AFGHANISTAN

Un soldat canadien de l’Équipe provinciale de reconstruction de Kandahar (EPRK) patrouille parmi des arbres en fleurs dans le district de Panjwayi en Afghanistan.

Photo du MDN AR2008-Z139-20 par le caporal Simon Duchesne

Un soldat canadien de l’Équipe provinciale de reconstruction de Kandahar (EPRK) patrouille parmi des arbres en fleurs dans le district de Panjwayi en Afghanistan.

Désapprendre la guerre en Afghanistan

par Bob Martyn

Le major Bob Martyn, CD, Ph. D., est un officier d’infanterie de la Réserve. Il a été en déploiement durant un an dans le cadre de missions de la Roto 1 de l’ONU en Bosnie et au Kosovo et a vécu une affectation de dix mois en Afghanistan. À titre d’universitaire civil, le major Martyn est associé à l’Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans et au Centre for International and Defence Policy, tous deux situés à l’Université Queen’s, à Kingston.

Le climat de paix que nous croyons vivre n’est qu’un intermède avant un autre cycle de conflit. [TCO]

~Robert Kaplan, The Coming Anarchy, 20001

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Introduction

En rétrospective, les propos de M. Robert Kaplan, correspondant à l’étranger et journaliste américain reconnu, qui ont été publiés au moment où les Forces armées canadiennes (FAC) mettaient fin progressivement à l’opération la plus importante dans les Balkans, plus précisément en Bosnie et au Kosovo, avant de se rendre en Afghanistan, ont réellement été avant-coureurs de ce que l’on a vécu par la suite. À l’heure actuelle, alors que les pays occidentaux pensent à la suite des opérations de combat en Iraq et en Afghanistan, des questions surviennent sur la reconstitution de nos forces militaires. Il ne s’agit pas précisément d’une nouvelle pratique : en temps de paix, les armées doivent traditionnellement composer avec des restrictions budgétaires et des réductions des effectifs, les sociétés se « démilitarisent » étant donné que les citoyens revendiquent les « dividendes de la paix » difficiles à atteindre, et les leaders militaires ainsi que les penseurs stratégiques réfléchissent sur les leçons à tirer du conflit afin de trouver la voie à suivre. Il est facile d’en constater les manifestations au Canada, où les reportages médiatiques sur le domaine militaire se font de plus en plus rares, à l’exception des critiques à l’endroit du gouvernement au sujet de l’acquisition d’aéronefs et de navires, ou de certaines allégations concernant Anciens combattants. Alors, qu’est-ce qui attend les Forces armées canadiennes? La situation économique et la politique gouvernementale dicteront bon nombre de nos décisions, mais nous devrons tout de même faire certains choix. Le présent article suggère une voie à suivre dans laquelle nous ne serons pas trop restreints par nos expériences en Afghanistan.

Dans plusieurs revues militaires et sites Web américains, on se questionne sans cesse à savoir si l’on doit mettre l’accent sur une force optimisée en vue de la contre-insurrection (COIN) ou axée sur les compétences de combat conventionnelles et traditionnelles. En raison du nombre important d’anciens combattants des FAC qui ont servi en Afghanistan, ce débat trouve écho chez nos voisins du sud. L’article de M. Andrew J. Bacevich, professeur en relations internationales de l’Université de Boston, intitulé « The Petraeus Doctrine », dans lequel l’auteur décrit le point de vue des deux camps qu’il désigne comme les « militants » et les « conservateurs »2, a été l’élément déclencheur. En termes simples, les militants croient que le plus grand danger est causé par l’instabilité politique à l’étranger, et non par une menace militaire donnée. Ainsi, l’ingénierie sociale donne à croire que l’établissement de démocraties de type occidental constitue la clé pour apaiser les populations étrangères indisciplinées. À l’inverse, les conservateurs, bien qu’ils acceptent le fait que les zones non gouvernées posent problème, sont d’avis que la réorganisation de la force militaire en une force policière enliserait tout simplement l’Amérique dans une génération de guerres sans issue, au lieu de se préparer à faire face à des menaces conventionnelles continues, notamment celles provenant potentiellement de la Corée du Nord, de l’Iraq ou de la Chine.

Nous reconnaissons que cet article mettra presque entièrement l’accent sur la composante (les éléments) terrestre(s). Cela s’explique naturellement par le fait que l’Armée de terre est la principale intéressée lorsque l’on songe au débat entre les opérations de COIN en cours et les guerres conventionnelles, alors que la Force aérienne poursuit son combat lié aux aéronefs F-35 et que la Marine est aux prises avec la Stratégie nationale d’approvisionnement en matière de construction navale – deux dossiers optimisés d’une certaine façon pour les conflits conventionnels. En plus de ces questions d’approvisionnement, les opérations de combat de ces deux armées dans le cadre de l’opération Mobile en Libye sont la preuve du maintien de l’accent sur la guerre conventionnelle3. Ainsi, après ce préambule, jetons un coup d’œil sur notre expérience en Afghanistan. La situation est peu reluisante.

L’Afghanistan

L’Afghanistan a presque toujours été en conflit. Comme bon nombre d’entre nous le savons, les Afghans sont des gens fiers et durs. Pendant des siècles, leur territoire s’est avéré d’une importance géostratégique, situé à cheval sur les routes commerciales et migratoires entre la Perse, la Chine et l’Inde. Aujourd’hui, il s’étend entre l’Iran et le Pakistan et comprend un oléoduc potentiellement rentable dans la région de la mer Caspienne qui se rend jusqu’à la mer d’Oman4. Le peuple afghan a posé problème pour bon nombre de puissants empires, notamment celui d’Alexandre le Grand en 300 avant Jésus-Christ, l’Empire britannique dans le cadre de plusieurs guerres anglo-afghanes entre 1839 et 1919, et l’Union soviétique entre 1979 et 1989.

Des militaires soviétiques se déplaçant en convoi saluent la foule après leur arrivée à Kaboul, en provenance de Jalalabad, ville située plus à l’est, dans le cadre du retrait des troupes soviétiques d’Afghanistan, le 15 mai 1988.

Reuters RTR238JU par STR New

Des militaires soviétiques se déplaçant en convoi saluent la foule après leur arrivée à Kaboul, en provenance de Jalalabad, ville située plus à l’est, dans le cadre du retrait des troupes soviétiques d’Afghanistan, le 15 mai 1988.

Le combat le plus récent en Afghanistan a débuté en octobre 2001 dans le cadre de l’opération Enduring Freedom. La mission a été fructueuse au début puisque les talibans ont été chassés de Kaboul et de la plupart des autres villes d’importance, bien que les leaders d’Al-Qaida et des talibans se soient enfuis au Pakistan – une situation récurrente. Néanmoins, de nombreux observateurs ont rejeté le rôle important qu’a joué l’Alliance du Nord afghane dans la campagne et ont souligné que le recours aux Forces d’opérations spéciales et aux munitions de précision de l’aviation a modifié la nature de la guerre5. Bien que l’Iraq et l’Afghanistan aient été témoins, pour la première fois, de l’arrivée massive de forces d’opérations spéciales qui devaient repérer des objectifs de grande importance et « chasser les missiles Scud », la tactique ne s’est pas révélée être la révolution menant à la victoire promise par ses partisans.

En raison de l’absence de mandat de l’ONU pour intervenir en Iraq, et peut-être aussi parce qu’il croyait que le renseignement américain sur le programme d’armes de destruction massive (ADM) était quelque peu circonstanciel, le gouvernement Chrétien a choisi de se concentrer sur l’Afghanistan6. La mission qui, au départ, consistait à assurer la sécurité à Kaboul et dans les environs, dans le cadre de l’opération Enduring Freedom menée par les Américains ou de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) menée par l’OTAN, a largement évolué de façon à viser l’ensemble du pays7.

Les forces conventionnelles canadiennes sont arrivées en Afghanistan en 2002 sous l’égide de l’Accord de Bonn sanctionné par les Nations Unies afin d’assurer la sécurité en vue de remettre en place un gouvernement afghan. Durant les années suivantes, les FAC se sont davantage concentrées sur la situation au sud de Kaboul, dans la zone de combat la plus importante de la province de Kandahar.

Dans le cadre de ce processus, selon les membres du Comité permanent de la défense nationale au Parlement, « [l]a Force opérationnelle interarmées en Afghanistan [FOI (Afg)] est la formation la plus apte au combat, la mieux entraînée, la mieux équipée et la mieux dirigée du genre à jamais avoir été déployée par le Canada. Son intervention a été pertinente sur le plan stratégique, efficace sur le plan opérationnel et déterminante sur le plan tactique ». Il ne fait aucun doute qu’au premier coup d’œil, il n’y a pas vraiment matière à argumenter; les troupes canadiennes ont prouvé qu’elles pouvaient réaliser toutes les tâches qui leur étaient confiées et combattre avec honneur et distinction.

