LE MONDE DANS LEQUEL NOUS VIVONS

Sergei Karpukhin/Reuters RTX16MB9

Le président de l’Ukraine Viktor Ianoukovitch (à gauche) fait un clin d’œil à son homologue russe, Vladimir Poutine, pendant une cérémonie de signature de documents, après une réunion de la Commission interétatique russo-ukrainienne, au Kremlin, à Moscou, le 17 décembre 2013.

À la recherche des petits hommes verts : comprendre l’emploi de la guerre hybride par la Russie

par Tony Balasevicius

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Le major Tony Balasevicius, CD, officier d’infanterie expérimenté, a pris sa retraite des Forces canadiennes en 2013. À l’heure actuelle, il sert à titre d’officier d’infanterie de la Force de réserve, au sein du Groupe d’élaboration des concepts du Centre de guerre terrestre de l’Armée canadienne, à Kingston.

Introduction

En février 2014, les manifestants antigouvernementaux ont renversé le gouvernement ukrainien de Viktor Ianoukovitch. Les séparatistes prorusses n’ont par la suite pas tardé à s’emparer de l’infrastructure en Crimée, tandis qu’ils occupaient systématiquement le territoire situé dans la partie orientale de l’Ukraine. Comme on le découvrira plus tard, bon nombre de ces soi-disant séparatistes étaient en fait des membres des Forces spéciales russes très bien entraînés ne portant aucun insigne, les fameux « petits hommes verts ». La précision remarquable de leurs opérations a secoué un grand nombre d’analystes occidentaux. En raison non seulement de la rapidité avec laquelle les événements se sont déroulés, mais aussi de l’efficacité dont les Russes ont fait preuve dans la coordination et l’exécution des nombreuses opérations qu’ils avaient lancées1.

Ce qui ressort de l’annexion de la Crimée et des combats qui ont suivi dans la région orientale de l’Ukraine est que les forces militaires classiques de la Russie, auxquelles de telles opérations auraient normalement été confiées, n’ont joué qu’un rôle de soutien. Mêmes les Forces spéciales bien en vue de la Russie, qui avaient en grande partie organisé la résistance, pris l’infrastructure essentielle et établi bon nombre des postes de contrôle de la circulation qui ont surgi un peu partout dans la péninsule, n’ont pas été un élément déterminant dans le conflit. Tout compte fait, c’est l’emploi bien coordonné du renseignement, de la guerre psychologique, de l’intimidation, de la corruption et de la propagande sur Internet et dans les médias qui a affaibli, puis brisé, le mouvement de résistance des Ukrainiens2. Les combats se sont soldés par une victoire éclatante sans appel assurée par ce que certains appellent la « guerre de nouvelle génération » de la Russie3.

En érigeant la « guerre de nouvelle génération » en doctrine, les Russes adhéraient à l’idée que la guerre hybride est un outil stratégique. Ils n’allaient donc plus axer les conflits sur des campagnes militaires classiques de niveau opérationnel, mais les orienter vers la sphère stratégique. Ce changement a amené les Russes à redéfinir le concept du champ de bataille et à redonner une grande importance à la prise en charge à l’échelle nationale de la planification et de la coordination stratégiques.

PJF Military Collection/Alamy Stock Photo J13BMG

Le Lt. Col. Stephen Capehart, commandant du 1er Bataillon, 68e Régiment blindé, Équipe de combat de la 3e Brigade blindée, 4e Division d’infanterie, monte sur son Abrams dans un polygone d’exercice, à la base militaire d’Adazi (Lettonie), le 14 avril 2017. Le Lcol Wade Rutland, commandant du 1er Bataillon, Princess Patricia’s Canadian Light Infantry, se prépare à monter à bord de l’Abrams également.

Forte du succès qu’elle a obtenu en menant une « guerre de nouvelle génération », la Russie continuera sans doute à perfectionner et à employer sa doctrine afin d’atteindre ses objectifs stratégiques. Le Canada étant prêt à envoyer en Lettonie un groupement tactique qui fera partie de la Force de réaction rapide de l’OTAN composée de 5000 militaires, il devra comprendre les principes de cette doctrine et les répercussions que son application pourrait avoir. Le présent article présente les éléments de base de la « guerre de nouvelle génération » de la Russie et les grandes lignes de l’idéologie sur laquelle elle repose. Toutefois, il convient d’abord d’examiner et de comprendre la théorie de la guerre hybride et les moyens utilisés pour vaincre un adversaire.

Frank Hoffman et le concept de la guerre hybride des Occidentaux

Frank Hoffman, chercheur universitaire attaché au Laboratoire de combat du Corps des Marines, a grandement influé sur la perception occidentale de la guerre hybride4. Dans une monographie datant de 2007 intitulée Conflict in the 21st Century : The Rise of Hybrid Wars, Hoffman expose les principes de base qui en sont venus à définir l’idée que se font les Occidentaux de la guerre hybride. Dans son ouvrage, il définit la guerre hybride comme étant « un éventail complet de méthodes d’affrontement, soit des capacités conventionnelles, des tactiques et des formations irrégulières, des actes terroristes, y compris des attaques aveugles et de la coercition, ainsi que des troubles d’ordre criminel5 » [TCO]. Selon Hoffman, cette forme de guerre brouille les lignes qui séparent les divers types de conflits, les groupes qui y prennent part et les technologies employées6. À cet égard, il soutenait que le monde entrait dans une période où les guerres allaient simultanément prendre un grand nombre de formes et être menées par des adversaires souples et évolués7.

