse de Sutherland comme quoi le Canada n’a pas vraiment d’autre choix que de considérer les États-Unis comme son principal allié.

Un risque grave découle des liens économiques très serrés entre le Canada et les États-Unis. Sutherland indiquait que la très grande dépendance du Canada envers le commerce avec les États-Unis le rend « …beaucoup plus vulnérable que les États-Unis », comme l’a montré la réaction des Américains aux attaques terroristes de 200126. Comme l’a très bien résumé Desmond Morton, « les Américains peuvent se rappeler le 11 septembre, mais nous devons nous souvenir du 12 septembre, alors que les Américains, paniqués, ont fermé la frontière et frappé notre prospérité au cœur27». L’empressement des Américains à sacrifier le commerce en échange de la sécurité a provoqué une dichotomie dans les buts poursuivis par les deux pays. D’après Frank Harvey,

…alors que les Américains s’engagent dans la lutte contre le terrorisme pour empêcher une autre attaque en sol américain, la principale motivation stratégique du Canada en matière de lutte anti-terrorisme est d’empêcher les conséquences économiques négatives de la réaction américaine en cas de nouvelle attaque28.

À cet égard, après le 11 septembre 2001, le Canada a subi de plus en plus de pression pour aligner davantage ses politiques de sécurité et de défense sur celles des États-Unis:

Comme les questions de sécurité continuent à éclipser les questions économiques au sud de la frontière canadienne, des fonctionnaires américains mesureront la valeur des relations des États-Unis avec les autres pays, non en fonction du potentiel d’amélioration du commerce bilatéral, mais dans l’optique d’un nouvel environnement de sécurité et de leur obligation (obsession) d’atteindre la perfection dans la guerre contre le terrorisme... La volonté du Canada à atteindre la « perfection » en ce domaine doit devenir plus transparente et davantage fondée sur des politiques qui témoignent d’un engagement très clair envers la sécurité des États-Unis29.

Naturellement, « …la réponse de l’administration Bush à presque toutes les plaintes de nature économique adressées par le Canada a été de suggérer au Canada de reformuler ses politiques pour les harmoniser à celles des États-Unis », comme le montre bien la position américaine sur le bois d’œuvre et la Commission canadienne du blé30.

Un CF 18 Hornet

Photo du MDN CX2010–0078–007 par le Caporal Jax Kennedy

Un CF 18 Hornet du 441e Escadron d’appui tactique effectue une patrouille de sécurité dans le cadre des Jeux olympiques de Vancouver, le 25 février 2010.

Troisième invariant : les alliances naturelles fondées sur les grands intérêts nationaux

Tout en reconnaissant « …[qu’il] n’existe pas deux pays ayant exactement les mêmes intérêts, » Sutherland avançait : « …[qu’il] existe certains alignements naturels découlant d’une communité naturelle d’intérêts », et que « …l’alignement naturel le plus évident du Canada doit se faire avec les États-Unis31». Pour appuyer cette position, il citait nos liens étroits en matière d’économie et de sécurité ainsi que les traits communs en matière « …d’affinités culturelles, de compatibilité des institutions et des attitudes sociales, le tout dépassant la conception ordinaire des intérêts communs.»32

Cette affinité naturelle persiste de nos jours. Même si Michael Adams affirme avoir relevé des attitudes sociales divergentes entre les Canadiens et les Américains, de nombreux observateurs sont d’accord avec Jennifer Welsh qui soutient « …[que] beaucoup de valeurs que le Canada défend dans le monde sont des valeurs que nous partageons avec les États-Unis : démocratie, règle de droit, droits de la personne et rôle accru du secteur privé dans le développement33». Cette constatation est exprimée plus simplement par Jack Granatstein : « Nous partageons un continent, la plupart de nos valeurs, beaucoup de traditions et de grands pans d’histoire34».