L’engagement du Canada a compris le déploiement d’équipes de commandement au niveau de la brigade et de groupements tactiques d’infanterie, appuyés avec compétence par d’autres armes de combat, des services de soutien en matière de logistique et de renseignement et divers intervenants centraux. La Force aérienne a continuellement fourni des aéronefs stratégiques et tactiques à voilure fixe et des aéronefs de patrouille à long rayon d’action (APLRA) maritimes. Par la suite, elle a fourni des aéronefs à voilure tournante et des véhicules aériens sans pilote (UAV), alors que la Marine a participé au combat en effectuant principalement des patrouilles dans le golfe Persique8. Pour la majorité des membres de la Marine et une grande partie des membres de la Force aérienne, la guerre en Afghanistan était essentiellement « une guerre de routine ».

Les rôles de combat habituels de l’Armée de terre se sont accrus pour comprendre des tâches notamment liées à l’Équipe consultative stratégique – Afghanistan (ECS-A) et à l’Équipe provinciale de reconstruction de Kandahar (EPRK). L’ECS-A comptait principalement des officiers militaires qui offraient des conseils politiques sur des sujets tels que l’éducation, la justice et les droits des femmes. Simultanément, l’EPRK visait à faciliter la reconstruction des infrastructures locales au service des citoyens afghans. Il s’agissait de deux tâches essentielles pour contrer une telle instabilité politique. Cependant, était-ce un rôle militaire? Le Canada a depuis longtemps la réputation de favoriser le développement des démocraties étrangères et de les conseiller, principalement par l’entremise du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI) ainsi que du Centre international des droits de la personne et du développement dramatique (CIDPDD), récemment dissout9.

Un soldat russe portant une guirlande serre la main d’un soldat afghan qui a grimpé sur le char d’assaut afin de souhaiter la bienvenue à plus de 1 000 soldats russes de retour de la ville de Jalalabad, à l’est, dans le cadre du retrait des troupes, qui a débuté le 15 mai 1988.

Reuters RTR238JW par STR New

Un soldat russe portant une guirlande serre la main d’un soldat afghan qui a grimpé sur le char d’assaut afin de souhaiter la bienvenue à plus de 1 000 soldats russes de retour de la ville de Jalalabad, à l’est, dans le cadre du retrait des troupes, qui a débuté le 15 mai 1988.

Au cours de la guerre, le Canada a constamment « rehaussé les standards » en matière de troupes et d’équipement. Il a même accéléré l’acquisition imprévue de chars Leopard 2 pour que ces derniers puissent être aptes au combat en 200610. De façon ferme, nous avons reconnu que nous souhaitions donner un visage afghan aux opérations et nous avons mis l’accent sur l’instruction, la reconstruction et la démocratie. Cependant, les tribus afghanes et les talibans avaient autre chose en tête. Par exemple, un aîné d’un village a souligné que le fait de fournir des armes au peuple afghan pour que ce dernier puisse assurer sa propre sécurité n’était pas une idée nouvelle : « Nous avons tenté cette approche durant l’occupation russe […] et lorsque nous avons armé les gens, ils ont joint le camp des insurgés11. » [TCO]

Un char Leopard 2 en mouvement.

Photo du MDN IS2008-9183 par le caporal David Cribb

Un char Leopard 2 en mouvement.

Le Canada a pu exécuter ses missions de la meilleure façon possible vu que ses troupes étaient adéquatement formées en vue de la complexité de la guerre conventionnelle et qu’elles avaient participé à des combats toutes armes dans le cadre d’exercices de grande envergure au Canada, aux États-Unis et en Allemagne. Nos leaders ont acquis des compétences théoriques supérieures au Collège des Forces canadiennes ou à l’occasion d’échanges dans des collèges militaires alliés, qui avaient tous le même objectif : « Se préparer au monde connu par l’instruction, et à l’inconnu par l’éducation. » Ces compétences fondamentales ont été consolidées dans le cadre de récents déploiements de bon nombre de nos troupes dans les Balkans – la Croatie, la Bosnie et le Kosovo – qui nous ont permis de tirer de rudes leçons. Dans l’ensemble, le Canada a mis sur pied une équipe de combat efficace. Cependant, le cœur du problème réside dans la deuxième phrase du Comité permanent de la défense nationale, citée précédemment, qui indique que l’intervention s’est avérée « pertinente sur le plan stratégique, efficace sur le plan opérationnel et déterminante sur le plan tactique ». Durant la majeure partie de la guerre, une partie du problème auquel était confrontée l’Alliance était d’aller de l’avant malgré une stratégie mal définie.

Une stratégie incohérente

En 2001-2002, tout juste après les attaques terroristes du 11 septembre, il était facile de définir des objectifs simples en matière de politique. Cependant, il est rapidement devenu évident que les leaders politiques occidentaux, en particulier les gouvernements de Bush et de Blair, ne comprenaient pas la nature de la guerre et que, par conséquent, ils ne pouvaient pas se rendre compte de la relation réciproque, interactive et souvent imprévisible entre la guerre et la politique12

Les politiques officielles canadiennes relatives au développement faisaient régulièrement l’objet de critiques de la part d’organisations non gouvernementales (ONG) et de bureaucrates. Bien que ces groupes ou personnes soient en faveur des droits de la personne et de la démocratie, leur résistance est causée par l’association négative constante entre la promotion de la démocratie et l’interventionnisme américain13. En d’autres termes, la tendance du MAECI et de l’Agence canadienne de développement international (ACDI) à afficher peu de valeur concrète semble résulter d’un simple antiaméricanisme – les valeurs transmises en grande pompe aux étudiants universitaires de première année qui se donnent le mot pour « se rebeller » uniformément. Le défi du MAECI en est un lié à la crédibilité. En effet, on doit se fier à des jeunes de 26 ans qui viennent d’obtenir leur doctorat, qui n’ont aucune expérience de vie et qui ne savent rien des déploiements à l’étranger14. Il faut toutefois reconnaître que cette généralisation ne s’applique pas à l’ensemble du personnel du MAECI qui a été envoyé en déploiement. Le regretté Glyn Berry, par exemple, faisait partie d’un groupe de politiciens tenus en haute estime qui a contribué à la mission. Le mécontentement concernant l’absence d’objectifs politiques solides et réalisables n’a fait qu’accroître la frustration liée à l’héritage transmis par Lester Pearson. Il ne s’agit pas d’un problème uniquement canadien. C’est précisément ce manque d’orientation stratégique qui a contribué ultérieurement à la démission du General Stanley McChrystal de l’armée américaine à titre de commandant de la FIAS, à la suite de la diffusion de ses propos désobligeants envers les représentants politiques supérieurs américains, y compris le président, dans le magasine Rolling Stone15.

Bien que le General McChrystal et son personnel assument incontestablement le commandement de tous les aspects militaires de la guerre, il n’existe aucun poste équivalent sur le plan diplomatique ou politique. Au lieu de cela, un ensemble de dirigeants administratifs s’affrontent pour obtenir le dossier de l’Afghanistan […] Cette incohérence diplomatique a effectivement […] gêné les efforts visant à mettre sur pied un gouvernement stable et crédible en Afghanistan16. [TCO]

D’un point de vue militaire, plusieurs gouvernements s’efforcent de rédiger une doctrine sur cette « nouvelle » forme de guerre : le Canada a rédigé la publication B-GL-323-004/FP-004, Opérations de contre-insurrection; les États-Unis, le U.S. Army/Marine Corps Counterinsurgency Field Manual; et le Royaume-Uni, la Joint Doc Pub 3-40 Security and Stabilization. Tous ces documents comprennent généralement des chapitres sur la gouvernance, la dimension sociale, l’analyse culturelle ainsi que la construction d’écoles et de puits. M. Hew Strachan, de l’Université Oxford, souligne que ces documents ne sont pas tant de la doctrine qu’un effort de coopération entre les autres ministères que celui de la Défense ainsi que le pays hôte afin de mettre en œuvre les objectifs opérationnels17. [TCO]

L’un des principaux problèmes liés à la rédaction de ces manuels de doctrine – et il s’agit du nœud de l’affaire – c’est que, régulièrement, des conflits non pertinents y sont cités, particulièrement celui des Britanniques en Malaisie et celui des Français en Algérie. Bien qu’il y ait sûrement de la matière à exploiter, ces campagnes concernaient des conflits dont les principaux enjeux n’existent plus. De nos jours, il est improbable que les FAC interviennent au nom d’une puissance impériale dans une guerre de décolonisation contre des insurgés qui cherchent à obtenir leur indépendance, que ce soit en Afghanistan ou dans le cadre de tout autre conflit auquel participent des pays occidentaux. Plusieurs autres conflits cités par les auteurs étaient fondés sur des idéologies dans le contexte du système international bipolaire de la guerre froide. Encore une fois, il s’agit d’une époque révolue.