Hoffman estimait que le futur allait être fait non pas de problèmes distincts qui se suivent et nécessitent l’emploi de méthodes nouvelles ou différentes, mais de problèmes qui convergent pour devenir des guerres multimodales ou hybrides8. Il a fait valoir que dans de telles conditions, les opérations allaient être menées par des unités hybrides, tant par leur forme que par la façon dont elles seraient employées. Par exemple, il a fait remarquer que les conflits futurs allaient concerner des groupes comme le Hezbollah et le Hamas, et nécessiter le recours à diverses capacités. Il envisageait également la probabilité que des États transforment leurs unités classiques en formations irrégulières et qu’ils adoptent de nouvelles tactiques, comme l’ont fait les fedayin en Iraq, en 20039. Hoffman a aussi fait remarquer que l’exécution des activités pouvait être confiée à une seule unité ou à des unités distinctes, mais qu’un quartier général basé dans l’espace de bataille principal allait la plupart du temps assurer la coordination de ces activités sur les plans opérationnel et tactique pour obtenir les effets synergiques voulus10.

L’une des observations les plus importantes qu’a faites Hoffman se rapporte à la façon dont il estimait que les guerres hybrides allaient se dérouler sur le plan des interactions entre éléments réguliers et irréguliers. Il indique que dans l’histoire, les combats ont été menés tant par des éléments réguliers que par des éléments irréguliers dans bon nombre de guerres; toutefois, ces éléments menaient leurs opérations dans différents théâtres ou au sein de différentes formations. Hoffman avance l’idée que cela puisse ne plus être le cas à l’avenir. En fait, il affirme qu’il n’allait plus être inhabituel de voir des éléments irréguliers jouer un rôle opérationnel déterminant plutôt que d’être relégués au second plan comme dans le passé11.

Les idées de Hoffman relativement à l’emploi simultané de multiples formes de guerres, au recours à la guerre hybride par des États, à l’utilisation de cellules décentralisées à l’intérieur de structures politiques hiérarchisées et à l’émergence de l’élément irrégulier en tant que partenaire jouant un rôle déterminant, ou du moins égal, dans le conflit, ont toutes influé sur l’établissement de la doctrine de la « guerre de nouvelle génération » qu’a adoptée la Russie. Pourtant, ces idées sont ancrées aux niveaux tactique et opérationnel, et leur application n’explique pas entièrement à elle seule l’efficacité et le succès des récentes opérations russes12. Pour saisir avec justesse ce que les Russes ont réalisé en suivant le modèle de la guerre hybride, il importe de comprendre la façon dont les activités ont été coordonnées au niveau stratégique, selon une doctrine perfectionnée et axée sur l’atteinte d’un unique objectif stratégique. Pour nous faire une idée exacte de cet aspect des opérations qu’ont menées les Russes, nous aurions sans doute intérêt à voir ce qu’en pensent les Chinois13.

Défilé de soldats chinois – Place Tiananmen, à Beijing.

Damir Sagolj/Reuters RTX1QUBQ

La guerre hors limites du point de vue des Chinois

Traditionnellement, l’Armée populaire de libération (APL) chinoise appliquait une doctrine de la « guerre populaire » et le principe de l’exploitation de la supériorité numérique d’une force conventionnelle afin de réduire à néant l’avantage qu’offrait la supériorité technique des adversaires présumés. Toutefois, lorsqu’ils ont commencé à examiner leur capacité de projection dans les années 1980, les Chinois se sont rendu compte qu’ils devaient moderniser leur structure de force et leur doctrine14. La victoire éclatante qu’a remportée la Coalition dirigée par les États-Unis dans la première guerre du Golfe menée contre l’Iraq a donné aux Chinois une occasion d’étudier les pratiques exemplaires mises à profit de nos jours dans les opérations militaires. Du point de vue de l’APL, le conflit indiquait que dans la conduite de la guerre, la balance penchait désormais nettement du côté des petites forces bénéficiant de la haute technologie15.

Les Chinois ont été particulièrement impressionnés par l’utilisation que faisaient les États-Unis des outils issus de la nouvelle technologie, comme les ordinateurs en réseau, les munitions à guidage de précision, le système mondial de positionnement (GPS), le système mondial de télécommunication et les véhicules aériens sans pilote16. Ils ont compris que ces outils permettaient aux États-Unis d’obtenir une quantité sans précédent de renseignements à propos des forces adverses et que les renseignements obtenus jouaient un rôle essentiel dans la destruction à venir de ces forces. Par conséquent, les analystes de l’APL ont commencé à chercher des moyens de renverser l’avantage des États-Unis en matière de cueillette d’information17.

Leur recherche a conduit à la mise en place d’un processus comportant deux étapes. D’abord, l’APL a entrepris de se donner des moyens technologiques en acquérant des pièces d’équipement et des systèmes d’armes de pointe. Toutefois, les analystes ont aussi cherché des solutions afin d’empêcher les ennemis dotés d’outils issus de la haute technologie de bénéficier d’une position avantageuse18. Une partie du travail qu’ils ont accompli en ce sens a porté ses fruits en février 1999, lorsque Qiao Liang et Wang Xiangsui, deux colonels de la force aérienne de l’APL, ont publié un livre intitulé La Guerre hors limites.

La thèse des deux auteurs est fondée sur l’idée qu’il n’est pas vraiment utile d’affronter directement l’excellence opérationnelle des États-Unis au champ de bataille. Il fallait donc cesser de mener des guerres conventionnelles pour résoudre les conflits. Les auteurs soutiennent que pour y parvenir, il faut élargir l’idée que nous nous faisons des conflits et mettre à profit divers éléments de la puissance nationale. Selon eux, les progrès accomplis dans le domaine de la technologie et des armes, la mondialisation et la diffusion du pouvoir étatique avaient dans leur ensemble mis en place les conditions propices à la création d’une nouvelle forme de guerre19. Ils avancent également que les personnes qui ont participé à la planification et à la conduite de la guerre ont généralement cru que les domaines non militaires étaient tout au plus des accessoires permettant de répondre à des besoins d’ordre militaire. Par conséquent, l’évolution vers le champ de bataille moderne et la possibilité d’apporter des changements sur les plans de la stratégie et de la tactique ont été limitées au domaine militaire20.