La primauté de notre alliance naturelle avec les États-Unis est particulièrement évidente dans nos relations en matière de défense. L’Énoncé de politique internationale du Canada (2005) confirme que les États-Unis « …demeurent l’allié le plus important du Canada » et ajoute « …[que] la sécurité du Canada est devenue plus étroitement liée que jamais à celle de son voisin du Sud » depuis le 11 septembre 200135. Répondant à l’appel, le Canada a été parmi les premiers pays à se joindre à l’opération militaire menée par les Américains en Afghanistan. Pour soutenir des opérations accrues, les dépenses militaires du Canada ont augmenté de 27 pour 100 entre 2001 et 2007, ce qui a mis un terme à des décennies de déclin et a permis d’accroître les effectifs militaires et d’acquérir de l’équipement majeur36.

Une autre preuve de notre alignement de plus en plus prononcé sur les États-Unis en matière de défense est la récente transformation organisationnelle des Forces canadiennes (FC). Au niveau opérationnel, plusieurs nouvelles structures ont été créées et elles reflètent des structures américaines (COMFEC, COMCANADA par comparaison avec CENTCOM, NORTHCOM, etc.). Partageant avec les États-Unis plus de 80 traités d’ordre militaire et 250 autres ententes militaires bilatérales, les accords du Canada avec les États-Unis, en matière de défense, peuvent être qualifiés « d’intermestiques37». Dwight Mason, ancien membre de la Commission permanente mixte de défense Canada‑États-Unis, est allé jusqu’à suggérer « …[qu’il] n’existe sans doute pas deux armées du monde qui ont des relations aussi étendues, qui se comprennent aussi bien... et qui travaillent ensemble aussi facilement38».

Dans le contexte de cet alignement naturel, Sutherland soulignait la politique bien établie du Canada, qui consiste à rechercher des partenaires étrangers et à poursuivre son « ouverture envers l’Europe pour compenser l’influence américaine excessive39».  Il voyait des avantages dans les partenariats multilatéraux pour peu qu’ils soient négociés dans le contexte approprié:

Si nous voulons rassembler des alliés contre les États-Unis, nous serons sûrement déçus. Et cela vaut pour tout autre forum, incluant les Nations Unies. Toutefois, comme membre de l’OTAN et en raison de sa participation à d’autres systèmes collectifs de défense, le Canada peut atteindre deux buts. D’abord, en étant présent à la table, le Canada peut faire valoir ses propres intérêts... Deuxièmement, dans la mesure où le Canada joue un rôle important dans la sécurité du monde occidental, il peut exercer une réelle influence à Washington... [Ce] principe de représentation indépendante est la clé d’une forte identité nationale canadienne [accent mis par l’auteur]40.

Ainsi, Sutherland estimait que le multilatéralisme ne serait pas une garantie contre la domination américaine. Au lieu de cela, il soutenait que le Canada devrait recourir au multilatéralisme pour appuyer, non pas supplanter, ses relations prédominantes avec les États-Unis. En outre, il avançait que la capacité du Canada à remporter constamment des succès à Washington et sur la scène internationale serait déterminée par son aptitude à exercer un pouvoir militaire significatif, ce que Sutherland appelait « la médaille d’or de la diplomatie41».

L’atteinte d’un juste équilibre entre le bilatéralisme et le multilatéralisme a posé quelques problèmes. Malgré les conseils de Sutherland, de nombreux critiques estiment que les récents gouvernements libéraux ont trop insisté sur le multilatéralisme comme outil devant permettre au Canada de se distinguer des États-Unis. Andrew Richter mentionne que le « multilatéralisme obsessionnel » du Canada est à la fois inefficace et dangereux pour notre alliance principale:

L’insistance du Canada sur... la diplomatie multilatérale [a] donné la fausse impression que cela représentait une contribution significative à la sécurité internationale alors qu’en réalité, les approches multilatérales se sont révélées inutiles pour régler de nombreux problèmes mondiaux... Les États-Unis n’ont pas eu beaucoup de temps ou de patience pour les politiques canadiennes de « sécurité humaine » et de « pouvoir discret »... Plusieurs initiatives soutenues par le Canada en matière de politique étrangère (dont les mines terrestres et le protocole de Kyoto) se sont heurtées à l’hostilité de Washington42.