L’absence d’une doctrine cohérente a été largement compensée par un ensemble d’expressions accrocheuses et d’extraits de politique, notamment « l’apprentissage organisationnel » de M. John Nagl, expert en contre-insurrection (COIN), ou l’expression « viser le mécontentement » de M. Galula. La situation était devenue à ce point incontrôlable que dans un quartier général régional, un officier d’état-major désinvolte distribuait des cartes sur lesquelles étaient indiquées différentes phrases accrocheuses et expressions à la mode. Lorsque ces expressions étaient utilisées dans le cadre de briefings ou de présentations PowerPoint, les militaires biffaient les expressions. Le jeu se terminait lorsqu’un officier enthousiaste murmurait « bingo » un peu trop fort…18

Étant donné que la majorité de la doctrine occidentale était fondée sur les mêmes exemples peu nombreux, l’accent mis sur les programmes visant « le cœur et l’esprit » a parfaitement cadré avec la vague de théoriciens de la COIN du moment – dont Petreaus, Nagl et Killcullen19. Le fait que ces exemples ne concernaient pas des domaines de responsabilité militaire était ignoré ouvertement. Bien que les expressions « pangouvernemental » et

« 3D – diplomatie, défense et développement » soient très accrocheuses, elles avaient besoin d’être soutenues par une stratégie globale. Plusieurs analyses après action ont révélé cette lacune stratégique. « De 2006 à 2009, l’absence d’une stratégie politique internationale cohérente et claire relative à la situation en Afghanistan a malheureusement entraîné ce que la critique a décrit comme une série de campagnes nationales à l’échelle locale en Afghanistan20. » [TCO] Le US Navy SEAL (à la retraite) Reed Kitchen note également ce qui suit :

[…] j’étudiais de près notre ennemi, et j’ai été témoin d’un soulèvement qui se déroulait de la meilleure façon qui soit. J’enviais presque la singularité de son objectif et sa capacité de réussir là où nous échouions […] Il n’y a probablement pas un seul Taliban qui ne sait pas pourquoi il se bat, alors qu’il est probable que des forces américaines en Afghanistan soient incapables d’expliquer l’état final de notre intervention21. [TCO]

Tout n’était pas si déprimant, mais cela semblait souvent relever davantage du hasard que de l’intelligence stratégique. Le US Marine Corps, par exemple, était particulièrement compétent en matière de COIN en Iraq, dans la province d’Al-Anbâr. En se basant sur l’instruction préalable des Marines et la façon dont ils l’ont mise en application en Iraq, il est évident que « […] les Marines n’ont pas opté pour la COIN parce que le concept les enchantait, mais plutôt parce qu’il n’y avait pas d’autre solution pertinente22. » [TCO] Cependant, en l’absence d’un état final clair défini par la victoire, les politiciens et certains de nos propres leaders supérieurs se sont fiés aux paramètres liés à la construction d’école, aux soins de santé et à l’éducation. L’absence d’une société stable et pacifique prouve l’utilité discutable de tels paramètres.

Le président afghan Karzaï prend la parole lors d’une conférence de presse conjointe à la Maison Blanche à Washington, le 11 janvier 2013.

Reuters RTR3CC14 par Larry Downing

Le président afghan Karzaï prend la parole lors d’une conférence de presse conjointe à la Maison Blanche à Washington, le 11 janvier 2013.

L’avenir de l’Afghanistan

Nous avons consenti tellement d’efforts envers le gouvernement Karzaï en présumant à tort que le gouvernement de Kaboul dirigeait les villages que ces efforts ont été vains. Les récentes déclarations médiatiques du président concernant les négociations inéquitables des Américains avec les talibans sonnent tout simplement faux, car le président tente d’accroître son pouvoir et de conserver le soutien occidental le plus longtemps possible. Cela deviendra d’autant plus évident à l’approche des élections nationales en Afghanistan en avril 2014, qui coïncideront également avec le retrait final de la FIAS

La situation s’aggravera inévitablement. En effet, malgré les plaidoyers de M. Karzaï ou de son successeur, l’Afghanistan ne dispose tout simplement pas des ressources économiques nécessaires pour pallier la réduction de l’aide et des dépenses militaires occidentales. Nous avons mis sur pied une armée afghane composée de 13 000 véhicules et qui nécessite des conducteurs, des mécaniciens, des pièces et du carburant. De plus, nous fournissons plus de 31 000 ordinateurs à une armée dont les membres sont analphabètes fonctionnels et offrons de la formation élémentaire en informatique à seulement 2 000 opérateurs23. L’écart entre les besoins et la capacité a largement été comblé par des entrepreneurs. Bien que cela présente un avantage financier pour des militaires de différents pays ayant récemment pris leur retraite, il ne s’agit pas d’une solution à long terme pour tout gouvernement afghan qui prendra la relève.

Contrairement à la situation en Iraq, où la plupart des gens ont condamné l’occupation par la coalition dès le départ, un nombre important d’Afghans ont accepté la présence de la coalition, malgré le fait qu’il soit extrêmement difficile de convaincre une population locale de se ranger du côté des étrangers quand cela va à l’encontre de sa propre culture. Cependant, une série d’incidents, notamment le fait que des exemplaires du Coran aient été brûlés, que des soldats américains aient profané des cadavres talibans, que des civils aient subi de nombreux dommages collatéraux et, plus important encore, que le US Staff Sergeant Bales ait été accusé du meurtre de 16 civils afghans, ont contribué à briser définitivement la confiance de la population24. En fait, nous ignorions la « première loi » de la COIN selon M. David Galula : « Le soutien de la population est aussi vital pour les loyalistes que pour l’insurgé. »25

Le retrait des troupes de la coalition façonne actuellement l’ensemble de la pensée militaire/politique en Afghanistan; personne ne négocie sérieusement, et tout le monde tente d’optimiser son état final. Pour avoir une toute petite chance d’ajouter de la valeur, la mission d’instruction en Afghanistan devrait se poursuivre pendant au moins cinq ans, de même que la coopération en matière de sécurité, mais cette possibilité devient de moins en moins probable chaque semaine. Le nombre de frappes américaines antitalibanes s’est rapidement accru, allant jusqu’à 110 attaques par jour en juin 2012 – le nombre le plus élevé depuis le début de la guerre. En revanche, les compétences et la fiabilité de la Force de sécurité nationale afghane (FSNA) s’amenuisent. Alors que la FSNA prend davantage la tête des opérations et que son taux de pertes croît proportionnellement, le moral des troupes diminue. Cela s’ajoute à son nombre déjà très élevé de désertions, à un tel point qu’ « […] habituellement, ces taux d’attrition élevés gonflent en raison d’épidémies, et ces chiffres dépassent largement le nombre de nouvelles recrues26. »[TCO] Malheureusement, le reste des troupes éveille la méfiance à l’occasion étant donné que récemment, on prétendait que 20 pour 100 des pertes américaines étaient attribuables à la « traîtrise » de la FSNA27.

Nous quittons l’Afghanistan comme nous l’avons trouvé, c’est-à-dire l’un des pays les plus dévastés par la pauvreté, la corruption, la drogue et la violence. L’Afghanistan demeure un narco-État exclu dont la production d’opium représente la part du lion du marché mondial. En 2011, par exemple, la production a augmenté de 61 pour 100, ce qui correspond à plus de 6 400 tonnes. La somme de 1,4 milliard de dollars que rapporte ce trafic permet de soutenir les talibans et les seigneurs de guerre, et le gouvernement ne peut tout simplement pas investir une telle somme dans ses forces de sécurité28. M. Karzaï a refusé le projet d’éradication du pavot en raison de préoccupations environnementales. Dans le cadre d’une enquête sur la corruption, seules la Somalie et la Corée du Nord ont obtenu un résultat inférieur à celui de l’Afghanistan, et ce dernier a obtenu seulement 8 points sur un total de 1 000, selon Transparency International. Un total de 23 pour 100 du PIB de l’Afghanistan est versé en pots-de-vin29. Cette année, une brigade des stupéfiants russe a lancé un coup de filet qui a permis de récupérer près de 21 tonnes d’héroïne et de morphine dans une province frontalière afghane30. Cela représente l’équivalent de la production de toxiques majeurs pour une année, trouvée au cours d’une seule opération, ce qui laisse présager que la situation s’envenime. Dans une société rongée par une telle pauvreté et une telle corruption, nos efforts d’édification d’une nation n’ont réussi au mieux qu’à créer une culture de droit et de dépendance. Il est difficile de mettre en place une saine économie dans ce contexte.