China Daily Information Corp. – CDIC/Reuters RTS5KEB

Nouvelles recrues de l’Armée de libération populaire chinoise, à l’entraînement en campagne.

Les auteurs ont compris que pour élaborer une stratégie se rapportant à un certain nombre de domaines, un pays aurait besoin de pouvoir compter sur une combinaison complexe de renseignements et de ressources. Au cours de la première étape du processus, ce pays allait devoir prendre les moyens nécessaires pour connaître à fond les points forts et les limites de ses capacités sur le plan de la sécurité nationale. Armé de ce savoir, il serait en mesure de superposer les « facteurs politiques et militaires à l’économie, à la culture, aux relations étrangères, à la technologie, à l’environnement, aux ressources naturelles, aux nations et à d’autres paramètres pour en tirer un “domaine élargi”21 » [TCO]. Une fois qu’un pays aurait répondu aux besoins stratégiques (ressources) pour ce « domaine élargi », il serait capable de créer le « champ de bataille des champs de bataille ».

En théorie, la création du champ de bataille des champs de bataille allait permettre de réduire l’incidence d’une supériorité dans un champ de bataille (militaire) donné en forçant l’adversaire à combattre simultanément dans de nombreux champs de bataille22. Les auteurs ont résumé leur concept comme étant « la guerre combinée hors limites sur le mode latéral-frontal23 ». Un pilier essentiel de ce concept est l’exploitation des avantages que procure la « combinaison » de types d’organisations et de divers domaines de la puissance nationale24.

À ce regard, les auteurs soutiennent que le secret de la victoire dans le champ de bataille des champs de bataille consistait à comprendre et à coordonner l’emploi efficace de quatre types précis de combinaisons : la combinaison supra-étatique (combinaison d’organisations nationales, internationales et non étatiques dans l’intérêt d’un pays), la combinaison hors domaines (combinaison de champs de bataille et choix du domaine principal), la combinaison hors moyens (combinaison de tous les moyens, militaires et non militaires, dont le pays dispose pour mener ses opérations) et la combinaison hors degrés (combinaison de tous les niveaux du conflit dans chaque campagne25.

Le concept des combinaisons repose sur l’application des huit principes suivants :

  • Omnidirectionnalité;
  • Synchronie;
  • Objectifs limités;
  • Moyens illimités;
  • Déséquilibre;
  • Consommation minimale;
  • Coordination omnidimensionnelle;
  • Contrôle du processus entier.

Damir Sagolj/Reuters RTX1QV1G

Des soldats de l’ALP sur des véhicules blindés équipés d’artillerie antiaérienne, sur la place Tiananmen, à Beijing, le 3 septembre 2015.

Trois de ces principes sont d’un intérêt particulier pour les Occidentaux désireux de comprendre le concept de la guerre hybride menée par un État : omnidirectionnalité, synchronie et déséquilibre26.

Omnidirectionnalité « L’omnidirectionnalité est le point de départ de l’idéologie de la guerre hors limites. […] la distinction entre champ de bataille et non-champ de bataille n’existe plus. Les espaces naturels que sont la terre, la mer, l’air et l’espace sont des champs de bataille; les espaces sociaux que sont les domaines militaire, politique, économique, culturel et psychologique sont des champs de bataille; et l’espace technique qui relie ces deux grands espaces est plus encore le champ de bataille où l’affrontement entre les forces antagoniques est le plus acharné. La guerre peut être militaire, paramilitaire ou non militaire; elle peut recourir à la violence et peut aussi être non violente27 ».

Synchronie Il s’agit de « [m]ener des actions dans la même période de temps dans des espaces différents. […] De nombreux objectifs qui étaient autrefois réalisés par étapes, au moyen de campagnes et de combats successifs, peuvent être de nos jours atteints rapidement, dès qu’ont été posés comme conditions l’accès simultané, l’exécution simultanée et l’achèvement simultané. Désormais, l’accent porte plutôt sur la synchronie des opérations que sur leur phasage28 ».

Déséquilibre« […] Que ce soit en tant qu’idée ou en tant que principe de direction des opérations, le déséquilibre peut se manifester dans tous les aspects de la guerre. À condition de maîtriser et d’utiliser correctement le principe de déséquilibre, on réussit toujours à trouver et à exploiter les points faibles de l’ennemi. Lorsque des pays pauvres, de faible puissance militaire, ainsi que des entités guerrières non étatiques résistent à des puissances supérieures […] il n’est pas d’exemple où ces combattants n’emploient la tactique du déséquilibre asymétrique, de la «souris qui joue avec le chat». La sagesse leur commande de refuser systématiquement le face-à-face brutal avec les armées des grandes puissances et d’utiliser au contraire, pour leur tenir tête, les diverses formes de combat que sont la guérilla (principalement urbaine), la guerre terroriste, la guerre sainte, la guerre prolongée et la guerre des réseaux29 ».

Ce qu’il faut retenir de l’idée des combinaisons reposant sur les principes décrits est qu’il n’y a plus de distinction entre ce qui est un champ de bataille et ce qui ne l’est pas. En plus des champs de bataille traditionnels, normalement associés aux opérations militaires (aériennes, terrestres, maritimes, cybernétiques et spatiales), tout peut désormais être considéré comme un champ de bataille, que ce soit le domaine politique, économique, culturel ou psychologique. La caractéristique essentielle de ce type de guerre est la capacité de mener, de coordonner et de synchroniser des actions dans ces divers espaces de bataille, qui peuvent et, dans bien des circonstances, qui devraient se dérouler simultanément30.