Le NCSM Regina et le garde–côte Mellon de la United States Coast Guard au port de Vancouver

Photo du MDN IS2009–1028–03 par le Sergent Paz Quillé

Le NCSM Regina et le garde–côte Mellon de la United States Coast Guard, de même que plusieurs navires de défense côtière (NDC) et des navires–écoles de type Orca, sont accostés le long de la Place du Canada au port de Vancouver, le 18 octobre 2009.

Effectivement, selon la « doctrine Bush » faisant état d’un monde d’unilatéralisme américain accru, le succès des initiatives multilatérales du Canada dépendait largement du soutien des États-Unis. Par exemple, le leadership du Canada dans la cadre du Partenariat mondial contre la prolifération des armes de destruction massive et des matières connexes (2002) dévoilé lors du Sommet du G8 à Kananaskis, a été pleinement soutenu par les États-Unis et a connu un succès digne de mention43. À l’opposé, l’initiative du Canada intitulée « La responsabilité de protéger », menée aux Nations Unies n’a été adoptée que dans une version édulcorée qui en réduisait fortement l’efficacité, et ce en grande partie parce que les États-Unis refusaient d’appuyer la prémisse centrale de l’initiative44. Les deux cas montrent bien que le succès du Canada, lorsqu’il s’agit d’atteindre ses objectifs politiques nationaux, multilatéraux ou autres, dépend de sa capacité à convaincre les États-Unis que le tout va dans le sens de nos intérêts communs. Allan Gotleib, ancien ambassadeur du Canada aux États-Unis, résume d’ailleurs la situation comme suit:

Les Canadiens ne pourront contribuer de façon significative à la paix internationale et à une plus grande justice dans le monde s’ils ne peuvent influencer les Américains. Notre incapacité à exercer une influence à Washington aide à expliquer, plus que tout autre facteur, le récent déclin du rôle du Canada dans le monde, déclin ayant suscité bien des discussions45.

La seule option : puissance et efficacité ou faiblesse et réticence?

Nous avons vu que les invariants n’ont laissé que peu de possibilités au Canada, si ce n’est demeurer un allié des États-Unis, comme le signifiait Sutherland. Toutefois, celui‑ci confiait à ses lecteurs la tâche de prédire quel genre d’allié le Canada serait au 21e siècle. Même si l’espace ne nous permet pas de traiter en profondeur de cette question, notre examen des invariants effectué en fonction de l’ère post‑11 septembre 2001 a mis en évidence quelques périodes de faiblesse de la part du Canada. Globalement, le Canada a négligé ses militaires et sa sécurité intérieure, a connu des litiges sur certaines questions commerciales et a tenté d’élaborer des politiques multilatérales souvent contraires aux intérêts des États-Unis; tout cela pourrait amener un observateur neutre à mettre en doute notre amitié envers les États-Unis. De récents événements survenus dans le nouvel environnement de sécurité ont montré que si le Canada agit en mauvais allié des Américains, il en paiera le prix. Par exemple, Andrew Richter affirme que la tergiversation du Canada à propos de sa participation à la guerre en Iraq et à la défense contre les missiles balistiques a contribué au peu d’empressement des Américains à régler des litiges concernant une foule d’importants problèmes économiques, dont les droits sur le bois d’œuvre et l’interdiction d’acheter du bœuf canadien46. Inversement, plusieurs personnes haut placées ont mentionné le soutien du Canada à la reconstruction en Iraq et l’ampleur de son engagement sur tous les fronts en Afghanistan comme des exemples de tentatives visant à redevenir un « bon allié » des États-Unis et à regagner la confiance de Washington47

USS Kittyhawk, NCSM Ottawa et NCSM Regina emplacement du l’exercice Rimpac

Photo du MDN OTT–316dec12recce par le Caporal chef Nick Bichsel

Le porte–avions USS Kittyhawk, escorté par le NCSM Ottawa et le NCSM Regina dans l’ouest de l’océan Pacifique, se rend â l’emplacement du l’exercice Rimpac, le 23 juin 2008.