Alors, qu’adviendra-t-il de l’Afghanistan? En termes simples, tant que les talibans peuvent se réfugier au Pakistan – ou ailleurs – nous ne pouvons remporter la victoire, et ils le savent, que nous l’admettions ou pas. Il ne semble y avoir aucune stratégie menant à la fin du conflit, à l’exception de celle visant à « ne pas perdre trop rapidement ». Nous nous dirons que nous leur avons fourni les outils nécessaires pour réussir grâce à nos programmes d’instruction et de mentorat, mais l’issue de la guerre est dans une impasse, et tout le monde ne cherche qu’à agir dans son propre intérêt.

En effet, aux yeux du Canada et de l’alliance occidentale, nous avons perdu. Ce n’est pas plaisant à entendre en pensant aux sacrifices consentis par nos troupes et nos familles ainsi qu’aux conséquences finales sur le peuple afghan que nous avons aidé, mais il n’y a vraiment aucune autre façon de le présenter. Les forces militaires disposent effectivement d’une mine de leçons retenues, ce qui fait que nous pourrions faire mieux la prochaine fois. Cependant, il y a une leçon que nous n’avons pas retenue : nous nous souvenons peu du passé, particulièrement en ce qui concerne ce type de guerre. En 1969, M. Henry Kissinger a commenté la stratégie du General Westmoreland liée à la situation au Vietnam :

Les Nord-viêtnamiens et les Viêt-congs, combattant pour leur propre pays, devaient simplement demeurer suffisamment puissants pour dominer la population après que les États-Unis se sont retirés de la guerre. Nous avons combattu dans le cadre d’une guerre militaire; nos ennemis ont combattu dans le cadre d’une guerre politique. Nous visions une attrition physique; nos ennemis visaient l’épuisement psychologique. Durant le processus, nous avons oublié l’une des maximes essentielles sur la guérilla : la guérilla gagne si elle ne perd pas; l’armée conventionnelle perd si elle ne gagne pas31. [TCO]

Comme le décrit Mme Celeste Ward, analyste de RAND, la situation est la suivante : « […] ce dont nous avons besoin, à des fins stratégiques, c’est de créer la perception que nous ne nous sommes pas enfuis32. » [TCO] Le présent article abordera maintenant la voie à suivre en énonçant certaines nécessités militaires dans le cadre des tendances mondiales, des perspectives canadiennes précises et certaines recommandations personnelles.

Tendances mondiales et projection sur les forces militaires

Utilité de la force 101 : les forces militaires et la guerre ont toujours été présentes – Thucydide, Machiavelle, Hobbes, et al. nous ont tous présenté ce concept. Le simple titre de cette revue suggère qu’il y aurait peu à dire sur ce sujet général. Malheureusement, il y a eu une vague récente d’ouvrages tels que celui du General Rupert Smith, intitulé L’utilité de la force, dans lequel il affirme que « [l]a guerre n’existe plus… la guerre en tant que bataille entre des hommes et des machines, la guerre comme évènement majeur et décisif d’un différend en matière de relations internationales, cette guerre n’existe plus. »33 De telles batailles sont rares, je l’admets. En examinant les conflits au cours des 50 dernières années en Asie du Sud, en Amérique centrale, dans les Balkans et en Afrique, je peux comprendre qu’on soit tenté de rédiger un tel éloge funèbre. Cependant, j’ai le sentiment que ce concept est peut-être trop simpliste, sinon franchement prématuré. La dernière « vraie guerre », telle qu’elle est décrite dans l’ouvrage de M. Studs Terkel intitulé The Good War, n’était pas un événement régi par les règles du Marquis de Queensbury, qui se déroule loin des non-combattants, durant le jour, et qui s’arrête le temps d’une pause pour se rafraîchir… comme les citoyens de Dresde, de Londres ou de Hiroshima peuvent l’attester. Admettons que certaines caractéristiques, notamment le fait de combattre « de façon à minimiser les pertes, au lieu de combattre en usant de la force pour atteindre le but fixé, quel qu’en soit le prix », ont peut-être modifié l’accent, mais la conservation des troupes en vue de poursuivre le combat à un autre moment est loin d’être une prémisse novatrice34. Nous pouvons supposer que si nous étions impliqués dans un conflit dont les enjeux étaient très élevés, le General Smith serait obligé de rédiger une nouvelle version de son ouvrage, en gardant particulièrement un œil sur le monde impitoyable à l’extérieur de notre cour. 

La Force armée (Afghanistan) sous les ordres du brigadier-général Guy Laroche est déployée dans la province de Kandahar, Afghanistan et fait partie de la Force de sécurité et d'assistance internationale (FIAS).

Photo du MDN AR2008-T153-63 par le caporal-chef Bruno Turcotte

La Force armée (Afghanistan) sous les ordres du brigadier-général Guy Laroche est déployée dans la province de Kandahar, Afghanistan et fait partie de la Force de sécurité et d'assistance internationale (FIAS).

Prédire l’avenir est souvent une tâche douteuse – un fait pourtant évident pour les investisseurs des marchés boursiers et les professionnels du renseignement. Malgré cela, certaines tendances se dégagent, lesquelles pointent la voie à suivre avec un certain degré de certitude qui permettra de connaître le type de forces militaires dont le Canada a besoin. Par exemple, la croissance de la population, combinée aux pénuries potentielles de nourriture, d’eau et d’énergie, indique une croissance probable du nombre d’États en déroute et de l’instabilité. Avant de rayer les chars de combat principaux et les chasseurs de l’ordre de bataille, il ne faut toutefois pas oublier que d’ici 2030, il est probable qu’il n’y ait aucune puissance hégémonique autonome35. L’absence d’un équilibre stable de pouvoirs et de « forces policières internationales » entraînera vraisemblablement une ère de violence croissante.

Le terrorisme représente l’une des menaces contemporaines les plus évidentes, en particulier contre une société urbaine et axée sur la haute technologie. Bien qu’il s’agisse essentiellement d’une question d’application de la loi et d’ordre juridique, l’intervention en cas d’attaque terroriste importante constitue l’une des six missions principales des FAC36. Étant donné que cela présente un intérêt justifié pour le Commandement des Forces d’opérations spéciales du Canda (COMFOSCAN), en particulier la Force opérationnelle interarmées 2 (FOI-2) et l’Unité interarmées d’intervention du Canada (UIIC), plutôt qu’une question générale concernant les FAC, le présent article n’approfondira pas ce sujet.

Il va sans dire que le monde est formé de pays hostiles qui comptent d’importantes forces militaires conventionnelles. L’Iran, par exemple, qui devient de plus en plus autocratique et belliqueux, possède le plus grand inventaire de missiles balistiques du Moyen-Orient, lequel ne cesse d’augmenter et de se perfectionner. En outre, la Corée du Nord dispose également d’une importante force militaire conventionnelle et celle-ci est bien positionnée pour mener des attaques limitées qui peuvent survenir avec peu d’avertissements, voire aucun, telles que le naufrage d’un navire de guerre sud-coréen en 2010 et le bombardement d’artillerie en direction d’une île sud-coréenne le long de la ligne de démarcation septentrionale. Par la suite, les forces nord-coréennes ont fait des progrès en matière d’armes de destruction massive et ont réussi à lancer un satellite et à effectuer un troisième essai nucléaire. De son côté, la Chine est devenue de plus en plus intransigeante dans le cadre de ses revendications territoriales maritimes. La modernisation importante de ses forces militaires favorise les mesures de dissuasion nucléaire ainsi que les capacités d’attaque stratégique et permet de renforcer sa capacité croissante liée à la projection de puissance37. Tel que le montre ce tableau détaillant la possession d’armes, il existe d’importantes forces militaires conventionnelles dans le monde; certaines d’entre elles sont activement anti-Occident, et d’autres détiennent une feuille de route douteuse en matière de stabilité.

[Figure 1 : Armes conventionnelles actuelles]38

Figure 1 : Armes conventionnelles actuelles.

Auteur et Bureau d’édition de la 17e Escadre, Winnipeg

Figure 1 : Armes conventionnelles actuelles.