Les auteurs avancent l’idée que dans l’histoire, « toutes les victoires aient présenté la même caractéristique, celle d’avoir été remportées par des hommes qui étaient passés maîtres dans l’art de la combinaison des forces »31. Pour faire valoir l’idée de la combinaison d’activités à l’intérieur de multiples champs de bataille, ils présentent le concept de la « simultanéité » et expliquent que celle-ci allait jouer un rôle de plus en plus important dans les opérations futures32. Ils soutiennent qu’un État qui mènerait une seule action synchronisée sur toute la profondeur du front parviendrait à paralyser l’ennemi et à décider du sort d’une guerre33. Les auteurs donnent un exemple permettant de comprendre le déroulement d’une telle action selon le concept des combinaisons :

« […] avec l’art combinatoire, on obtiendra sans doute un tout autre tableau et un tout autre dénouement. Par exemple : alors que l’ennemi ne s’y attend pas du tout, l’assaillant mobilisera secrètement une masse de capitaux et lancera une attaque surprise contre des marchés financiers; après avoir provoqué une crise financière, il opérera une attaque de ses réseaux grâce à des virus implantés à l’avance dans les systèmes informatiques de l’adversaire et à l’intervention d’équipes de pirates informatiques. Il provoquera ainsi l’effondrement total du réseau électrique civil, du réseau de régulation de transports, du réseau de transactions boursières, des réseaux de télécommunications et des réseaux médiatiques, déclenchant une panique sociale, des troubles civils et une crise gouvernementale. Pour finir, une puissante armée massée aux frontières augmentera progressivement l’emploi des moyens militaires jusqu’à acculer l’ennemi à signer un traité sous la contrainte34 ».

Dans leur analyse, Liang et Xiangsui avancent l’idée qu’il faille se préparer à cette forme de conflit et mener les activités particulières qui y sont liées bien avant la déclaration officielle d’une guerre. Ils constatent aussi que le centre de gravité est axé sur le déclenchement d’une panique sociale menant à une crise gouvernementale. Une fois que la crise est bien amorcée, il serait permis d’avoir recours à la force militaire conventionnelle, mais seulement dans la mesure requise pour obtenir la victoire.

Reuters/Alamy Stock Photo G8X0G8

Des marins de l’ALP s’alignent sur les ponts à bord de la frégate Hengshui alors qu’elle arrive à Pearl Harbour pour participer à l’exercice multinational Rimpac, le 29 juin 2016.

Dans la présentation de leur approche asymétrique, les auteurs concluent qu’il faudrait appliquer le principe du déséquilibre, qui est au cœur de la guerre hors limites, pour trouver et exploiter les points faibles de l’ennemi. Ils soutiennent que les pays pauvres, les pays de faible puissance, et les entités non étatiques ont tous employé des méthodes de combat asymétriques contre des adversaires beaucoup plus puissants qu’eux pour rendre les règles du jeu équitables. Ainsi, s’il veut assurer sa victoire, un pays qui affronte un ennemi bénéficiant de la supériorité technologique doit se sortir du concept de la guerre vue comme une série d’opérations purement militaires, pour lui donner un sens beaucoup plus large, qui englobe notamment la guerre financière, culturelle, médiatique, technologique, psychologique ou réseaucentrique35. En employant de telles méthodes, un pays ou une entité non étatique pourraient réduire au minimum l’incidence de la supériorité technologique de l’ennemi, de même que de la puissance de combat accrue dont bénéficient les forces militaires conventionnelles dotées d’une telle supériorité. L’ennemi pourrait alors être forcé à mener le type de guerre que ce pays a choisi, de façon que, si tout se passe bien, les combats se dérouleront dans un certain nombre de champs de bataille différents de ceux qui ont été utilisés dans le passé et plus complexes. Il est intéressant de noter que c’est exactement ce que les Russes font en Europe de l’Est à l’heure actuelle.

Il est difficile d’évaluer exactement dans quelle mesure les Russes ont été influencés par la façon dont les Chinois voient la guerre hybride. De toute évidence, les concepts de base sur lesquels reposent les principes énoncés dans La Guerre hors limites, plus précisément la coordination, la synchronie, le « champ de bataille des champs de bataille », la création des conditions propices au déclenchement d’une panique sociale menant à une crise gouvernementale et le recours judicieux à la force militaire, ont tous été mis en application dans de récentes opérations qu’ont menées les Russes. De plus, de hauts fonctionnaires ont exposé ces principes au cours de déclarations publiques sur la façon dont les Russes voient les conflits de l’avenir dans le contexte de la « guerre de nouvelle génération ».

ITAR-TASS/Alamy Stock Photo HPKBX4

Le chef de l’état-major général des forces armées russes, Valery Gerasimov, le 23 février 2017.

La doctrine de la « guerre de nouvelle génération » de la Russie et la guerre de l’avenir36

Le concept de la « guerre de nouvelle génération » élaboré par la Russie a d’abord été présenté au public dans un article publié en février 2013 par le général Valery Gerasimov, chef d’état-major général russe37. Dans son article, Gerasimov expose un certain nombre de principes de base qui sous-tendent la façon qu’a la Russie de voir le recours à une guerre moderne ou hybride. Le premier principe mentionné est que le monde est actuellement en situation constante de conflit. Gerasimov affirme qu’au cours du XXIe siècle, nous avons pu constater que les lignes qui séparent l’état de guerre et l’état de paix sont de plus en plus souvent brouillées. Il explique que la façon de mener les guerres a changé, qu’il n’y a plus de déclaration de guerre officielle et qu’une fois qu’une guerre a commencé, elle prend une direction nouvelle et inconnue38. Il poursuit son raisonnement pour conclure que ce modèle inconnu renvoie aux opérations asymétriques nécessitant l’emploi d’une myriade de capacités [stratégiques] afin de réduire à néant les avantages dont bénéficie l’ennemi dans un conflit armé39.

Gerasimov estime que la mise en œuvre des capacités particulières requises pour générer un changement passe par l’emploi de forces spéciales entrant en contact avec des groupes d’opposition internes dans le pays ciblé, afin de créer un front opérationnel qui s’étend sur toute la profondeur du territoire occupé par l’ennemi. Une telle action doit être combinée à des opérations d’information, à la cyberguerre, à la guerre réglementaire, à la guerre financière et à toutes les autres activités qui sont directement liées au résultat stratégique attendu. Gerasimov fait remarquer que toutes les activités devraient être choisies au départ, puis constamment modifiées en fonction de besoins précis découlant d’une situation qui évolue40.