Quant à savoir si le Canada peut, indépendamment des États-Unis, être un acteur efficace au sein de la communauté internationale, beaucoup soutiennent Michael Ignatieff lorsqu’il affirme que « la réticence d’Ottawa à financer adéquatement des missions militaires, des missions de paix et des missions d’aide humanitaire [a] fait en sorte que le gouvernement du Canada est en mauvaise position pour mener des actions indépendantes48». Bien que de récentes augmentations assez considérables des dépenses militaires aient permis de commencer à combler des lacunes en matière de capacités, il est douteux que le Canada puisse payer le prix exigé pour restaurer rapidement sa crédibilité comme « puissance militaire ». Dans l’intervalle, « …seul un engagement clair et net envers la sécurité des États-Unis incitera Washington... à protéger les intérêts économiques du Canada », ce qui, compte tenu du récent climat économique mondial, est la priorité actuelle du gouvernement du Canada49. Devant la vulnérabilité économique de notre pays, si la préservation de notre richesse et de notre prospérité relatives est dans notre intérêt, alors le Canada n’a pas réellement de choix quant au genre d’allié qu’il doit être.

Conclusion

Ayant distillé l’essence de la realpolitik canadienne dans ses trois invariants, Sutherland soutenait que les effets combinés de la géographie, de l’économie et des grands intérêts nationaux communs étaient si durables que le Canada n’aurait d’autre choix que de demeurer l’allié des États-Unis au cours du 21e siècle. Sutherland a eu raison en ce qui concerne le monde polarisé qui a découlé des événements du 11 septembre 2001, car le Canada peut difficilement faire autre chose que renforcer son alliance et ses liens avec les États-Unis. 

Les États‑Unis étant disposés à sacrifier le commerce à la sécurité, les intérêts économiques du Canada sont maintenant inextricablement liés à son engagement à contribuer à protéger son voisin. Pour répondre aux attentes américaines, le Canada a adopté d’importantes lois qui ont eu de grandes conséquences sur l’immigration, les libertés fondamentales ainsi que les droits et libertés de ses citoyens. Les liens commerciaux et économiques du Canada avec les États-Unis sont si puissants que les Canadiens craignent davantage la fermeture de la frontière canado-américaine qu’une attaque terroriste dans leur pays même.

Militairement et diplomatiquement, le Canada s’est joint au programme américain de lutte contre le terrorisme. La structure militaire opérationnelle du Canada a été modifiée pour refléter celle des États-Unis, afin d’accroître l’interopérabilité. Manifestement sous l’égide de l’OTAN, mais dans l’optique d’être vu comme un bon allié des États-Unis, le Canada s’est doté d’une politique étrangère actuellement axée sur la mission en Afghanistan, dans le cadre de sa contribution à la guerre mondiale contre le terrorisme. Le Canada s’en remettant au soutien américain pour compenser sa « puissance militaire » diminuée, sans succès dans l’arène du multilatéralisme est encore davantage lié à ses relations bilatérales avec les États-Unis, partenaire en mesure d’agir unilatéralement s’il le faut et qui n’hésite d’ailleurs pas à le faire. 

Malgré les préoccupations liées à la nature inévitable de notre alliance avec les États-Unis, nous devrions peut-être garder à l’esprit les exhortations de Sutherland concernant les avantages de nos relations. Les Canadiens ont peu de raisons de se plaindre de la situation favorable dans laquelle ils se trouvent. Après tout, si le Canada a atteint ce statut élevé parmi les pays, c’est en grande partie grâce à ses relations uniques avec les États-Unis. En demeurant un allié fidèle mais indépendant, le Canada peut même, avec une certaine confiance, aspirer à de nouveaux sommets.

L’auteur souhaite remercier le Lieutenant-colonel Ian McCullough pour ses conseils, son aide en matière de révision ainsi que son encadrement dans la préparation de cet article.

La plage Ingonish

Parc national du Cap-Breton/© Parcs Canada/Barrett & MacKay/1985

La plage Ingonish sur l’île du Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse.