Comme les Américains l’ont indiqué dans leur plus récent Quadrennial Defence Review, on peut déduire certaines tendances difficiles dans l’évolution de la planification de la force39. De même, le Canada doit trouver l’équilibre entre l’état de préparation actuel et la mise sur pied de capacités futures. Nous ne pouvons pas simplement « faire une pause » et dire au gouvernement que « nous allons nous arrêter ici ». Ensuite, malgré la prolifération du renseignement, nous nous retrouvons constamment dans des endroits inattendus. En 2001, nous nous souciions autant de l’Afghanistan que nous nous sommes souciés des Balkans en 1991. Enfin, et en lien avec ce qui précède, il est pratiquement impossible de caractériser précisément les menaces comme conventionnelles ou irrégulières en raison de la fusion des capacités ennemies. Dans le cadre d’un futur conflit, on pourrait très bien constater une combinaison d’opérations de guerre non conventionnelle sous la forme de terrorisme et de cyberattaques, combinées à un armement conventionnel tel que des armes tirées à distance de sécurité et une défense aérienne axée sur l’interdiction d’accès40

Pour obtenir un modèle plus précis d’un tel conflit, il serait difficile de trouver un exemple plus pertinent que le conflit israélo-libanais de 2006. Le Hezbollah avait l’habitude de recourir au terrain urbain et à la proximité de civils innocents pour faciliter l’embuscade des forces israéliennes et mieux se fondre ensuite parmi les non-combattants. Les tactiques de choix consistaient en des tirs à la mitrailleuse et des tirs d’élite décentralisés sur des convois arrêtés en raison de la présence d’IED41. De façon plus conventionnelle, les Israéliens ont subi des tirs de roquette indirects et fait l’objet de menaces importantes provenant de missiles antichars modernes, notamment les AT-13 et les AT-14 russes; on estime que les missiles antichars sont responsables de 40 pour 100 des pertes des forces de défense israéliennes42. Le Hezbollah a même utilisé des véhicules aériens sans pilote armés iraniens, de type Mirsad-1 et Ababil-3, dotés de systèmes de navigation GPS d’une portée de 450 km et contenant une charge explosive de 50 kg43. Comme il a été susmentionné, dans le cadre d’un tel conflit, les planificateurs de la force auraient de la difficulté à faire des projections dans un contexte financier et géopolitique canadien.

Des militants du Hezbollah marchent sur une autoroute à El Ghazaleh, dans le Sud du Liban, le 1er octobre 2006.

Reuters RTR1HWZC par Jamal Saidi

Des militants du Hezbollah marchent sur une autoroute à El Ghazaleh, dans le Sud du Liban, le 1er octobre 2006.

Quel est l’avenir des forces militaires canadiennes?

Bien qu’il ne s’agisse certainement pas d’une révélation, les forces militaires canadiennes doivent composer avec un contexte politique et économique difficile. Au Canada, le soutien dans le cadre de campagnes expéditionnaires qui ne relèvent pas de missions de maintien de la paix n’a jamais été particulièrement élevé, malgré la distribution d’autocollants pour pare-chocs « appuyons nos troupes ». L’alliance occidentale a participé à deux guerres impopulaires qui n’ont pas présenté d’avantage perceptible au niveau de la sécurité ou de l’intérêt national du Canada. 

Les forces militaires demeurent en place pour appliquer les politiques gouvernementales, tant au pays qu’à l’étranger. Comme il est énoncé dans la doctrine des FAC, il ne fait aucun doute que le gouvernement continuera de recourir aux forces militaires comme outil clé de politique étrangère. La mission de l’Armée de terre, qui consiste à mettre sur pied et à maintenir une force polyvalente et apte au combat afin de respecter les besoins du Canada en matière de défense, est tirée de cette structure. Les besoins du Canada ont pour objectif de protéger les intérêts nationaux vitaux, de contribuer à la paix et à la sécurité internationales et de promouvoir l’unité nationale, la démocratie, la primauté du droit ainsi que les droits et libertés individuels. Ils visent également à favoriser la paix, le maintien de l’ordre et un bon gouvernement ainsi que le bien-être économique44. L’ouvrage intitulé L’Armée de terre du Canada indique également que « […] seule l’Armée de terre possède la capacité de prendre et de tenir le terrain, de maîtriser et de protéger physiquement les ressources et les gens au sol. Comme telle, elle est un élément stratégique et décisif du pouvoir national. »45

Si l’on examine la question de la politique étrangère dans son ensemble, le MAECI a fixé les trois objectifs suivants : « la promotion de la prospérité et de l’emploi; la protection de notre sécurité dans un cadre mondial stable; et, la projection des valeurs et de la culture canadiennes ».46 Cependant, même dans le cadre de ces politiques générales, il y a peu de motivation supplémentaire pour maintenir une force permanente visant à intervenir dans des conflits tels que celui en Afghanistan tant que ceux-ci ne présentent qu’un intérêt indirect.

Les politiciens, qu’ils soient membres du parti au pouvoir ou de l’opposition, se serviront de plus en plus de ces conflits récents pour marquer des points dans les médias. Comme M. Robert Kaplan, analyste stratégique, le fait remarquer au sujet de la défaite des Américains en Iraq, la guerre était « […] en fait un échec, non pas parce qu’aucune arme [de destruction massive – la raison publique invoquée par l’administration Bush pour envahir l’Iraq] n’a été trouvée, mais en raison du coût financier, des pertes de vie et du bourbier militaire qui a suivi, et cela a permis d’accroître la puissance iranienne dans la région pendant près d’une dizaine d’années47. » [TCO] Cela s’inscrit dans la même lignée que les propos du Lieutenant Colonel Daniel Davis de la US Army dans un article cinglant du Armed Forces Journal intitulé « Truth, lies and Afghanistan: How military leaders have let us down » (La vérité, les mensonges et l’Afghanistan : de quelle façon les leaders militaires nous ont laissé tomber). Le Lieutenant Colonel Daniel Davis y indique ce qui suit : « Ce que j’ai vu ne ressemble en rien aux déclarations officielles optimistes des leaders militaires américains relatives aux conditions sur le terrain […] Au lieu de cela, j’ai été témoin de l’échec à pratiquement tous les niveaux48. » [TCO] De telles déclarations sont reprises par les journalistes ennemis, et le résultat premier est que les politiciens ont une opinion moins favorable de leurs forces armées. Pour contrer ceci et éviter que cela ne se reproduise, les réalités de la guerre ne doivent pas être épargnées. « Lorsqu’il faut décider quels sont les conflits qui méritent l’intervention de notre pays et quels sont ceux qui ne la méritent pas, nos leaders supérieurs doivent être francs – très clairement, au besoin – envers les dirigeants et les gens peu informés, et leur indiquer les intérêts en jeu ainsi que le coût approximatif qu’entraînera le succès49. » [TCO]

En outre, on peut percevoir une tendance récente liée à la publication d’ouvrages faisant état de scandale, par exemple celui de M. Rob Semrau intitulé The Taliban Don’t Wave et celui de M. Frank Ledwidge intitulé Losing Small Wars: British Military Failure in Iraq and Afghanistan. De tels ouvrages ont tendance à être rédigés de façon simpliste et à renfermer une mine de citations utilisées volontiers hors contexte. Ce genre de couverture médiatique possiblement négative, lorsqu’elle est combinée au ralentissement économique mondial, discrédite un gouvernement – en gardant un œil sur les électeurs – trop enclin à entreprendre une opération dans le cadre de conflits non stratégiques et « discrétionnaires » qui répondent si peu à l’intérêt national.

Malgré ce scénario politique déprimant, la présence des FAC est toujours nécessaire. En termes très simples, les FAC constituent le dernier recours lorsque les intérêts du Canada doivent être défendus par la force. Formulé de cette manière, l’engagement de forces aptes au combat est une affaire de choix, influencé de façon importante par la caractérisation de ses intérêts, c’est-à-dire s’il s’agit d’un intérêt lié à la survie ou d’un intérêt essentiel, important, ou encore indirect : la survie est suffisamment explicite; les questions essentielles peuvent causer un tort considérable à l’État; les questions importantes peuvent avoir une incidence négative sur le bien-être politique, économique et idéologique d’un État et les mesures correctives sont habituellement le fruit de négociations diplomatiques; quant aux questions indirectes, elles touchent les citoyens ou les entreprises privées qui exercent des activités à l’étranger, sans avoir d’incidence négative sur notre bien-être50

Certains décideurs et façonneurs d’opinion médiatique sont prédisposés à se tordre les mains de désespoir et à proclamer que nous sommes dans l’obligation de nous soucier de tels régimes ou qu’il « faut faire quelque chose » chaque fois qu’un enfant en larmes apparaît dans un reportage international. Cependant, même M. Lester Pearson a compris nos limites et a choisi de présenter la participation du Canada en Corée comme une question de « sécurité nationale sélective – le Canada décide si nous intervenons dans le cadre de la Charte [des Nations Unies]; il décide également du moment et du lieu51. » [TCO] En raison des crises financières mondiales actuelles, notre « revenu disponible » pour effectuer des déploiements à l’étranger nécessitera des choix encore plus délicats. Nos décideurs doivent être en mesure d’identifier les conflits qui perturbent de façon stratégique des états, des régions ou des routes de transit.