Selon les Russes, l’emploi de telles approches de la guerre dans le bon ordre peut très rapidement faire plonger un État stable et prospère dans la toile du chaos, des bouleversements humanitaires et même d’une guerre civile, et le rendre vulnérable aux interventions de pays étrangers41. Gerasimov reconnaît que les approches susmentionnées ne s’inscrivent pas dans ce qui aurait été considéré dans le passé comme des activités de temps de guerre, mais il estime qu’elles deviendront une caractéristique des conflits du XXIe siècle.

L’idée de causer l’effondrement d’un État de l’intérieur par les troubles sociaux, même avant une déclaration de guerre, est un élément important de la méthode qui sous-tend la conduite de la « guerre de nouvelle génération ». À cet égard, Gerasimov pose comme hypothèse que les « règles de la guerre » mêmes aient changé, car les méthodes appliquées pour gérer les conflits sont désormais axées sur l’utilisation générale de mesures politiques, économiques, informationnelles ou humanitaires et d’autres mesures non militaires – en fonction de la perspective des mouvements de protestation de la population42. Pour illustrer son propos, il donne l’exemple du rôle qu’a joué l’OTAN en Libye, où l’établissement d’une zone d’interdiction aérienne et l’imposition d’un blocus naval ont été combinés avec l’embauche d’entrepreneurs militaires du secteur privé qui devaient travailler en étroite collaboration avec les formations armées de l’opposition43.

Photo du MDN RE2011-M089-004, par le caporal Mathieu St-Amour

Un CF-18 Hornet décolle au crépuscule pour aller exécuter une mission pendant l’opération Mobile, à Trapani (Italie), le 21 août 2011.

Gerasimov comprend aussi que l’arrivée des nouvelles technologies de l’information explique en grande partie ce changement. Par conséquent, l’espace informationnel a ouvert la porte à l’emploi généralisé de moyens asymétriques permettant de réduire le potentiel de combat de l’ennemi, particulièrement le recours à des opérations d’influence44.

Jānis Bērziņš, directeur général du Centre de recherche en sécurité et de recherche stratégique (Center for Security and Strategic Research) de l’École nationale de la défense de la Lettonie (National Defence Academy of Latvia), fait valoir ce point de vue. Il soutient que les Russes ont placé le concept des opérations d’influence tout au centre de la planification de leurs opérations et qu’ils ont utilisé tous les leviers possibles de leur puissance nationale pour y parvenir45. Il ajoute que ces leviers incluent l’emploi ingénieux de moyens de communication interne, d’opérations de déception et d’opérations psychologiques ainsi que la transmission de communications externes méthodiques46. Bērziņš explique que les Russes ont su comprendre intuitivement les groupes importants qu’ils ciblaient et anticiper leurs comportements, et qu’à la lumière de l’information dont ils disposaient, ils savaient quoi faire, à quel moment le faire et à quels résultats ils pouvaient s’attendre47.

ITAR-TASS/Alamy Stock Photo HNT62R

Un équipage de char T-72B1 des troupes aéroportées russes de la 83e Brigade d’assaut aérien de la garde, pendant un exercice dans le territoire de Primorié, en Russie, le 16 février 2017.

Les Russes estiment que les nouvelles méthodes employées dans les conflits ont eu pour effet de réduire la participation de grandes formations militaires classiques à des engagements sur le front et que ce type d’engagement devrait graduellement devenir une chose du passé. Ils y croient, car ils savent que même s’ils devaient mener des opérations classiques pour anéantir l’ennemi, leurs opérations seraient principalement menées à distance de sécurité (c.-à-d. tirs indirects ou de précision), dans toute la profondeur de leur territoire48. Les Russes ont l’impression que la tendance à utiliser l’approche de la guerre irrégulière et des opérations à distance de sécurité brouille les lignes qui séparent les niveaux stratégique, opérationnel et tactique, de même que les opérations offensives et défensives49.

Cette conception des conflits futurs a été explicitement présentée sous la forme de ce qui est désormais connu comme les huit phases de la « guerre de nouvelle génération ». La description de ces phases permet de comprendre la façon dont les Russes mèneraient une guerre hybride dirigée par l’État. Les huit phases sont les suivantes :

Première phase : guerre asymétrique non militaire (englobe la prise de mesures liées à l’information, au moral et aux aspects psychologiques, idéologiques, diplomatiques et économiques qui s’inscrivent dans un projet mené en vue d’établir des conditions favorables sur les plans politique, économique et militaire);

Deuxième phase : opérations spéciales [particulières] destinées à induire en erreur les dirigeants politiques et militaires, qui passent par la prise de mesures coordonnées fondées sur des voies diplomatiques, les médias et le recours à des agences gouvernementales et militaires de haut niveau, soit la divulgation de fausses données, de faux ordres, de fausses directives et de fausses instructions;

Troisième phase : intimidation, déception et corruption des autorités gouvernementales et des officiers militaires en vue de les inciter à abandonner leurs fonctions;

Quatrième phase : recours à de la propagande déstabilisante afin d’exacerber le mécontentement de la population, dont les effets sont accentués avec l’arrivée de bandes de militants russes qui renforcent la subversion;

Cinquième phase : établissement de zones d’interdiction aérienne au-dessus du pays à attaquer, imposition de blocus et vaste utilisation de compagnies militaires privées en coopération étroite avec des unités d’opposition armées;