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Le Lieutenant-colonel Dwayne Lovegrove, CD, pilote, commande actuellement le 440e Escadron de transport de Yellowknife, dans les Territoires du Nord-Ouest. Il est titulaire d'une maîtrise en études sur la guerre obtenue au Collège militaire royal du Canada. Plusieurs fois affecté au Moyen-Orient, le Lcol Lovegrove a récemment servi comme commandant de la Force opérationnelle dans le cadre de l'opération Gladius, qui consistait en la contribution du Canada à la Force des Nations Unies chargée d'observer le désengagement (FNUOD) sur le plateau du Golan.

Notes

  1. Robert J. Sutherland, « Canada’s Long Term Strategic Situation », International Journal, Vol. 17, no 3 (Été 1962), p. 223.
  2. Paul Buteux, « Sutherland Revisited : Canada’s Long-Term Strategic Situation », Revue canadienne de défense, septembre 1994, p. 5.
  3. Andrew Richter, « The Sutherland Papers : A Glimpse into the Thinking of Canada’s Preeminent Strategist », Revue canadienne de défense, automne 1997, p. 28.
  4. Robert J. Sutherland, p. 201.
  5. Ibid., p. 223.
  6. Ibid.
  7. Ibid., p. 202.
  8. Ibid.
  9. J.L. Granatstein, « The Importance of Being Less Earnest : Promoting Canada’s National Interests Through Tighter Ties with the U.S. », Benefactor’s Lecture (Toronto : C.D. Howe Institute, 2003), p. 15.
  10. Dwight N. Mason, « The Future of  Canadian-U.S.. Defense Relations », The American Review of Canadian Studies (Printemps 2003), p. 72.
  11. Sutherland, p. 203.
  12. Ibid.
  13. Nils Orvik, « The Basic Issue in Canadian National Security : Defence against Help, Defence to Help Others », Revue canadienne de défense, Vol. 11, no 1 (Été 1981), cité par Donald Barry et Duane Bratt, « Defense Against Help : Explaining Canada-U.S. Security Relations », The American Review of Canadian Studies, Vol. 38, no 1 (Printemps 2008), p. 63.
  14. President George W. Bush, « President Welcomes President Chirac to White House », White House Press Release, Washington, DC : Office of the Press Secretary, 6 novembre 2001, à l’adresse http://www.whitehouse.gov/news/releases/2001/11/print/20011106-4.html, accès le 19 octobre 2008.
  15. États-Unis, Congressional Research Service, « Canada-U.S. Relations », CRS Report for Congress, 12 mai 2008, Library of Congress, CRS Report No. 96-397, 16 – 8, à l’adresse http://digital.library.unt.edu/ govdocs/crs/permalink/meta-crs-8946.
  16. Canada, Bureau du Conseil privé, Protéger une société ouverte : la politique canadienne de sécurité nationale (Avril 2004), p. 54.
  17. Frank P. Harvey, « Canada’s Addiction to American Security : The Illusion of Choice in the War on Terrorism », The American Review of Canadian Studies, Vol. 35, no 2 (Été 2005), p. 275.
  18. Ibid., p. 274.
  19. utherland, p. 203-204.
  20. Les pays précédant le Canada étaient les États-Unis, le Japon, l’Allemagne, la Chine, le Royaume-Uni, la France, l’Italie et l’Espagne, respectivement. Banque mondiale, « Gross Domestic Product 2007 », World Development Indicators database, révisé le 10 septembre 2008, à l’adresse http://siteresources.worldbank.org/ DATASTATISTICS/Resources/GDP.pdf, accès le 23 octobre 2008.
  21. Sutherland, p. 204.
  22. Andrew Cohen, While Canada Slept : How We Lost Our Place in the World (Toronto : McClelland & Stewart, 2003), p. 108.
  23. Maureen Appel Molot, « The Trade-Security Nexus : The New Reality in Canada-U.S. Economic Integration », The American Review of Canadian Studies (Printemps 2003), p. 30.
  24. États-Unis, Congressional Research Service, « Canada-U.S. Relations », CRS Report for Congress, p. 28.
  25. Denis Stairs, « Trends in Canadian Foreign Policy : Past, Present, and Future », Behind the Headlines Vol. 59, no 3 (Juin 2003), Institut canadien des affaires internationales, p. 4.