Le Canada doit conserver sa souplesse lorsqu’il décide de prendre des engagements à l’étranger. En plus de la gravité des intérêts menacés, nos engagements dans le cadre d’alliances sont le seul autre facteur important en matière d’intervention. Bien que l’OTAN fasse partie de ces alliances, notre situation géographique et notre culture nous prédisposent à ce que le comportement du Canada en matière de politique étrangère s’aligne en grande partie sur celui des États-Unis52. Le partage d’un tel fardeau en matière de sécurité est dans notre meilleur intérêt et il ne peut être effectué par une force de type policière.

Malgré les incertitudes de l’avenir, les responsabilités des FAC sont très claires. Le gouvernement canadien l’a énoncé en termes clairs et concis :

Étant donné le caractère complexe et imprévisible du contexte actuel en matière de sécurité, le Canada doit pouvoir compter sur des forces armées modernes, bien entraînées, bien équipées et dotées de la flexibilité et des capacités essentielles requises pour contrer les menaces traditionnelles et asymétriques […] Les Canadiens s’attendent à ce que leurs forces armées soient parfaitement en mesure d’assurer leur sécurité et d’appuyer la politique étrangère et les objectifs de leur pays en matière de sécurité, et ils méritent de telles forces armées53.

En imposant une « force entièrement intégrée, souple, polyvalente et apte au combat », le gouvernement nous éloigne effectivement d’une force militaire centrée sur la COIN et en fait une force capable de servir les intérêts essentiels du Canada. La COIN, en tant que sous-ensemble des opérations de stabilité, se rapproche davantage d’une opération de combat que d’une opération de maintien de la paix, mais le verbe « se rapprocher » indique clairement qu’il ne s’agit pas de la principale fonction des forces militaires. Pour reprendre les propos de Mme Janine Davidson, Ph. D., ancienne Deputy Assistant Secretary of Defense for Plans des États-Unis, le fait d’avoir une doctrine sur la COIN ne signifie pas que nous avons le droit d’envahir des pays afin de mener des opérations de COIN54.

Les discussions en cours à Ottawa concernant l’attribution des ressources et la planification de la force sont alimentées par les documents sur le profil de risque organisationnel du MDN/des FAC. Dans le rapport actuel du MDN, le premier risque est la « Reconstitution des Forces canadiennes », dans lequel il est indiqué que les FAC « […] après avoir mené pendant des années des opérations à rythme élevé axées sur l’Afghanistan, continueront de maintenir l’équilibreentre les niveaux de disponibilité opérationnelle nécessaires pour conserver leur leadership et leur souplesse. »55 Cela laisse entendre que la situation actuelle, en raison de nos liens étroits avec la contre-insurrection en Afghanistan, est un risque qui nécessite un nouvel équilibre.

Le caporal Montgomery du 12e escadron de campagne, 1er Régiment de Génie de combat d’Edmonton, Alberta, signale à un collègue tout en conservant une défense tous azimuts au cours de l’opération TIMIS PREEM.

Photo du MDN AR2008-K073-32 par le caporal-chef Karl McKay

Le caporal Montgomery du 12e escadron de campagne, 1er Régiment de Génie de combat d’Edmonton, Alberta, signale à un collègue tout en conservant une défense tous azimuts au cours de l’opération Timis Preem.

La formule « se préparer au monde connu par l’instruction, et à l’inconnu par l’éducation » donne à penser que nous avons acquis les compétences nécessaires pour résoudre tout problème tactique avec lequel nous devons composer étant donné que l’instruction élémentaire au combat, si nous nous en servons, couvre la majorité des menaces potentielles les plus dangereuses. Ajoutons à cela l’avertissement incontestable lié à une analyse après action des opérations américaines en Iraq, qui indiquait ce qui suit : « Leçon : Plus le risque géopolitique est grand, plus l’exécution de l’opération doit être menée de main de maître! »56 Bien que nos leaders militaires aient acquis les compétences nécessaires, le gouvernement dilue ce savoir-faire à ses risques. De récents exercices ont apporté la preuve inquiétante qu’une telle érosion des compétences est déjà en train de se produire, que ce soit l’érosion de certaines fonctions de logistique en raison du recours habituel à des entrepreneurs dans le théâtre, ou des soldats qui croient qu’il est « normal » d’emprunter les routes principales sans camouflage ou mouvement tactique étant donné que c’est ce qu’ils connaissent de la guerre.

De plus en plus de pressions sont exercées pour spécialiser les forces militaires en vue de mettre l’accent sur ces « petites guerres » et d’améliorer les ensembles de compétences dans le cadre de missions non traditionnelles, notamment pour instaurer la stabilité après les conflits, apporter de l’aide humanitaire et assurer la reconstruction. Chaque indice sur la voie à suivre, qu’il s’agisse des menaces potentielles ou de l’économie canadienne, nous enlève la possibilité de mettre sur pied des forces de mission unique. M. Frank Hoffman, du Potomac Institute, indique que nous n’avons pas la possibilité de mettre en place des organisations distinctes pour chaque volet d’un monde lié à la « guerre à trois volets »57. La simple réalité, c’est qu’une force militaire conventionnelle apte au combat peut intervenir dans le cadre de conflits à plus petite échelle, mais qu’une force militaire axée sur la COIN est incapable d’intervenir dans une guerre conventionnelle.

Nous ne faisons pas valoir que le futur espace de combat ne nécessitera pas d’interventions nuancées et multilatérales. Cependant, nous sommes d’avis que l’on tend à faire des économies de bouts de chandelle en mettant sur pied une force militaire policière uniquement parce qu’il est moins coûteux de répéter des exercices où l’on se projette avec des anciens d’un village autour d’une tasse de thé que de maintenir les compétences en matière d’attaques toutes armes. L’intervention ultime des FAC qui ne peut échouer revient aux forces de combat sur le terrain58. Bref, l’histoire de l’humanité a prouvé, et ce, malgré les revendications concurrentes des fabricants d’armes, que la guerre a toujours consisté en une tuerie élémentaire, avec l’exigence inévitable que « seule l’infanterie peut tenir le terrain ».

Le caporal-chef Mélanie Parent, chef d’équipage d’un véhicule blindé léger et membre du 12e Régiment blindé du Canada à Valcartier, au Québec, consulte sa carte en route vers le district de Maywand au cours de l’opération Roob Unyip Janubi, le 5 août 2008.

Photo du MDN AR2008-K049-56 par le caporal-chef Karl McKay

Le caporal-chef Mélanie Parent, chef d’équipage d’un véhicule blindé léger et membre du 12e Régiment blindé du Canada à Valcartier, au Québec, consulte sa carte en route vers le district de Maywand au cours de l’opération Roob Unyip Janubi, le 5 août 2008.

Conclusion

Les pays occidentaux analysent leurs forces militaires en fonction de deux facteurs concurrents : la fin des opérations de combat dans la région du golfe Persique et en Asie du Sud-Ouest, ainsi que le ralentissement économique mondial. Les forces militaires constituent une cible de choix pour ceux qui réclament les « dividendes de la paix » à l’issue des hostilités. Comme il a été mentionné, il ne s’agit pas précisément d’une nouvelle pratique. En effet, nul besoin de consulter nos livres d’histoire pour savoir ce qui s’est passé en 1919 ou en 1946, alors que bon nombre d’entre nous avons vécu la réduction de l’équipement et de l’instruction durant la « décennie de noirceur » après la guerre froide.

Alors qu’on revient à la charge une fois de plus en brandissant le spectre de la reddition de comptes, les leaders militaires et les penseurs stratégiques réfléchissent sur les leçons à tirer des conflits. Bon nombre des points soulevés sont dictés par l’économie et la politique gouvernementale, mais plusieurs choix restent à faire. Nos collègues américains ont franchi une étape cruciale dès le début des discussions sur la planification en faisant une distinction essentielle entre les « militants » et les « conservateurs ». Il va sans dire que ces termes simples visent uniquement à faciliter les discussions et qu’ils comprennent des nuances importances.