Sixième phase : amorce d’actions militaires, qui suivent immédiatement des opérations de reconnaissance et des missions subversives de grande envergure. Ces actions sont de tous les types, prennent toutes les formes et reposent sur l’emploi de tous les moyens et de tous les types de forces, par exemple les forces d’opérations spéciales, l’espace, la radio, la radiotechnique, l’électronique, la diplomatie, le renseignement des services secrets et l’espionnage industriel;

Septième phase : utilisation combinée d’opérations d’information ciblées, d’opérations de guerre électronique, d’opérations aérospatiales, de harcèlement continu de la force aérienne, avec l’emploi d’armes de haute précision lancées à partir de plateformes diverses (artillerie à longue portée et armes fondées sur de nouveaux principes physiques, comme les micro-ondes, la radiation, les armes biologiques non létales);

Huitième phase : élimination des derniers points de résistance et destruction des unités ennemies restantes, au moyen d’opérations spéciales menées par des unités de reconnaissance chargées de détecter les unités ennemies ayant survécu et d’en transmettre les coordonnées aux unités de missiles et d’artillerie menant l’offensive; tir de barrage afin d’anéantir les unités militaires de défense qui résistent, au moyen d’armes de pointe efficaces; opérations de parachutage afin d’encercler les points de résistance; opérations de nettoyage territorial menées par des troupes terrestres50. [TCO]

ITAR-TASS/Alamy Stock Photo J3AX1A

Des hélicoptères russes de transport lourd et de combat survolent la région de Moscou, le 4 mai 2017.

Ces phases peuvent se succéder ou se dérouler simultanément, selon la situation du moment. Selon Gerasimov, la nouvelle doctrine prend forme dans l’emploi d’approches asymétriques et indirectes parallèlement à la gestion des troupes dans une sphère informationnelle unifiée51. Si le conflit devait s’envenimer, ces mesures seraient suivies par le recours massif à des armes de grande précision, à des forces opérationnelles spéciales et à des systèmes robotisés. Au besoin, l’étape suivante serait d’effectuer des attaques simultanées contre des unités et des installations de l’ennemi, et de mener des combats au sol ainsi que dans l’espace aérien, maritime et informationnel52.

La pensée stratégique et la coordination des outils étatiques

Bien qu’il semble y avoir un certain nombre de similarités entre les principes expliqués dans La Guerre hors limites et la doctrine de la « guerre de nouvelle génération », il est évident que les Russes ont franchi des étapes importantes vers la création du « champ de bataille des champs de bataille ». À moins de pouvoir diriger et coordonner les diverses activités menées dans les différents espaces de bataille d’une manière efficace sur le plan stratégique, il est presque impossible de brouiller les lignes qui séparent les niveaux stratégique, opérationnel et tactique des opérations tout en maintenant une sphère informationnelle unifiée. En fait, certains estiment que cette capacité de synchroniser les activités a constitué le changement le plus important qui est survenu dans les opérations menées récemment par les Russes. Selon, Kristin Ven Bruusgaard, chercheuse universitaire à l’Institut norvégien des études sur la défense, « les experts se sont intéressés aux nouveautés militaires de l’approche des Russes, soit l’emploi d’outils militaires asymétriques, secrets ou d’autres outils novateurs. Toutefois, la vraie nouveauté en Crimée a été non pas la façon dont la Russie a utilisé ses forces armées (au regard de la nouvelle doctrine militaire), mais le fait qu’elle ait combiné les forces armées et les outils étatiques53 » [TCO].

C’est la combinaison novatrice et la coordination des outils étatiques et militaires qui ont permis aux Russes de passer sans difficulté de la paix à la guerre. Il est important, si ce n’est pas considérablement important, de remarquer que les acteurs de la sphère internationale ont été bien peu nombreux à avoir compris ce qui se passait vraiment avant que l’intervention soit presque terminée54. Ven Bruusgaard estime que cette capacité de coordonner l’emploi des outils a été la clé du succès qu’ont jusqu’ici obtenu les Russes. Elle affirme que « [d]epuis que Vladimir Poutine est au pouvoir, les universitaires et les politiciens ont multiplié les débats sur l’emploi coordonné des outils étatiques dans le but d’atteindre des objectifs bien définis. Cette sensibilisation à la nouvelle approche a conduit à l’élaboration à grande échelle de stratégies indiquant les moyens à prendre pour atteindre des objectifs stratégiques et, plus récemment, à l’instauration de changements au sein de l’appareil bureaucratique, qui ont probablement amélioré la capacité de la Russie d’utiliser ses outils stratégiques de manière intégrée.55 » [TCO]

ITAR-TASS/Alamy Stock Photo HX4BTN

À Palmyre (Syrie), des sapeurs du Centre international d’action anti-mines des forces armées russes neutralisent les mines dans les secteurs résidentiels de la ville, le 22 mars 2017.

La création du Centre de coordination de la défense nationale (CCDN), qui a atteint sa capacité opérationnelle initiale en décembre 2014, est l’un des plus importants changements apportés à l’appareil bureaucratique. Le CCDN est chargé de coordonner 52 autorités exécutives fédérales et 3 sociétés d’État qui participent à la défense de la Russie, soit les autorités des forces armées, le ministère de l’Intérieur, le Service fédéral de sécurité et le ministère des Situations d’urgence56. Certains pourraient faire valoir que le concept du CCDN renvoie à l’idée qu’ont eue les Chinois de créer le « domaine élargi » en tenant compte de l’information qui est superposée aux intérêts nationaux et aux besoins en matière de sécurité nationale sur la carte de la situation stratégique générale. S’ils ont raison, il faut conclure que les Russes peuvent désormais créer et simultanément coordonner leur version du « champ de bataille des champs de bataille »57. Toutefois, le fait que les Russes aient changé les règles du jeu des conflits s’avère encore plus préoccupant.

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Soldats russes participant à un exercice dans la région de Khatlon (Tadjikistan), le 30 mars 2017.