  26. Sutherland,  p. 204.
  27. Desmond Morton, « Keynote Address to the Inter-University Seminar on Armed Forces and Society », Toronto, 1er octobre 2004, cité par Derek H. Burney, « The Perennial Challenge : Managing Canada-US Relations », Canada Among Nations 2005 : Split Images, Andrew F. Cooper et Dane Rowlands  [Éd.] (Kingston : McGill-Queen’s University Press, 2005), p. 73.
  28. Harvey, p. 272.
  29. Ibid., p. 273.
  30. John Herd Thompson, « Playing by the New Washington Rules : The U.S.-Canada Relationship, 1994‑2003 », The American Review of Canadian Studies, Vol. 33, no 1 (Printemps 2003), p. 13.
  31. Sutherland, p. 204 – 205.
  32. Ibid., p. 205.
  33. Jennifer M. Welsh, « Reality and Canadian Foreign Policy », Canada Among Nations 200…, p. 33. Pour une opinion contraire, voir Michael Adams, Fire and Ice : The United States, Canada and the Myth of Converging Values (Toronto : Penguin, 2003).
  34. Granatstein, p. 27.
  35. Canada, « Fierté et influence : notre rôle dans le monde – Défense », Énoncé de politique internationale du Canada (2005), IDDN A-JS-005-000/AG-001, p. 24.
  36. Steven Staples et Bill Robinson, « More Than The Cold War : Canada’s Military Spending 2007-2008 », Foreign Policy Series 2, 3 (Octobre 2007), p. 1, à l’adresse http://www.policyalternatives.ca/documents/ National_Office_Pubs/2007/More_Than_the_Cold_War.pdf, accès le 30 octobre 2008.
  37. Le terme « intermestique » a été inventé par des spécialistes en sciences sociales pour décrire la fusion des préoccupations domestiques et internationales au sein des États et entre les États, ou encore l’internationalisation des problèmes domestiques. (Éd.). États-Unis, « Canada – U.S. Relations », CRS Report for Congress, p. 9.
  38. Mason, p. 71.
  39. Sutherland, p. 207.
  40. Ibid., p. 222.
  41. Ibid., p. 203.
  42. Andrew Richter, « From Trusted Ally to Suspicious Neighbor : Canada-U.S. Relations in a Changing Global Environment », The American Review of Canadian Studies (Automne 2005), p. 474-475, 486-487.
  43. Canada, Affaires étrangères et Commerce international Canada, Programme de partenariat mondial : une contribution tangible du Canada pour réduire la menace des armes de destruction massive (2007).
  44. Ernie Regehr, « R2P and the Global Summit », Project Ploughshares Briefing (Septembre 2005), à l’adresse http://www.ploughshares.ca/libraries/Briefings/brf056.pdf, accès le 29 octobre 2008. Duane Bratt, « Warriors or Boy Scouts?  Canada and Peace Support Operations »,  Readings in Canadian Foreign Policy: Classic Debates and New Ideas, Duane Bratt et Christopher J. Kukucha [Éd.](Don Mills, Ontario : Oxford University Press, 2007), p. 243.
  45. Allan Gotleib, « The Paramountcy of Canada-U.S. Relations », National Post, 22 mai 2003, p. 24. 
  46. Richter, « From Trusted Ally to Suspicious Neighbor… », p. 490.
  47. Donald Barry, « Chrétien, Bush, and the War in Iraq », The American Review of Canadian Studies, Vol. 35, no 2 (Été 2005), p. 232. Janice Gross Stein et Eugene Lang, The Unexpected War : Canada in Kandahar (Toronto : Viking Canada, 2007), p. 184.
  48. Michael Ignatieff, « Canada in the Age of Terror : Multilateralism Meets a Moment of Truth », Independence in An Age of Empire: Assessing Unilateralism and Multilateralism, G.F. Walker [Éd.] (Halifax : Centre for Foreign Policy Studies, 2004), p. 31-41, cité par Douglas Ross et Anil Hira, « Canada, A Land of Deep Ambivalence : Understanding the Divergent Response to US Primacy after 9/11 », Canadian-American Public Policy 68 (Décembre 2006), p. 11.
  49. Harvey, p. 288.

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