Les « militants » – qui soutiennent l’importance de mettre en place une force militaire apte à mener des opérations de stabilité et de contre-insurrection – ont été encouragés par la vague d’enthousiasme entourant les recherches effectuées au cours de la première décennie du XXIe siècle. Les civils sont intervenus souvent dans les débats à l’appui de ces stratégies; après tout, « construire des écoles et des puits » suscite davantage l’optimisme que de « se rapprocher de l’ennemi et de le détruire ». Ceux qui avaient accepté le fait que les forces militaires avaient un rôle à jouer simplifiaient le tout en parlant d’« assurer la sécurité », de façon à ce que les ONG et les fonctionnaires puissent travailler en toute tranquillité. On ne comprenait pas qu’assurer la sécurité devant un ennemi résolu et souple était « plus simple à dire qu’à faire ». Tant en Iraq qu’en Afghanistan, les efforts en matière de COIN ont été considérés comme fructueux, non pas dans la mesure où les régions étaient en paix et que la démocratie et les droits de la personne étaient respectés, mais plutôt « pour éviter d’autres gros titres négatifs »59.

De leur côté, les « conservateurs » ont tendance à croire qu’il est nécessaire de mener des opérations de COIN et des opérations semblables et ils les considèrent comme un sous-ensemble distinct des compétences liées au combat conventionnel. L’Afghanistan, en raison des pertes humaines et financières, s’est avéré un excellent polygone d’essai pour confirmer bon nombre de ces compétences et déterminer les forces et les faiblesses de l’équipement. Cependant, étant donné qu’il s’agit d’un moment décisif pour tant de militaires, un désintérêt croissant est à craindre envers le maintien des compétences nécessaires contre un ennemi quasi équivalent qui poserait une menace à la survie – ou une menace vitale – de nos intérêts nationaux.

Il est permis de penser qu’une telle menace conventionnelle axée sur la « technologie de pointe » est statistiquement improbable en comparaison de l’agitation dans les zones non gouvernées et les États en déroute, ou de la présence de dictateurs régionaux menaçant les États voisins. Néanmoins, afin de remporter du succès dans un tel conflit, si l’on ne parvient pas à préparer nos militaires de manière efficace, au moyen de l’instruction et de l’équipement appropriés, on subira des conséquences beaucoup plus terribles. La réorganisation de la force militaire en force policière, particulièrement en raison de l’opportunisme économique à court terme, réduirait considérablement les options du gouvernement canadien en matière de politique étrangère dans le cadre de futurs conflits, y compris ceux ne visant pas la guerre conventionnelle. En fait, cela ne ferait probablement qu’enliser les soldats canadiens dans des guerres sans issue et les empêcher d’intervenir efficacement dans des conflits conventionnels continus.

Des soldats canadiens de l’équipe de liaison et de mentorat opérationnel (ELMO) (à la gauche) et des soldats de l’armée nationale afghane traversent à pied un champ de pavot dans le cadre d’une opération dans le district de Panjwayi en Afghanistan.

Photo du MDN AR2008-Z140-07 par le caporal Simon Duchesne

Des soldats canadiens de l’équipe de liaison et de mentorat opérationnel (ELMO) (à la gauche) et des soldats de l’armée nationale afghane traversent à pied un champ de pavot dans le cadre d’une opération dans le district de Panjwayi en Afghanistan.

NOTES

  1. Robert Kaplan, The Coming Anarchy; Shattering the Dreams of the Post Cold War, New York, Vintage Books, 2000, p. 182

  2. Andrew J. Bacevich, « The Petraeus Doctrine », The Atlantic (en ligne) (octobre 2008), http://www.theatlantic.com/magazine/archive/2008/10/the-petraeus-doctrine/306964 (consulté le 12 janvier 2013).

  3. Canada, Rapport sur les plans et les priorités de 2012-2013, partie III – Budget des dépenses, Ottawa, ministère de la Défense nationale, 2013, p. 15.

  4. Commission économique des Nations Unies pour l’Europe, Table 4. Oil Export Routes and Options in the Caspian Sea Region (en ligne), http://www.unece.org/fileadmin/DAM/env/epr/experts/Azerbaijan/eia_Caspian%20Sea%20Region%20Reserves%20and%20Pipelines.htm (consulté le 4 janvier 2013).

  5. H.R. McMaster, « On War: Lessons to be Learned », Survival, vol. 50, no 1 (février-mars 2008), p. 21.

  6. CTV News, « Saying “no” to Iraq War was “important” decision for Canada: Chretien » (en ligne), http://www.ctvnews.ca/politics/saying-no-to-iraq-war-was-important-decision-for-canada-chretien-1.1192878 (consulté le 13 mars 2013). Une interprétation peut-être cynique fournie par les historiens David Bercuson et Jack Granatstein est que la motivation du Canada était que celui-ci ne soit pas « perçu à Washington et à Bruxelles comme un profiteur » [TCO]. Voir l’article de MM. David J. Bercuson et J.L. Granatstein, intitulé « Lessons Learned? What Canada Should Learn from Afghanistan », Canadian Defence & Foreign Affairs Institute (en ligne) (octobre 2011), p. 32, à l’adresse http://www.cdfai.org/PDF/Lessons%20Learned.pdf (consulté le 12 février 2013).

  7. Un groupement tactique du 3e Bataillon, Princess Patricia’s Canadian Light Infantry, a été envoyé dans la région de Kandahar en 2002 avec la force opérationnelle de la US Army Task Force dans le cadre de l’opération Enduring Freedom. La plupart des engagements de l’Armée de terre ont été effectués dans le cadre de la FIAS, d’abord près de Kaboul, puis à Kandahar. Lorsque les troupes ont été retirées, les Forces d’opérations spéciales canadiennes ont poursuivi le mandat de l’opération Enduring Freedom.

  8. Cette liste est loin d’être exhaustive; elle vise simplement à souligner le large spectre du soutien militaire durant l’opération.

  9. Gerald Schmitz, Understanding the Curious Case of Canada’s Ambiguous Approach to International Democracy Assistance, document fourni au Centre for International and Defence Policy de l’Université Queen, le 25 février 2013. Exemplaire de l’auteur. Le CIDPDD, connu sous le nom de « Droits et démocraties », a été dissout par le gouvernement en 2012 en raison de controverses liées à des activités anti-israéliennes présumées.

  10. « More soldiers, tanks necessary to fight Taliban: Ottawa », Canadian Broadcasting Corporation (en ligne) (15 février 2006), http://www.cbc.ca/news/canada/story/2006/09/15/tanks-afghanistan.html (consulté le 3 janvier 2013).

  11. Quil Lawrence, « Afghans Wary of Building up Local Police Forces », National Public Radio (en ligne) (13 janvier 2012), http://www.npr.org/2011/01/13/132866865/afghans-wary-of-building-up-local-policing-forces (consulté le 3 octobre 2012).

  12. Hew Strachan, « Strategy or Alibi? Obama, McChrystal and the Operational Level of War », Survival, vol. 52, no 5 (octobre-novembre 2010), p. 163.

  13. Gerald Schmitz, Understanding the Curious Case of Canada’s Ambiguous Approach to International Democracy Assistance, document fourni au Centre for International and Defence Policy de l’Université Queen, le 25 février 2013. Exemplaire de l’auteur.

  14. Ces propos ont été tenus par un officier supérieur de l’Armée canadienne qui souhaite conserver l’anonymat.

  15. Michael Hastings, « The Runaway General », Rolling Stone, no 1108-1109 (le 10 juin 2010) (en ligne), http://www.rollingstone.com/politics/news/the-runaway-general-20100622 (consulté le 7 décembre 2013).

  16. Ibid.

  17. Strachan, « Strategy or Alibi? », p. 169.

  18. Expérience de l’auteur. Il ne s’agissait pas de moi. Bien que j’aie entendu à plusieurs reprises l’expression « viser le mécontentement » attribuée à M. David Galula, je connais bien son ouvrage intitulé Contre-insurrection : théorie et pratique, et je suis incapable de trouver une référence précise.

  19. General David Petraeus, commandant de la US Army en Iraq et auteur principal du US Army/US Marine Corps Counterinsurgency Field Manual. Lieutenant Colonel (retraité) John Nagl, expert reconnu de la US Army en COIN et auteur de l’ouvrage Counterinsurgency Lessons from Malaya and Vietnam (mieux connu par son sous-titre : Learning to Eat Soup with a Knife). Lieutenant Colonel David Kilcullen, officier de l’Australian Army qui est réputé pour conseiller le gouvernement américain sur la « guerre complexe », c.-à-d. les insurrections et le terrorisme.