Conclusion

L’emploi par la Russie de l’approche de la « guerre de nouvelle génération » a permis de valider des théories essentielles de la guerre hybride. Les opérations menées en Ukraine ont montré que les Russes ont habilement déplacé le centre de gravité des conflits du niveau opérationnel, où des forces militaires classiques jouent un rôle de premier plan, au domaine stratégique, où la combinaison de la planification stratégique et de la coordination des outils étatiques devient le dénominateur essentiel.

L’efficacité dévastatrice de cette forme de guerre se voit au sein de l’OTAN de nos jours. En effet, plus de deux ans après l’annexion de la Crimée, les pays de l’Alliance n’ont toujours pas élaboré une stratégie cohérente qui permettrait de contrer les activités liées à la guerre hybride que mène la Russie en Ukraine. Certains membres de l’OTAN craignent qu’une telle inaction soit le signe de l’affaiblissement de la détermination de l’OTAN à jouer son rôle de protection, tandis que d’autres ont ouvertement mis en doute la capacité de l’OTAN à affronter les Russes.

Étant en mesure d’assurer le succès de ses opérations lorsqu’elle applique la doctrine de la « guerre de nouvelle génération », la Russie continuera de la perfectionner et de l’appliquer pour atteindre ses objectifs stratégiques. En outre, elle deviendra de plus en plus efficace au fil du temps, car l’expérience lui permettra de mettre au point le processus et la réaction. S’il souhaite être en mesure de contrer les adversaires qui mènent ce type de guerre, le Canada doit comprendre ce qu’ils cherchent à accomplir et les moyens dont ils disposent pour atteindre leurs objectifs. Surtout, il doit élaborer une stratégie efficace pour contrer leurs capacités polyvalentes. À cet égard, nous ne pouvons plus nous contenter des solutions classiques pour résoudre des problèmes non conventionnels, comme nous l’avons fait dans le passé.

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Le commandant séparatiste russe Mikhaïl Tolstykh, dont le nom de guerre est « Givi », marche près de chars prenant leur position, non loin de l’aéroport international Sergei Prokofiev, pendant des combats contre des forces ukrainiennes, à Donetsk (Ukraine), le 4 octobre 2014.

Notes

  1. Jānis Bērziņš, Russia’s New Generation Warfare in Ukraine : Implications for Latvian Defense Policy, École nationale de la défense de la Lettonie, Centre de recherche en sécurité et de recherche stratégique, Policy Paper 2, 6 avril 2014, p. 4. Nota : La plupart des militaires qui ont participé à l’opération provenaient de commandos de l’infanterie de marine, de commandos aéroportés et de commandos du Spetsnaz.
  2. Ibid.
  3. Nota : La « guerre de nouvelle génération » a aussi été appelée la « guerre hybride », la « guerre de la prochaine génération » et la « guerre non linéaire » selon la doctrine de la guerre ambiguë de Gerasimow.
  4. Francis G. Hoffman, Conflict in the 21st Century : The Rise of Hybrid Wars, Arlington, Virginie, Potomac Institute for Policy Studies, 2007, p. 28, à l’adresse http://www.projectwhitehorse.com/pdfs/HybridWar_0108.pdf. Document consulté le 1er mai 2015. Nota : Au moment où il a rédigé son article, Hoffman était au service de l’Institut Potomac et travaillait pour le Corps des Marines.
  5. Ibid, p. 29. Nota : Hoffman a modifié sa définition au fil des ans.
  6. Ibid, p. 14.
  7. Ibid, p. 28.
  8. Ibid. Nota : Hoffman dit : « Dans de tels conflits, les futurs adversaires (État, groupes financés par un État ou acteurs qui s’autofinancent) exploiteront l’accès à des capacités militaires modernes, y compris des systèmes de commandement chiffrés, des missiles air-sol portables et d’autres systèmes létaux modernes, et donneront une impulsion à des insurrections de longue durée soutenues par des embuscades, l’emploi de dispositifs explosifs de circonstance (IED) et des assassinats coercitifs. Les États pourraient combiner l’emploi de capacités issues de la haute technologie, comme les armes antisatellites, à des actes terroristes et à la cyberguerre contre des cibles financières. » [TCO]
  9. Ibid.
  10. Ibid, p. 14.
  11. Ibid, p. 29. Nota : selon Hoffman, ces éléments seraient normalement employés pour prolonger le conflit, susciter les réactions excessives ou drainer les ressources de l’ennemi.
  12. J. Paul de B. Taillon, Ph. D., Russian Strategic Methodology in the Ukraine Crisis : Back to the Future, à l’adresse http://mackenzieinstitute.com/russian-strategic-methodology-ukraine-crisis-back-future/. Document consulté le 7 août 2016. Nota : Certains analystes ont conclu que les actions des Russes ne sont rien d’autre qu’une variante des approches classiques adoptées par l’Union soviétique. Dans l’histoire, l’application de telles approches passait par l’emploi de manœuvres subversives et de déstabilisation et d’autres « mesures actives » parallèlement à la mise à contribution de forces spéciales et de mandataires afin d’obtenir les résultats voulus sur le plan politique. Selon Taillon, « l’art de la guerre politique a pour ainsi dire été oublié dans la foulée de l’effondrement de l’Union soviétique. Appelé “mesures actives” (aktivinyye meropriatia) par les adeptes et les praticiens soviétiques et russes, cet art a été largement exercé tout au long de la Guerre froide. L’Union soviétique appliquait des mesures actives pour modifier des situations politiques à son avantage, c’est-à-dire qu’elle mettait à profit des théories du complot, la désinformation et la propagande pour salir et miner la réputation d’un adversaire donné. Elle a dans certains cas eu recours à des actes ciblés de terrorisme et de violence orchestrés par des agents du renseignement, des saboteurs et des agents spéciaux qui cherchaient à modifier le cours des événements par l’emploi de la violence. »
  13. Keir Giles, Russia’s « New » Tools for Confronting the West Continuity and Innovation in Moscow’s Exercise of Power, Russia and Eurasia Programme, 21 mars 2016, p. 2, à l’adresse https://www.chathamhouse.org/sites/files/chathamhouse/publications/research/2016-03-21-russias-new-tools-giles.pdf. Document consulté le 14 juin 2016.
  14. Xiabing Li, A History of the Modern Chinese Army, Lexington, Kentucky, University Press of Kentucky, juin 2007, p. 271.
  15. Dean Cheng, Chinese Lessons From The Gulf Wars, dans Chinese Lessons from Other Peoples’ Wars, Andrew Scobell, David Lai et Roy Kamphausen (ed.), Strategic Studies Institute, U.S. Army War College, 2011, p. 159.
  16. Ibid.
  17. Ibid.
  18. Ibid.
  19. Dean Cheng « Unrestricted Warfare : Review Essay II », Small Wars & Insurgencies, printemps 2000, p. 123, à l’adresse http://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/09592310008423266?journalCode=fswi20&. Document consulté le 3 mai 2015.
  20. Ibid, p. 189.
  21. Ibid, p. 118. Nota : Les intérêts nationaux et les besoins en matière de sécurité nationale figurent donc sur la carte de la situation stratégique générale.
  22. Qiao Liang et Wang Xiangsui, La Guerre hors limites, Paris, Payot & Rivages, 2006, à l’adresse http://www.c4i.org/unrestricted.pdf [version anglaise], document consulté le 1er mai 2015.
  23. Ibid, p. 252.
  24. Ibid.
  25. Major John A. Van Messel, USMC, Unrestricted Warfare : A Chinese doctrine for future warfare?, à l’adresse http://www.dtic.mil/dtic/tr/fulltext/u2/a509132.pdf, p. 7. Nota : L’auteur donne un bon aperçu des combinaisons et des principes.
  26. Qiao Liang et Wang Xiangsui, p. 281.
  27. Ibid, p. 282.
  28. Ibid, p. 283
  29. Ibid, p. 287-288.
  30. Ibid, p. 284.
  31. Ibid, p. 198. Nota : Par « passés maîtres dans l’art de la combinaison des forces », les auteurs veulent dire que les hommes victorieux étaient ceux qui avaient été capables de coordonner et de synchroniser les activités des différentes forces dont ils disposaient pour assurer la victoire.
  32. Ibid.
  33. Ibid, p. 284.
  34. Ibid, p. 205-206.
  35. Ibid, p. 38-43.
  36. Nota : la présente section a été publiée une première fois par le Mackenzie Institute. Tony Balasevicius, « Russia’s “New Generation War” and Its Implications for the Arctic », à l’adresse http://mackenzieinstitute.com/russias-new-generation-war-implications-arctic/#reference-3. Document consulté le 24 juillet 2016.
  37. Mark Galeotti, The « Gerasimov Doctrine » and Russian Non-Linear War, blogue publié dans « Moscow’s Shadows », à l’adresse https://inmoscowsshadows.wordpress.com/2014/07/06. Document consulté le 1er mai 2015. Nota : L’article a d’abord été publié dans le Federation Military-Industrial Kurier, le 27 février 2013. Document consulté le 10 mai 2015. Nota : Bon nombre des spécialistes de la Russie estiment que l’article pourrait avoir été rédigé par quelqu’un d’autre. De plus, le même exposé a été présenté par le chef d’état-major général russe, Army General Valeriy Gerasimov, en janvier 2013, au cours de l’assemblée annuelle de l’École russe des sciences militaires (Russian Academy of Military Sciences). Des éléments essentiels de la doctrine de Gerasimov ont depuis été intégrés à la nouvelle version de la doctrine militaire russe, tel qu’ils ont été approuvés en décembre 2014.
  38. Ibid.
  39. Ibid. Nota : Il faut remarquer qu’il s’agit du thème sous-jacent de La Guerre hors limites.
  40. Ibid. Nota : Il s’agit de l’élaboration de l’idée du « champ de bataille des champs de bataille ».
  41. Col. S.G. Chekinov (Rés.) et Lt. Gen. S.A. Bogdanov (ret.), « The Nature and Content of a New-Generation War », Military Thought : A Russian Journal of Military Theory and Strategy, p. 13. Article publié en ligne à l’adresse http://www.eastviewpress.com/Files/MT_FROM%20THE%20CURRENT%20
    ISSUE_No.4_2013.pdf
    . Document consulté le 5 juillet 2015.
  42. Ibid.
  43. Galeotti.
  44. Ibid.
  45. Bērziņš, p. 6.
  46. Ibid.
  47. Ibid.
  48. Chekinov et Bogdanov. p. 13.
  49. Galeotti.
  50. Tchekinov et Bogdanov, extrait tiré de Janis Berzins, Russia’s New Generation Warfare in Ukraine : Implications for Latvian Defense Policy, Policy Paper 2, Centre de recherche en sécurité et de recherche stratégique (Center for Security and Strategic Research), École nationale de la défense de la Lettonie (National Defence Academy of Latvia), 6 avril 2014.
  51. Ibid.
  52. Ibid.
  53. Kristin Ven Bruusgaard, « Crimea and Russia’s Strategic Overhaul », dans Parameters, vol. 44, no 3, 2014, p. 81-90, à l’adresse http://www.strategicstudiesinstitute.army.mil/pubs/parameters/issues/Autumn_2014/
    11_BruusgaardKristin_Crimea%20and%20Russia’s%20Strategic%20Overhaul.pdf
    . Document consulté le 15 juin 2015.
  54. Ibid, p. 89.
  55. Ibid, p. 86.
  56. « What Is the Russia’s National Defense Control Center? How It Works? », à l’adresse https://southfront.org/russias-national-defense-control-center-works/. Document consulté le 1er septembre 2016. Nota : publié une première fois à Rusplt, l’article a été traduit par Mikhail Alexandrovich exclusivement pour SouthFront.
  57. Ibid, p. 118.