  20. Howard G. Coombs, Ph. D., « Canadian Whole of Government Operations: Kandahar – 09/2010 – 07/2011 », CDA Institute Report (décembre 2012), p. 4 et 5. Au lieu d’éviter de le clamer haut et fort, le rapport du Parlement susmentionné indique ce qui suit : « Le succès de cette stratégie tient à la capacité des trois D à mettre à contribution leur savoir-faire respectif de façon dynamique et dans une parfaite complémentarité, en fonction de la mission à accomplir. Il semble cependant que l’ACDI a peut-être freiné les efforts de la diplomatie et de la défense à la fin de 2006. » Voir le document Canada, Chambre des communes, Les Forces canadiennes en Afghanistan, p. 60 et 61.

  21. Reed Kitchen, « Things I Learned from People Who Tried to Kill Me », Small Wars Journal (en ligne) (le 19 juin 2012), http://smallwarsjournal.com/jrnl/art/things-i-learned-from-people-who-tried-to-kill-me (consulté le 15 octobre 2012).

  22. Robert Kaplan, « Counterinsurgency Forever? », Stratfor (en ligne) (le 3 octobre 2012), http://www.stratfor.com/weekly/counterinsurgency-forever (consulté le 15 octobre 2012).

  23. John M. Gillette, « Afghanistan: What Went Wrong? », Small Wars Journal (en ligne) (le 5 février 2013), http://smallwarsjournal.com/jrnl/art/afghanistan-what-went-wrong (consulté le 15 février 2013).

  24. Mark Sedra, « Time to End Combat Operations in Afghanistan », Conseil international du Canada (en ligne) (le 23 mars 2012), http://opencanada.org/features/the-think-tank/comments/time-to-end-combat-operations-in-afghanistan (consulté le 5 septembre 2012). La US Army souhaite la peine de mort pour le Staff Sergeant Bales, accusé notamment de meurtre avec préméditation (16 chefs d’accusation), de tentative de meurtre (6 chefs d’accusation) et de voies de fait (7 chefs d’accusation). Parmi ses présumées victimes, on compte 9 enfants. Pour de plus amples renseignements, consulter l’article de M. Kirk Johnson, intitulé « Army Seeking Death Penalty in Massacre of 16 Afghans », New York Times (en ligne) (le 19 décembre 2012), http://www.nytimes.com/2012/12/20/us/robert-bales-faces-death-penalty-in-afghan-massacre.html (consulté le 28 décembre 2012).

  25. David Galula, Contre-insurrection : théorie et pratique, Paris, Economica, 2008, p. 74. Alors que nous mettons l’accent sur la connaissance de la culture dans le cadre du principe lié « au cœur et à l’esprit », combien de militaires canadiens ont appris à parler pachtou ou dari?

  26. Gillette, « Afghanistan: What Went Wrong? ».

  27. General (retraité) Barry R. McCaffrey, Withdrawal Under Pressure: Afghanistan 2013-2014: The Coming Civil War (en ligne) (le 13 février 2013), www.mccaffreyassociates.com (consulté le 18 février 2013).

  28. Ibid.

  29. Ibid. Voir également le Transparency International Corruption Index, (en ligne), http://www.transparency.org/cpi2011/results (consulté le 28 février 2013). Même le lieutenant-général Baaz Mohammad, sous-ministre de la Défense en matière de personnel et d’éducation de l’Afghanistan, souligne que les leaders font fuir les troupes et que les absences des militaires sans permission résultent « du mauvais comportement des commandants envers les soldats […] [il est insensé d’acquérir des aéronefs, des chars et de l’équipement militaire. Si nous n’avons pas de militaires adéquatement formés et désignés pour assurer la maintenance de l’équipement, nous perdrons la guerre. » [TCO] Rapport du sous-ministre de la Défense en matière de personnel et d’éducation de l’Afghanistan au Centre de conférences de la force aérienne de l’Afghanistan, Kaboul, le 5 février 2013. Exemplaire de l’auteur. Remerciements adressés à M. Howard Coombs, Ph. D., « Aerogram ».

  30. ITAR-TASS, Over 20 tons of drugs seized by Russian drug police in special operation in Afghanistan (en ligne), http://www.itar-tass.com/en/c32/673122.html (consulté le 13 mars 2013).

  31. Henry Kissinger, « The Viet Nam Negotiations », Foreign Affairs, vol. 47, no 2 (janvier 1969), p. 214.

  32. Hastings, « The Runaway General ».

  33. Rupert Smith, L’utilité de la force : l’art de la guerre aujourd’hui, Paris, Economica, 2007, p. 1.

  34. Ibid., p. 17.

  35. US National Intelligence Council, Global Trends 2030: Alternative Worlds, Washington, Director of National intelligence, 2012, p. 11.

  36. Canada, Stratégie de défense Le Canada d’abord, Ottawa, ministère de la Défense nationale, 2008, p. 10.

  37. US Director of National Intelligence, Statement for the Record: Worldwide Threat Assessment of the US Intelligence Community; Senate Select Committee on Intelligence, gouvernement des États-Unis, Office of the Director of National Intelligence, le 12 mars 2013, p. 7, 8, 15, 21 à 23.

  38. Global Fire Power – 2013 (en ligne), www.globalfirepower.com (consulté le 13 mars 2013).

  39. Kathleen H. Hicks et Samuel J. Brannen, « Force Planning in the 2010 QDR », Joint Force Quarterly, vol. 59, no 4 (2010), p. 139 et 140.

  40. US National Intelligence Council, Global Trends 2030, p. 70 à 72.

  41. Andrew Exum, « Hizballah at War: A Military Assessment », Policy Focus #63, Washington DC, Washington Institute for Near East Policy, 2006, p. 9 et 10.

  42. Frank G. Hoffman, Conflict in the 21st Century; The Rise of Hybrid Wars, Arlington, Virginie, Potomac Institute for Policy Studies, 2007, p. 37.

  43. Anthony Cordesman, Preliminary Lesson of Israeli-Hezbollah War, Washington, Center for Strategic and International Studies, 2006, p. 5 et 16.

  44. Canada, Objectif défini : le concept d’emploi de l’Armée de terre, Ottawa, ministère de la Défense nationale 2004, p. 5 à 7.

  45. Canada, Armée de terre du Canada : nous protégeons nos foyers et nos droits, Ottawa, ministère de la Défense nationale 2004, p. 2.

  46. Canada, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, Le Canada dans le monde, Ottawa, Groupe Communication Canada, 1995, p. i et ii. Heureusement, Le Canada dans le monde, de façon tout à fait bureaucratique, évite d’aborder des questions pointues comme la définition des intérêts nationaux.

  47. Robert D. Kaplan, « Rethinking the Iraq War », Stratfor (en ligne), http://www.stratfor.com/weekly/rethinking-iraq-war (consulté le 13 mars 2013).

  48. Lieutenant Colonel Daniel Davis. « Truth, lies, and Afghanistan: How military leaders have let us down », Armed Forces Journal (en ligne) (février 2012), http://armedforcesjournal.com/2012/02/8904030?id=4573 (consulté le 26 février 2013).

  49. Ibid.

  50. Ross Graham, Ph. D. Canada’s Vital Interests, Collège des Forces canadiennes, CESN 3, 2001, p. 2.

  51. Harald von Riekhoff, « Canada and Collective Security », David B. Dewitt et David Leyton-Brown, (éd.), Canada’s International Security Policy, Scarborough, Ontario, Prentice Hall, 1995, p. 239. Accent de l’auteur sur le terme « sélective ».

  52. Kim Richard Nossal, The Politics of Canadian Foreign Policy, Scarborough, Prentice Hall, 1995, p. 68.

  53. Canada, Stratégie de défense Le Canada d’abord, Ottawa, ministère de la Défense nationale, 2008, p. 7. Au moment de la rédaction du présent article, le gouvernement a indiqué que le document faisait l’objet d’une révision.

  54. Octavian Manea et Janine Davidson, « Rebalancing the US Military for 21st Century Threats: An Interview with Janine Davidson », Small Wars Journal (en ligne) (le 29 octobre 2012),  http://smallwarsjournal.com/jrnl/art/rebalancing-the-us-military-for-21st-century-threats (consulté le 6 décembre 2012).

  55. Canada, Rapport sur les plans et les priorités de 2012-2013, partie III – Budget des dépenses, Ottawa, ministère de la Défense nationale, 2013, p. 9-10. Accent de l’auteur.

  56. Kaplan, « Rethinking the Iraq War ».

  57. Hoffman, « Conflict in the 21st Century », p. 46.

  58. J’hésite à utiliser l’expression « ne pas échouer » étant donné qu’elle apparaît régulièrement dans des présentations PowerPoint qui traitent de n’importe quel sujet, allant des interventions à l’étranger à l’évaluation des normes individuelles d’aptitudes au combat.

  59. Kaplan, « Counterinsurgency Forever? ».